Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Afrique (suite)

La découverte, instrument du partage colonial : le Sahara et l’Afrique occidentale

Un autre disciple de Barth, le Français Henri Duveyrier, explore le Sahara (1859-1861), et ses relations avec les Touaregs, dont il amènera plusieurs chefs à Paris, faciliteront la pénétration de son pays dans le « Grand Désert ». Mais, en 1881, le massacre de la mission Flatters au sud d’Ouargla montrera que les difficultés restent encore grandes pour imposer le joug aux Touaregs. Les itinéraires tracés au Maroc par Charles de Foucauld (1883-1884) jouent aussi un rôle certain dans le développement de l’influence française à travers l’Empire chérifien. Au sud du Sahara, Faidherbe, gouverneur du Sénégal depuis 1854, complète la connaissance des régions où il étend l’administration française. En 1879 et 1880, le commandant Gallieni poursuit son œuvre, qui consiste à « ouvrir une route vers le grand fleuve des nègres » (le Niger), puis impose le protectorat au puissant chef Ahmadou (1887). De 1887 à 1889, Louis Binger explore les régions de l’intérieur de la Côte-d’Ivoire. En 1890 et 1891, enfin, le capitaine Monteil effectue une remarquable traversée de l’Afrique : parti de Saint-Louis du Sénégal, il gagne le Niger, puis le Tchad et remonte à travers le Sahara jusqu’à Tripoli. Cette expédition est la plus réussie des trois tentatives faites à ce moment-là pour relier entre elles les zones d’influence française au nord de l’équateur. Une autre expédition, celle de Paul Crampel, finira tragiquement par l’extermination de ses membres dans la région du Tchad (1891). La dernière, celle de Louis Mizon, entre en conflit avec les Anglais, dont elle foule les mouvances, et devra être rappelée avant d’avoir atteint le Bornou. En effet, depuis la conférence de Berlin (1884-1885), le partage des zones d’influence est codifié et les missions qui sont désormais envoyées doivent tenir compte des options déjà retenues. En 1899, trois missions françaises convergent de nouveau vers le Tchad : celle de Fernand Foureau et de François Lamy vient du Sud algérien ; celle d’Émile Gentil arrive par le Congo et l’Oubangui ; celle de Paul Voulet et de Charles Chanoine débouche enfin de l’ouest après avoir traversé des régions très mal connues. Mais ses chefs, qui ont toléré d’affreuses exactions, sont tués au cours d’une révolte de leurs troupes, après s’être eux-mêmes débarrassés du lieutenant-colonel Klobb, chargé de surveiller leur action. Après la jonction des trois colonnes, le combat de Kousseri (22 avril 1900) détruira la puissance de Rabah, le dernier grand chef indigène de la région. Plus au sud, les Français ont déjà acquis des gages à proximité du bassin du Congo, grâce à la reconnaissance de l’Ogooué par Brazza (1875-1878). Mais l’Afrique équatoriale, orientale et australe va leur échapper presque totalement : les difficultés, puis l’échec de la mission Marchand (1897-1898) qui se termine à Fachoda, obligent la France à renoncer à toute prétention dans le bassin du Nil.


L’Afrique centrale et australe

La découverte en Afrique des grands lacs et du bassin congolais est dominée par les deux grands noms de Livingstone*, qui traverse notamment tout le continent (1854-1856), et de Stanley*, qui le retrouvera en 1871, sur la rive orientale du lac Tanganyika, et qui plus tard, au cours d’une extraordinaire expédition de 999 jours (1875-1877), parcourra la région des grands lacs et descendra l’immense Congo. Enfin, l’antique problème des sources du Nil est dégrossi par l’Anglais John Speke, qui découvre le lac Ukerewe, qu’il baptise Victoria (1858) : son émissaire, origine du grand fleuve, est reconnu au cours d’un deuxième voyage (1860), effectué avec James Grant.

Une deuxième traversée du continent est effectuée par le Portugais Alexandre Serpa Pinto (1877-1879), qui part des possessions de son pays sur l’Atlantique et gagne ensuite l’Afrique australe. Deux de ses lieutenants, Roberto Ivens et Hermenegildo Capello, continuent son œuvre, explorant notamment les régions à peu près méconnues où naissent le Congo et le Zambèze (1885). Mais cette entreprise, qui ne cachait guère les ambitions portugaises dans le centre de l’Afrique australe, sera stoppée net par les Anglais en 1890. L’Allemand Hermann von Wissmann, à la même époque, précise le dessin de la partie méridionale du bassin du Congo. La dernière décennie du siècle va connaître de nombreuses autres missions, qui achèvent pratiquement l’immense travail de la découverte du continent noir, en même temps que se mettent en place les frontières des diverses colonies européennes : l’occupation effective par les administrateurs et l’écrasement des dernières résistances succèdent à l’ère de la découverte et des explorateurs.

S. L.

 Ö. Olsen, la Conquête de la Terre (trad. du norvégien, Payot, 1933-1937, 6 vol.). / R. et M. Cornevin, Histoire de l’Afrique, des origines à nos jours (Payot, 1956, rééd. 1966). / L. H. Parias (sous la dir. de), Histoire universelle des explorations (Nouvelle Librairie de France, 1956, 4 vol.). / J. Suret-Canale, l’Afrique noire (Éditions sociales, 1958-1964, 2 vol.). / C. Coquery, la Découverte de l’Afrique (Julliard, coll. « Archives », 1965). / H. Deschamps, Histoire des explorations (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1969).

Afrique noire

Ensemble des régions d’Afrique habitées principalement par des peuples noirs.


L’histoire


Les siècles obscurs


Absence de chronologies

Les Noirs font partie des peuples sans écriture. L’historien devra donc s’adresser d’abord aux autres sources qu’il a l’habitude de consulter.

La tradition orale est encore, en Afrique noire, très abondante et très vivante. Elle a parfois été transmise de père en fils, dans des familles de griots spécialisés. Lorsque ces récits sont nombreux et émanent de collectivités diverses — dynasties, clergés, villages, familles —, ils peuvent se recouper entre eux et fournir des repères chronologiques relativement précis, C’est le cas des Koubas (ou Bakoubas) du Congo, étudiés par J. Vansina. La plupart du temps, cependant, la fonction sociale des griots héréditaires n’existe pas. On en est alors réduit aux souvenirs des vieillards. Ces rumeurs, recueillies au gré des contingences individuelles, s’altèrent vite. Elles remontent rarement au-delà de trois ou quatre générations. Les événements importants tendent à s’y regrouper soit au début d’une évolution, autour des fondateurs d’un établissement, soit à une époque récente, autour des chefs qui accueillirent l’étranger.