Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Canaletto (Antonio Canal, dit il)

Peintre italien (Venise 1697 - id. 1768).


Formé dans l’atelier de son père, qui le faisait collaborer à des décors de théâtre, Canaletto ne tarda pas à trouver sa voie dans la peinture de « vedute », tableaux reproduisant des sites urbains qui, pour lui, furent principalement ceux de sa ville natale. Dans ce genre, alors illustré à Rome par Pannini (v. 1691-1765), il eut à Venise un précurseur lointain, Gentile Bellini*, un autre plus proche et sans génie, Luca Carlevarijs (1665-1731), mais surtout un rival, Francesco Guardi*. Il est facile d’opposer la fantaisie, la sensibilité, la touche frémissante de Guardi à la vision impassible de Canaletto, à son savoir-faire méticuleux et volontairement impersonnel. Une perspective rigoureuse, dont la perfection trahit l’usage de la chambre noire, ordonne le spectacle vénitien des canaux et des architectures, que leur ambiance lumineuse teinte d’une poésie subtile. Les contrastes du clair-obscur marquent la succession des plans et animent ainsi la composition, comme le font les petites figures qui, nombreuses et parfois rassemblées sous le prétexte de quelque fête, donnent l’échelle des édifices.

Le succès devait amener Canaletto à s’assurer le concours d’un atelier, ce que laisse apparaître une large part de sa production. Certaines « vedute » sont d’un art beaucoup plus personnel, ainsi La Scuola della Carità vue de San Vitale, peut-être son chef-d’œuvre (National Gallery, Londres).

D’abord italienne, la clientèle de Canaletto fut ensuite essentiellement britannique. Le consul de Grande-Bretagne, John Smith, lui servit d’imprésario auprès d’amateurs anglais qui recherchaient les « vedute » à sujets vénitiens, souvent en souvenir d’un voyage. L’artiste eut d’ailleurs des rapports plus étroits encore avec l’Angleterre, puisqu’il y fit trois longs séjours entre 1746 et 1755. Il traita les sites anglais avec l’exactitude et le sens de l’espace dont il avait fait preuve à Venise, et sut exprimer par sa pâte transparente la délicatesse de leur lumière. On lui doit ainsi des vues de Londres, d’Oxford, de Cambridge, de Windsor, etc., réparties dans les collections britanniques.

Canaletto a aussi pratiqué le « capriccio », c’est-à-dire la représentation d’architectures composites ou imaginaires. Il est curieux de constater que c’est en produisant un tableau de ce genre, et non une vue réaliste, qu’il entra en 1763 à l’académie de peinture de sa ville natale.

On doit à Canaletto des dessins à la plume, très lumineux, qui ont servi d’études pour ses compositions peintes. Ses gravures originales à l’eau-forte, dont la plupart composent une suite de vues des environs de Venise commandée par John Smith, révèlent, mieux peut-être que les peintures, la sensibilité de l’artiste.

Son neveu, Bernardo Bellotto, dit aussi il Canaletto (Venise 1720 - Varsovie 1780), fut son élève. Mais il ne tarda pas à prendre ses distances, comme le montrent déjà ses vues de l’Italie du Nord. C’est loin de sa patrie, dans les cours d’Europe centrale, qu’il devait donner toute sa mesure. De 1747 à sa mort, il travailla successivement à Dresde, à Vienne, à Munich, enfin et surtout à Varsovie, où l’avait appelé le roi de Pologne. Dans les vues, généralement de grand format, qu’il peignit de ces villes, l’exigence d’exactitude est aussi poussée que chez Canaletto, et les magnifiques ordonnances de l’architecture baroque sont rendues, comme les foules qui les animent, avec un luxe de détails qui concourt à l’illusion de la réalité. L’aspect vitrifié de sa pâte est propre à Bellotto, de même que sa lumière froide, qui évoque à merveille celle de l’Europe centrale.

B. de M.

 V. Moschini, Canaletto (Milan, 1954). / C. Brandi, Canaletto (Milan, 1960). / A. Paolucci, Canaletto (Florence, 1969 ; trad. fr., Arts et Métiers graphiques, 1970).

canalisation

Moyen de rendre navigable un cours d’eau naturel en créant, dans le lit mineur, des biefs successifs profonds et tranquilles, séparés par des barrages auxquels sont accolées des écluses, ou sas, permettant aux bateaux de passer d’un bief à l’autre, donc de descendre vers l’aval ou de remonter vers l’amont en changeant de niveau à chaque éclusée.
La canalisation n’est pas la seule méthode permettant de rendre navigable un cours d’eau naturel ; un autre moyen, très moderne (utilisé, par exemple, pour le Rhône actuellement), consiste à créer non pas des biefs dans le lit mineur du fleuve ou de la rivière, mais des dérivations latérales à plus faible pente, séparées par des barrages capables de fournir de l’énergie électrique. Enfin, un autre moyen, moins onéreux et qui a été longtemps le seul, consiste dans l’aménagement rationnel du lit.



Aménagement d’un cours d’eau naturel en voie navigable


Régime et débit d’un cours d’eau

Le régime est caractérisé par l’ensemble des facteurs qui influencent le débit du cours d’eau : superficie du bassin versant, délimité par la ligne des crêtes, ou ligne de partage des eaux ; perméabilité du sol ; étendue des espaces boisés ; versants plus ou moins dénudés ; importance des pentes vers la vallée ; apport d’eaux par chutes de pluies et de neige. Suivant les particularités de ces diverses données et suivant les variations climatiques plus ou moins tranchées, le régime est torrentiel (Yonne, rivières des Cévennes) ou tranquille (Seine).

Le débit se représente graphiquement suivant deux modes.

Courbe des débits mensuels et annuels. Pour chaque mois de l’année, porté en abscisse, on porte en ordonnée le débit correspondant Q en mètres cubes. La courbe ainsi délimitée représente, par sa surface, le débit annuel, et elle caractérise, par son allure, le régime (torrentiel ou tranquille).

Courbe des débits classés. Chaque ordonnée représente un débit déterminé, et l’abscisse correspondante a pour valeur le nombre de jours pendant lesquels ce débit a été dépassé durant les 365 jours de l’année : on a ainsi la valeur de la fréquence d’un débit quelconque compris entre le débit de crue maximal et le débit d’étiage minimal ; en particulier, le débit caractéristique moyen est celui qui est dépassé pendant autant de jours que le nombre de jours durant lesquels il n’est pas atteint : c’est l’ordonnée de la courbe ayant pour abscisse la valeur 183. Le débit Q a pour valeur le produit S × V, S étant la superficie d’une section quelconque et V la vitesse moyenne de l’eau dans cette section. La section se mesure en notant les diverses profondeurs et leur emplacement le long d’une ligne transversale au cours d’eau ; la vitesse moyenne se déduit des courbes d’égale vitesse dans la section considérée. Cette mesure est faite au moulinet hydraulique, appareil muni d’une hélice compte-tours, la vitesse V étant reliée au nombre de tours n dans un temps donné par la formule : V = a + bn (a et b étant des constantes de l’appareil). Parmi les étiages et les plus hautes eaux, dont la connaissance est indispensable pour une étude d’aménagement et de navigabilité ainsi que pour la détermination du mouillage et des hauteurs libres sous ouvrages de franchissement, on distingue l’étiage annuel, l’étiage moyen, l’étiage minimal ou étiage absolu, les plus hautes eaux connues (P. H. E.) et les plus hautes eaux navigables (P. H. E. N.).