Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

byzantin (Empire) (suite)

Le xiiie siècle

La prise de Byzance par les croisés (1204) a pour conséquence une décentralisation politique et littéraire.

Dans l’État de Nicée, la tradition philosophique se poursuit avec Nicéphore Blemmydès (1197-1272), conciliateur de Platon et d’Aristote, moraliste et éducateur. Deux de ses disciples sont des humanistes historiens et philosophes : Georges Acropolite (1217-1282) et Théodore II Lascaris (1222-1258).

À l’époque des croisades appartiennent les romans en vers de caractère chevaleresque (Belthandros et Chrysantza, Callimaque et Chrysorrhoé), qui complètent la production érudite.

À Trébizonde se crée au xiiie s. un centre culturel, au milieu des activités pratiques et commerciales de cette province. Mistra, dans le Péloponnèse, est un centre d’humanisme. En Épire, l’orthodoxie antilatine est défendue par Alexis Apokaukos († 1345), Bardanès, Chomatène. Néanmoins, certains théologiens tentent un rapprochement avec le christianisme romain, d’où deux conceptions qui partagent la pensée hellénique.


Fin du xiiie siècle - xve siècle

La reprise de Byzance aux croisés, les efforts des Paléologues n’empêchent pas l’Empire de s’acheminer vers sa ruine (1453). La littérature, pourtant, demeure riche et atteste la diversité des courants de pensée qui, depuis longtemps, s’opposent.

Une renaissance littéraire est préparée par deux grands esprits, érudits historiens et philosophes : Georges Pachymère (v. 1242 - v. 1310), hostile aux Latins, et Maximos Planude (v. 1260 - 1310), favorable à un rapprochement entre la pensée occidentale et celle de l’Orient. Cette opposition se poursuit au xive s. chez les disciples de ces penseurs, Théodore Métochite (1260-1332), quasi nationaliste, et Mélitèniotis, universaliste.

La crise religieuse de l’hésychasme vient diviser encore la pensée théologique : Grégoire Palamas (v. 1296 -1359), dans ses Oraisons, et Cavasilas préconisent le mysticisme pur, que combattent Barlaam et Démétrios Cydonès (v. 1324 - v. 1400).

L’hostilité aux Latins s’exprime chez Georges Gémiste Pléthon (v. 1355 - v. 1450), tandis que le rapprochement est tenté par Gennadios (Georges Scholarios, v. 1405 - apr. 1472) et Jean Bessarion (v. 1402 - v. 1472).

L’histoire compte de grands écrivains : Jean VI Cantacuzène (Mémoires), Calliste Xanthopoulos († v. 1335) [Histoire de l’Église]. Jean Cananos (ou Kananos) et Jean Anagnotès décrivent les sièges de Constantinople en 1422 et de Thessalonique en 1430. L’Histoire de Romanie, de Nicéphore Grégoras (1296-1360), traduit la détresse de l’Empire. Doukas décrit la fin de l’Empire jusqu’en 1462, et Georges Phrantzês (1401-1478), après 1453, se lamente sur la chute de Byzance.

Les contacts entre Byzance et l’Occident ont favorisé les œuvres d’imagination et d’épopée : la Chronique de Morée tient de l’histoire et montre l’interpénétration de deux cultures. Ce caractère se retrouve dans le roman de Lybistros et Rhodamné. Mais les chansons populaires contemporaines vont répandre et vulgariser les thèmes de la production savante, et préparer l’avènement du lyrisme dans la poésie nationale quelques siècles plus tard.

La littérature byzantine ne disparaît pas avec Byzance. Son héritage sera recueilli et préservera l’hellénisme sous la domination ottomane, en attendant l’indépendance. Elle reste indispensable à la connaissance du monde grec, dont elle constitue un élément original, ainsi qu’aux rapports de l’hellénisme avec l’Occident et l’Orient.

A. M.

➙ Chrétiennes (littératures).

 K. Krumbacher, Geschichte der byzantinischen Literatur (Munich, 1891 ; nouv. éd., 1897). / A. Heisenberg, Aus der Geschichte und Literatur der Palaiologenzeit (Munich, 1920). / V. Cottas, le Théâtre à Byzance (Geuthner, 1931). / S. Impellizeri, Il Digenis Akritas, l’Epopea di Bisanzio (Florence, 1940). / E. Bréhier et B. Tatakis, la Philosophie byzantine (P. U. F., 1949).


La musique byzantine


La musique profane et instrumentale à Byzance

Héritière de la civilisation gréco-romaine, Byzance nous a transmis des traités sur la musique grecque antique. En revanche, elle nous a légué fort peu de chose de sa musique profane. Celle-ci, à la différence de la musique sacrée, comportait des instruments : syrinx, aulos, cithare, orgue. Alors que l’on dispose du témoignage indirect de quelques monuments figurés et d’un certain nombre de textes littéraires byzantins, arabes, latins, etc., aucune partition d’orgue, aucune musique profane n’a été découverte. Absence de recherche méthodique ? Ou bien l’enseignement de la musique profane à Constantinople était-il exclusivement oral ? Il se peut que l’étude critique du folklore néo-grec donne quelque lumière sur la musique profane de l’époque byzantine.


La musique sacrée

Jusqu’au iiie s., le grec était la langue de l’Église dans tout l’Empire romain, sauf en Afrique. C’est aussi celle de la musique sacrée byzantine, qui emprunte les modèles de sa poésie aux Syriens (saint Ephrem, Rōmanos le Mélode, etc.) et le chant des textes scripturaires au judéo-christianisme. Cette musique comporte deux notations très différentes : celle des livres de chant, en neumes diastématiques ; celle des livres scripturaires, dite « ekphonétique » par les modernes.

La notation diastématique repose sur un ensemble de huit modes, appelé oktoïchos. Elle est affectée au chant de poésies composées par des mélodes. Celles-ci sont contenues dans les livres suivants : a) le sticherarion, ainsi nommé parce que ses tropaires monostrophiques s’entremêlent aux versets (stichi) des psaumes. Chaque stique est idiomèle, c’est-à-dire qu’il a sa mélodie propre. Ce livre nous est parvenu en de nombreux exemplaires ; b) l’hirmologion, qui contient des tropaires caractérisés par une strophe modèle hirmos ; c’est un ancien tropaire auquel on a emprunté son rythme et sa mélodie. Dans l’hirmologion, les tropaires, groupés par huit ou neuf selon la période liturgique, sont toujours classés dans l’ordre de l’oktoïchos. Les hirmologia présentent d’importantes différences d’un manuscrit à l’autre. Ils nous sont parvenus en petit nombre ; c) le kontakion, qui est un recueil d’homélies poétiques. Celles-ci sont constituées par une suite de strophes (oiki) bâties sur un hirmos et munies d’un refrain. Un proïmion (ou kontakion), qui a une autre mélodie, les précède. Ce recueil n’est pas toujours noté. Les transcriptions sont parties de la notation médiobyzantine (1100-1450), qui devient de plus en plus précise après 1175. Elle a pu être déchiffrée grâce aux traités contemporains de musique, qui ont fourni à la fois le nom et la valeur des signes. La notation paléobyzantine (950-1200), moins complète, est difficile à transcrire, une part trop importante étant laissée à la transmission orale. Cette notation a été éclairée par les travaux des slavisants (M. Velimirović, C. Floros, R. Jakobson, etc.). Inversement, la notation néo-byzantine (1400-1821) a introduit trop de signes — notamment les « grandes hypostases » —, dont on a perdu la clef.