Bonington (Richard Parkes) (suite)
La même année, Bonington arrive à Paris, où il va faire carrière. Il fréquente quelque temps l’atelier de Gros*. Il prend contact avec de jeunes artistes, Paul Huet, Eugène Isabey, Delacroix*, qui admire la précocité de ses dons et lui porte dès lors une fidèle amitié. Étudiant les collections du Louvre, il préfère les écoles du Nord. Il copie à l’aquarelle des œuvres de Jordaens, Rubens, Ruysdael, Philippe de Champaigne...
En 1821, Bonington parcourt la Normandie et le nord de la France, qui étaient alors le pôle d’attraction du romantisme* franco-anglais ; en 1823, il se rend en Belgique. De ses voyages, il rapporte de nombreuses études à l’aquarelle, qui lui servent de modèles pour des lithographies. En effet, il collabore au grand recueil des Voyages pittoresques et romantiques dans l’Ancienne France, dirigé depuis 1820 par Charles Nodier, le baron Taylor et Alphonse de Cailleux ; en 1824, il publie une suite lithographique des Restes et fragments d’architecture du Moyen Âge.
Bonington assume tout l’idéal de l’époque romantique : ses aquarelles des Bords de Seine à Rouen (Manchester, Whitworth Art Gallery), ses Vues de l’Église Saint-Vulfran d’Abbeville (Paris, B. N.), du Mont Saint-Michel (musée de Calais), du Pont Notre-Dame à Paris sont l’expression d’un sentiment naturaliste nouveau. Les conquêtes de la peinture en plein air, la vitesse d’exécution, le triomphe de la couleur pure sur la forme dessinée, alliés à une justesse des détails digne des Flamands, s’imposent également dans ses peintures à l’huile : ses Marines (Louvre, musée de Besançon), la vue du Parterre d’eau de Versailles (Louvre) ou le Transept de l’église Saint-Bertin à Saint-Omer (Nottingham Castle Museum).
En 1825, Bonington se rend à Londres avec Delacroix. Quelques mois après, celui-ci lui ouvre son atelier lors de leur retour à Paris. C’est alors que les deux artistes exercèrent l’un sur l’autre l’influence la plus vive, Bonington peignant des sujets orientalistes, le Chibouk (Dublin, National Gallery), l’Odalisque au palmier (1827, Louvre).
En 1826-27, Bonington accomplit un nouveau voyage, en Italie cette fois et surtout à Venise, qui fut une véritable révélation pour le génie de coloriste du peintre. L’aquarelle du Colleone (Louvre), le tableau intitulé l’Espace (musée de Reims), les toiles du Quai des Esclavons (Louvre), du Palais des Doges (Londres, Tate Gallery), de la Vue de l’Adriatique (Louvre) fixent les éléments atmosphériques les plus diffus, annonçant l’impressionnisme.
Lorsque Bonington rentre à Paris, en 1827, il est déjà très atteint par la tuberculose. Il expose au Salon parisien ainsi qu’à la Royal Academy de Londres, puis à la British Institution en 1828. Ces deux dernières années sont consacrées à la peinture d’histoire dans le goût de Walter Scott, de Goethe ou d’Alexandre Dumas : Anne d’Autriche et Mazarin (Louvre), François Ier et la duchesse d’Étampes (Londres, Wallace Collection).
À partir de 1830, l’art de Bonington sera l’objet de nombreuses imitations, et le terme de « boningtonisme » désignera un nouveau type de paysage romantique inspiré par l’artiste prématurément disparu.
P. H. P.
A. Shirley, Bonington (Londres, 1941). / Catalogue d’exposition : Bonington, musée Jacquemart-André, Paris (1966).