Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

aériens (transports) (suite)

Cette période a vu l’aviation commerciale se développer d’une manière régulière. Dès ce moment se dessinent certains des traits qui vont la caractériser désormais. L’avion ne peut faire concurrence aux moyens de transports au sol qu’au-delà d’une certaine distance (au moins 200 km), car les aérodromes sont situés à la périphérie des grandes agglomérations, si bien que le gain de temps effectif sur un trajet est en partie contrebalancé par les délais d’accès aux terrains. La part qui revient aux transports aériens à l’intérieur des nations diffère selon leur dimension et leur état de développement. L’avion s’impose partout où la médiocrité des équipements au sol interdit les relations rapides, c’est-à-dire dans la plupart des pays sous-développés. Il joue aussi un grand rôle dans les pays avancés de forme allongée (Grande-Bretagne, Italie) ou dans ceux dont les dimensions sont continentales (États-Unis, Canada, Australie, U. R. S. S.). Dans ces cas, les transports aériens font une concurrence efficace à la route et au chemin de fer pour l’acheminement des voyageurs sur de longues distances.

C’est pourtant dans le domaine des relations internationales que l’augmentation du trafic est le plus spectaculaire : les distances sont importantes et les relations se font généralement entre centres très peuplés. Les personnes qui se déplacent le plus sont des fonctionnaires, des hommes d’affaires dont les activités se déroulent dans le cadre des capitales ou des grandes agglomérations : cela est favorable à l’implantation de lignes régulières. Jusqu’en 1950, les liaisons transocéaniques demeurent, pour l’essentiel, assurées par les compagnies de navigation maritimes. La situation se renverse dans les années qui suivent : la ligne de l’Atlantique Nord, celle qui voit passer le plus grand nombre de personnes, devient de plus en plus une ligne aérienne.

Les transports de marchandises se développent parallèlement à ceux de voyageurs. Leur importance est cependant bien moindre. Cela tient évidemment aux prix très élevés. Seules des marchandises périssables, pressées ou chères peuvent en supporter le poids. Le courrier représente l’élément le plus sûr et le plus intéressant, par sa régularité, de ce trafic. Mais le transport aérien est le seul à pouvoir satisfaire certaines catégories de besoins : acheminement à longue distance de denrées alimentaires fragiles ou déblocage de régions marginales du monde habité. Certaines régions montagneuses du monde tropical, en Nouvelle-Guinée par exemple, ne sont reliées au reste du monde que par des lignes aériennes, grâce auxquelles se font tous les échanges. Sur les itinéraires bien desservis par des liaisons rapides terrestres ou maritimes, une spécialisation d’un autre ordre se dessine. Les fabricants de matériel d’équipement ou de produits de consommation durable découvrent que l’utilisation de l’avion pour le transport de pièces peu pondéreuses est avantageux : ils peuvent ainsi réduire au minimum les stocks de pièces de rechange qu’ils entretiennent normalement pour satisfaire les besoins urgents des clients. Le haut prix du transport est contrebalancé, ici, par la diminution des immobilisations.

Le développement rapide des transports aériens de marchandises et de passagers crée de multiples problèmes : tout un droit aérien* est à définir ; les pratiques de l’assurance doivent se stabiliser ; les responsabilités des diverses parties doivent être clairement précisées. C’est à ces tâches multiples que s’est attelée l’Organisation de l’aviation civile internationale (O. A. C. I.).

L’accroissement des trafics s’accompagne parfois d’un climat de concurrence et de luttes tarifaires : ce fut le cas pour les chemins de fer dans les années 1860 ou 1870, pour la route entre les deux guerres mondiales. Pour le transport aérien, il en va tout autrement au cours des quinze premières années de l’après-guerre : comme pour les lignes maritimes régulières, les tarifs sont fixés dans le cadre de conférences entre compagnies ; les brutales fluctuations qui apparaissent sur les marchés libres de fret sont absentes.

L’Organisation de l’aviation civile internationale a certainement facilité l’élaboration de ces accords de tarif. Mais ceux-ci résultent de causes plus générales. Les transports aériens sont dominés au cours de cette période par un petit nombre de compagnies. En dehors des États-Unis, il n’existe pas de pays assez vaste et assez peuplé pour que se crée un grand marché intérieur concurrentiel. Au niveau international, la compétition se trouve limitée, puisque, sur un itinéraire donné, le nombre des participants est généralement faible : il est fixé à la suite d’accords de réciprocité entre nations. Les compagnies de deux pays qui exploitent conjointement les mêmes itinéraires n’ont guère intérêt à lutter entre elles. Aussi les tarifs sont-ils fixés à la suite de négociations. L’équilibre du marché n’est cependant pas parfait, par suite de l’importance des deux grandes compagnies internationales américaines, TWA et Pan Am ; celles-ci assurent à elles seules un nombre de liaisons sensiblement égal à celui de l’ensemble des compagnies européennes. Le fonctionnement du système dépend de la bonne volonté des grandes sociétés américaines.

Il est d’autres modes de fixation des tarifs. Ils ne valent que pour les liaisons à la demande, fréquentes alors dans le domaine des transports de marchandises sur les lignes des pays sous-développés. On voit se créer un marché concurrentiel libre des frets, qui rappelle celui du transport maritime et se tient avec lui au « Baltic » (Baltic Mercantile and Shipping Exchange) de Londres par exemple.


Une ère de mutations et de bouleversements

Depuis une quinzaine d’années, les mutations se sont multipliées, si bien qu’est en train de se dessiner une organisation des transports aériens très différente de celle qui s’était définie dans l’immédiat après-guerre. Les transformations ont été plutôt subies que voulues par la plupart des sociétés régulières, qui se sont rendu compte que l’accélération du progrès risquait de les soumettre à des charges redoutables. Mais ces sociétés n’ont pu faire autrement que de se lancer dans l’aventure, de crainte, en ne se modernisant pas, de perdre leur clientèle.