Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bengale (suite)

Le Bangladesh, avec ses 65 millions d’habitants et ses 143 000 km2, englobe la plus grande partie de l’ancien Bengale. L’État de l’Union indienne connu sous le nom de Bengale-Occidental n’a que 88 000 km2 ; mais, comme il contient l’énorme agglomération de Calcutta, sa population s’élève à 44,4 millions d’habitants. Des problèmes politiques graves se sont posés récemment dans la région. Du côté indien, des mouvements extrémistes sont puissants tant dans les campagnes qu’à Calcutta. Mais, surtout, les Bengalis se sont plaints d’être traités en parents pauvres à l’intérieur du Pākistān et un très fort mouvement en faveur de l’autonomie a abouti, grâce à l’intervention de l’armée indienne à la fin de 1971, à la constitution d’un État indépendant, le Bangladesh.


Géographie physique du delta

Le delta du Gange et du Brahmapoutre constitue de très loin l’essentiel de la région. C’est une immense plaine basse, apparemment monotone. Mais entre les surfaces alluviales qui le composent, il existe des différences d’altitude et de composition qui, si faibles qu’elles puissent paraître, n’en offrent pas moins une grande signification du point de vue de l’utilisation du sol. Quatre caractères du milieu doivent être soulignés.

• L’énormité des masses d’eau évacuées. Le Brahmapoutre apporte les masses d’eau les plus importantes, puisque son débit est de 3 200 m3/s en basses eaux, et de 70 000 m3/s en crue ; le Gange est à peine moins impressionnant, avec 3 200 m3/s en étiage et 56 000 m3/s en période de crue. Il y a aussi des cours d’eau locaux, dont le plus abondant est la Meghna avec un débit maximal de 13 000 m3/s environ ; la Dāmodar, qui vient de la péninsule, est beaucoup moins importante. De plus, la tranche d’eau qui tombe sur le delta est de quelque 1 800 mm par an en moyenne, ce qui vient encore ajouter des masses d’eau considérables, qui s’évacuent difficilement. Pendant la saison des pluies, le delta est une zone d’inondation très étendue, d’où n’émergent souvent que quelques surfaces plus hautes et les levées alluviales qui suivent les rivières. L’aménagement d’un réseau de communications terrestres a été très difficile.

• L’instabilité des cours d’eau et le glissement vers l’est. Il n’est pas étonnant dans ces conditions que les cours d’eau ne retrouvent pas toujours leur ancien lit à la fin de la crue : les changements de direction et les défluviations sont fréquents. Ainsi, le « vieux Brahmapoutre » a été presque totalement abandonné, et le fleuve va maintenant mêler ses eaux à celles du Gange par un tronçon où il est connu sous le nom de Yamunā. Mais le fait le plus lourd de conséquences est que les défluents du Gange, qui allaient rejoindre la baie du Bengale dans sa partie occidentale, tendent à être obstrués par les alluvions et abandonnés ; les embouchures principales se déplacent de l’ouest vers l’est. Il en résulte une gêne considérable pour le port de Calcutta, situé sur l’un de ces défluents en cours d’abandon, la Bhāgīrathi-Hooghly. Surtout, la partie occidentale du delta est maintenant « morte », ce qui a deux conséquences graves : un grand nombre de chenaux abandonnés s’emplissent d’eaux stagnantes pendant la saison des pluies, et ont longtemps favorisé la malaria ; les sols ne sont plus renouvelés par les apports de matériaux frais durant les crues, et leur fertilité diminue rapidement.

• L’existence de surfaces étagées. Le delta s’est enfoncé et déplacé progressivement vers l’est, si bien qu’il existe actuellement un système de surfaces étagées. Les plus hautes sont d’anciennes plates-formes alluviales maintenant perchées à quelques dizaines de mètres au-dessus des lits fluviaux. Les sols, non renouvelés depuis de longues années, ont subi l’influence du climat tropical humide, et sont devenus des sols rouges appauvris très médiocres. Plus bas, les plates-formes alluviales du delta mort commencent à subir la même évolution. Enfin, au niveau des fleuves actuels, les sols sont meilleurs, les apports d’eau permettent une riziculture active, mais l’inondation est une menace constante. Il existe d’ailleurs en contrebas de certaines levées alluviales, notamment près des confluents, des secteurs déprimés qui ne sont guère à découvert qu’en pleine saison sèche.

• L’humidité du climat. L’ensemble du delta a un climat de mousson à très longue saison des pluies. Il y a cependant des nuances dans la pluviosité, puisque les quantités précipitées totales diminuent du nord-est à l’ouest et au sud-ouest. Mais les parties les moins favorisées reçoivent tout de même plus de 1 200 mm dans l’année, contre près de 2 000 pour les plus arrosées.


Les types de régions

Schématiquement, le delta peut être vu comme une mer de rizières, qui ont fait vivre depuis fort longtemps des masses d’hommes très importantes. Cependant, le milieu physique impose des distinctions notables entre les types de riziculture pratiqués et leur efficacité globale. De plus, les cultures commerciales qui sont depuis longtemps ajoutées à la riziculture sont plus ou moins développées selon les lieux. Cette relative diversité explique les variations de la densité de la population. Enfin, la division du Bengale entre l’Inde et le Pākistān (Bengale oriental) a introduit une ligne de clivage fondamentale.

Les calendriers de la riziculture

La technique de la riziculture varie selon la profondeur de la submersion.

Le riz « aman » est cultivé dans les régions moyennes, couvertes en saison des pluies d’une épaisseur d’eau modérée, et qui restent humides jusqu’en automne. Les pépinières sont établies en mai, le repiquage a lieu en juin-juillet, la récolte en novembre-décembre. Dans ce cycle, on peut donc cultiver des variétés à cycle long, dont le grain est de bonne qualité et le rendement élevé.

Le riz « aus » est cultivé sur les régions hautes, au-dessus du niveau de la crue. L’alimentation en eau n’est donc assurée que par les pluies ; elle est plus incertaine et plus courte. Les semailles sont faites en juin, la récolte dès septembre. Les variétés à cycle court que l’on emploie donnent des grains moins prisés et des rendements plus faibles.

Le riz « boro » permet d’utiliser les parties du delta qui sont en contrebas des rivières, et qui sont submergées en été sous une épaisseur d’eau telle qu’il est impossible de les utiliser. Par contre, ces creux conservent assez d’humidité en hiver pour qu’on puisse y semer le riz en décembre et le récolter en mai.