Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

adulte (suite)

Critère de maturité sexuelle

La possibilité de se reproduire peut aussi être considérée comme inhérente à l’état adulte. Il est communément admis qu’un arbre est adulte lorsqu’il a atteint sa maturité sexuelle, car, dans ce cas, le critère « croissance » ne peut être utilisé. C’est le plus souvent à la faculté d’engendrer la vie que l’on reconnaît qu’un être vivant est adulte. Toutefois, il ne faut pas se leurrer sur la valeur réelle de cette définition ; il existe en effet des exceptions relativement nombreuses. Il y a des sexués néoténiques comme l’Axolotl (larve de l’Amblystome, Amphibien urodèle) qui se reproduisent à l’état larvaire. On retrouve des exemples semblables chez les Termites. À l’inverse, il existe des adultes aux organes génitaux atrophiés ou tout au moins non fonctionnels, par exemple les « ouvrières » des sociétés d’Abeilles.


Critère de maturité psychique

Le cas de l’Homme est certainement le plus difficile à définir. En effet, maturité sexuelle et fin de la croissance sont souvent très éloignées dans le temps. De surcroît, à ces deux critères vient s’ajouter celui du développement psychique. Il est lié au développement du système nerveux, dont on admet de plus en plus qu’il est très lent et peut se poursuivre très tard dans la vie de l’Homme. Ce développement n’est pas dû à une multiplication des neurones, dont le nombre est fixé dès le stade embryonnaire, mais à l’utilisation de la malléabilité de certaines parties du système nerveux comme le cerveau ; cette utilisation est, bien sûr, fonction de l’éducation.

J. Ph.

➙ Adolescence / Amphibiens / Anoures / Arthropodes / Biologie / Croissance / Développement / Insecte / Larve / Métabolisme / Métamorphose / Puberté / Sénescence.

 J. Rostand, l’Homme (Gallimard, 1941). / J. Rostand et A. Tétry, la Vie (Larousse, 1962) ; l’Homme (Larousse, 1972 ; 2 vol.).

Ady (Endre)

Poète hongrois (Érmindszent 1877 - Budapest 1919).


Ady mérite d’être considéré comme l’un des poètes majeurs de l’Europe moderne. Son œuvre, immense et insolite, est toutefois trop intimement solidaire de la langue pour supporter sans dommages l’épreuve de la traduction. Comment, dès lors, en faire sentir la prodigieuse originalité ?

Les parents d’Endre Ady appartiennent à la noblesse pauvre des campagnes. Ils sont calvinistes, et c’est peut-être d’eux que leur fils hérite cette prédilection pour l’Ancien Testament, qui, surtout dans les dernières années de sa vie, marquera si profondément sa poésie religieuse. Après des études de droit, Ady devient journaliste à Nagyvárad, où il se fait connaître par des vers et des pamphlets. C’est là que le « baiser fatal » d’une amie éphémère lui vaut le mal qui le détruira lentement. C’est là qu’il rencontre le grand amour de sa vie, Léda, qu’il ne tarde pas à rejoindre à Paris.

Ce que furent réellement ces « noces d’éperviers », c’est surtout à travers le miroir sans doute déformant de la poésie d’Ady que nous le devinons. Passionnée, tyrannique, rendue scandaleuse aux yeux du monde par la complaisance apparente du mari, cette liaison devient peu à peu une servitude à laquelle le poète ne s’arrachera que huit ans plus tard, lorsqu’il rentrera définitivement en Hongrie. Cette rupture, il la commentera dans des vers d’une beauté étrange et dont la cruauté méprisante porte, jusque dans sa grandiloquence et sa puérilité, la marque d’une noblesse émouvante, comme le coup de griffe d’un animal blessé. À Léda revient pourtant le mérite d’avoir arraché Ady à la médiocrité provinciale, de l’avoir initié, fût-ce superficiellement, à la poésie de Baudelaire et de Verlaine, de l’avoir guidé et soigné avec un dévouement quasi maternel. C’est à Paris, auprès d’elle, qu’Ady devient lui-même. Cet amour illumine ses premiers grands recueils : Poèmes neufs (1906), Sang et or (1907), Sur le char d’Elie (1909). Ceux-ci répercutent l’écho d’une obsession charnelle qui, souvent transfigurée par un pétrarquisme inattendu, trouve dans la luxuriance baroque des images son expression la plus adéquate :
Nous émigrons, nous partons pour l’automne,
Nous pourchassant. Nos cris aigus résonnent.
Deux éperviers aux ramages pesants.
Des détrousseurs de l’été c’est l’attaque.
D’autres autours les jeunes ailes claquent
Dans un combat de baisers et de sang.
Quittant l’été, volant, fuyant le gîte,
Bientôt l’automne arrêtera nos fuites.
Nous hérissant d’un amour bien plus fort.
C’est là pour nous les plus ultimes noces
Nous déchirant les chairs dans cet automne
Pour retomber parmi ses feuilles d’or.
(Adaptation de Robert Sabatier.)

À partir de 1908, Ady devient l’inspirateur de la revue Nyugat « Occident » et le chef de file de la poésie nouvelle. Plus que jamais il identifie son destin à celui de sa patrie qu’il sent obscurément menacée. Socialiste sans doctrine, il exalte dans ses vers le glorieux exemple des jacqueries paysannes et la résistance des Kuruc. L’angoisse que lui inspire l’avenir de la nation hongroise ne l’entraîne jamais dans un chauvinisme étroit. Comme bientôt en Russie Maïakovski, mais avec une violence que « la vie qui fuit » rend dès cette époque plus pathétique, il proclame l’imminence de la révolution.

L’abus des boissons et des soporifiques ne fait qu’aggraver son mal. L’idée du suicide le tente. Plusieurs fois il se laisse emmener dans des maisons de santé, qu’il quitte avant que la cure ne soit terminée. Peu avant la guerre il se marie. Mais il est déjà trop tard. La guerre, dont il avait senti l’incendie s’allumer au cours d’une Étrange Nuit d’été — c’est le titre du poème célèbre dicté par cette illumination —, a commencé à détruire le monde ancien. L’Apocalypse, dont il s’est fait le prophète, est à la fois en lui et autour de lui. Dans un dernier recueil au titre significatif, En tête des morts, il se révolte contre Dieu, l’implore et le nie tour à tour. Quand il meurt, Budapest est déjà en pleine fièvre révolutionnaire.