Ch.-l. du départ. de la Haute-Corse, sur la côte nord-est de l’île ; 52 000 hab. (Bastiais).
Fondée en 1383 par Leonello Lomellini, qui faisait partie de la Maona, groupe financier génois, Bastia occupait initialement un promontoire fortifié qui domine l’anse, où s’étend de nos jours encore le vieux port. Le gouverneur de la Corse, désigné à Gênes, résidait le plus souvent à Bastia, seule ville corse dotée d’un podestat. Dès le début du xve s., la ville devient la tête de pont de la pénétration génoise dans le nord et l’est de l’île. Proche de la péninsule italienne, elle est le poste le mieux placé pour contrôler la vallée du Golo, suivie par la seule voie ouvrant un passage vers l’intérieur pour surveiller la Castagniccia, qui rassemble les plus fortes communautés rurales de l’île, et pour éviter les troubles dans le cap Corse, qui produit du vin, régulièrement exporté vers la péninsule italienne. Aux xve et xvie s., elle apparaît ainsi comme une pièce maîtresse des constructions politiques et des campagnes militaires qui scellent le destin de l’île. Lorsque Vincentello d’Istria, lieutenant du roi d’Aragon en Corse, tente de reprendre la Corse à la république de Gênes, il assure ses positions en conquérant Bastia ; mais il doit s’enfuir de Corse dès qu’il abandonne la ville. En 1418, la victoire de Biguglia ouvre de nouveau Bastia à Vincentello d’Istria ; peu après, celui-ci réussit à soustraire l’île entière, sauf Bonifacio, aux Génois. De même, lors de la première intervention française en Corse, les troupes du maréchal de Termes débarquent en 1554 à l’Arinella, immédiatement au sud de la forteresse bastiaise, mais la perte de Bastia, avec celle de Calvi, marque ensuite l’échec de l’expédition française. Au xviiie s., lors de la grande révolte contre Gênes, les Corses attaquent Bastia en 1730, prennent le fort de Monserrato, sans réussir à expulser les Génois ; mais, en novembre 1745, après le bombardement de la forteresse par une flotte anglaise guidée par le capitaine Rivarola, qui représente le roi de Sardaigne, la ville est conquise par les Corses venus des montagnes, qui l’occupent jusqu’en septembre 1747. Elle perd son rôle prééminent lorsque Ajaccio est désignée comme chef-lieu de la Corse, après la fusion des départements du Golo et du Liamone, qui avaient accentué la bipolarisation urbaine de la Corse.
Néanmoins, Bastia est toujours restée le principal centre économique de l’île. Son influence s’exerce vers l’ouest, en Balagne, et pénètre vers l’intérieur au-delà de Corte, jusqu’à l’approche du col de Vizzavona. De plus, depuis une décennie, la ville bénéficie de la mise en valeur accélérée de la plaine orientale, qui se consacre à l’arboriculture fruitière et surtout à la viticulture de masse ; elle est devenue un centre de services pour la plaine jusqu’au-delà de Ghisonaccia. Cette activité s’exprime par la croissance de nouveaux quartiers et par l’insertion de communes voisines dans l’agglomération urbaine, malgré les servitudes imposées par l’exiguïté des espaces plans et par la proximité immédiate de la montagne, qui s’élève à près de 1 000 m. Dans cet ensemble urbain élargi, la Citadelle, aux rues étroites et tortueuses, où s’accumule une population à faible niveau de vie, et le vieux port sont des reliques en cours d’aménagement. La ville moderne s’est étendue sur un plan linéaire en direction du nord, autour de la place Saint-Nicolas, vers la gare et vers Toga. De nombreux Bastiais aisés s’étaient déjà installés à Pietranera et à Miomo entre les deux guerres mondiales. Cette vocation résidentielle s’affirme depuis une quinzaine d’années. Etouffant dans le carcan d’une topographie très accidentée et bloquée au nord par le rapprochement de la montagne et de la mer, la ville s’étend désormais vers les espaces libres de la plaine située au sud, en direction de Bassanese, de Lupino et de Montesoro, où s’est installée la Société pour la mise en valeur agricole de la Corse (SOMIVAC), et le long de la R. N. 193, où s’égrènent les entrepôts, les magasins à grande surface et les industries. Le versant de la montagne, occupé autrefois par le seul village de Cardo, commence à être colonisé en ordre lâche. Cette agglomération en expansion rapide est desservie par un port récemment réaménagé, qui manutentionne 500 000 tonnes de marchandises par an et reçoit 500 000 passagers en provenance de Nice, de Marseille, de Gênes et de Livourne, ainsi que par l’aéroport de Poretta, situé à 20 km au sud, qui accueille plus de 300 000 voyageurs par an. La croissance de Bastia rend indispensable l’adoption d’un plan de modernisation et d’équipement. L’amélioration de la circulation routière par l’aménagement à quatre voies de la R. N. 193 et par l’ouverture de nouvelles voies de dégagement, l’installation de zones industrielles jusqu’au Golo et la création d’un nouveau port à Ficajola sont en cours ou envisagées.
G. G.