Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

ballet (suite)

Les parties

adage, première partie d’un grand pas de deux. (Le danseur assume le rôle de porteur et soutient la danseuse, qui exécute une suite de pas valorisant ses qualités techniques et expressives.)

coda, dernière partie d’un pas de deux classique.

entrée, intervention d’un ou de plusieurs danseurs dans une action chorégraphique. Au xvie s., partie indépendante du ballet de cour, qui en comptait jusqu’à dix et même plus.

final, dernière partie d’un ballet, qui réunit tous les danseurs sur la scène.

grand pas de deux, pas traditionnel du ballet classique exécuté en général par le danseur et la danseuse étoiles, comprenant quatre parties : adage, variations du danseur et de la danseuse, coda.

livret ou argument, sujet d’un ballet.

pas, fragment d’un ballet interprété par un ou plusieurs danseurs (pas de trois, pas de quatre).

pas d’action, scène d’un ballet destinée à faire progresser l’action.

variation, enchaînement chorégraphique constituant les deuxième et troisième parties d’un grand pas de deux, destiné à mettre en valeur l’exécutant et n’ayant pas de rapport direct avec l’œuvre.

La troupe

compagnie de ballet, ou ballet, troupe fixe ou itinérante donnant des spectacles chorégraphiques.

corps de ballet, ensemble des danseurs d’un théâtre qui ne sont ni solistes ni étoiles. À l’Opéra de Paris, ensemble de tous les danseurs.

création, moment où une œuvre est réalisée pour la première fois sur la scène d’un théâtre, dans une ville, dans un pays. La création d’une œuvre inédite est donnée en première mondiale.

maître de ballet, technicien qui fait répéter les danseurs et qui assume la réalisation des œuvres dansées par le corps de ballet.

répertoire, ensemble des œuvres traditionnelles ou d’introduction récente inscrites au programme de la troupe.


Le ballet de cour de 1581 à 1672


De 1581 à la mort de Louis XIII

Le ballet de cour résulte de la fusion cohérente d’éléments divers : danse, peinture, poésie, musique, chant, déclamation. Sa construction « visuelle » repose sur trois parties : l’ouverture (exposition du sujet, avec interventions chantées ou parlées) ; les entrées (différentes parties d’une action plus ou moins précise, de nombre variable) ; le grand ballet (dernière entrée, ou final).

Le ballet de cour a rapidement ses théoriciens. Claude François Menestrier définit le ballet comme « une peinture, puisqu’il est une imitation », tandis que le poète Guillaume Colletet affirme que « la danse est une image vivante de nos actions et une expression artificielle de nos secrètes pensées ». Le P. Marin Mersenne (dans son Harmonie universelle) déclare que le ballet doit attirer l’harmonie du Ciel et l’établir sur la Terre. Tendant à une même fin, qui est l’imitation ou la représentation de la nature, la peinture et la poésie n’ont pas à leur disposition le mouvement, que possède le ballet. La danse est aussi le reflet du monde, de l’histoire, l’expression des aspirations philosophiques, politiques, morales et sociales de l’époque. Elle bénéficie pour s’exprimer d’une liberté que les autres arts n’ont pas. À l’écart des règles fixes que s’imposent la poésie et le théâtre, le ballet peut innover. Pour maîtriser cet éventail de possibilités, l’inventeur ou le compositeur de ballet, généralement poète, devrait posséder une vaste érudition. Le danseur, qui à son tour doit pouvoir tout exprimer, devrait pouvoir tout comprendre.

Le ballet de cour présente plusieurs aspects : ensemble composite, il satisfait le goût du merveilleux chez un public qui ne demande qu’à s’abandonner au rêve ; œuvre collective, il trouve une cohésion profonde et tend à assumer une véritable communication avec les spectateurs par l’intermédiaire des acteurs. Destiné à plaire au roi et à ses courtisans, le ballet de cour flatte le goût des « grands » tout en leur restant accessible sur le plan intellectuel. Bien des nobles, hommes et femmes, se piquent d’érudition ; l’allégorie, fort à la mode, est le véhicule idéal d’une pensée volontairement ambiguë. À travers elle, on dit bien des vérités ; une hiérarchisation s’instaure dans les degrés de difficulté de compréhension.

Le ballet de cour est pour le roi — ou pour celui qui en commande la réalisation — un instrument. Anne d’Autriche, Richelieu, Mazarin utilisent le ballet à des fins politiques et diplomatiques (Ballet de la prospérité des armes de France, 1641). Le ballet a une grande vogue, et de nombreux poètes y collaborent (Malherbe, Desportes, Baïf, Boisrobert, Guillaume Colletet, Desmarets de Saint-Sorlin, Mainard, Racan, Régnier, Rotrou).

Les partitions musicales, assez rares avant 1610, livrent un des noms les plus prestigieux de l’époque : celui de Pierre Guédron, surintendant de la musique du roi. Malgré la faveur croissante du ballet sous les règnes d’Henri IV, puis de Louis XIII, peu de mémorialistes (François de Bassompierre) en ont donné des descriptions. Aucun détail sur les costumes, la mise en scène, les décors ne nous est parvenu.

À partir de 1610 interviennent les premières machineries de Cosimo Ruggieri. Le genre « romanesque » (Délivrance de Renaud, 1617) s’impose grâce au duc de Luynes, de 1616 à 1621. Au genre burlesque des mascarades (les Fées de la forêt de Saint-Germain, 1625) succèdent des œuvres plus raffinées, reflet de l’idéal de l’honnête homme.


La Régence et le règne personnel de Louis XIV

À la mort de Louis XIII, le ballet de cour est une œuvre élaborée, évoluée et régie par des lois esthétiques qui en font un spectacle complet. Dans le même temps, les opéras romains et les grandes machines vénitiennes déploient leurs séductions. Anne d’Autriche et Mazarin font appel à des artistes italiens. Le décorateur Giacomo Torelli (1604 ou 1608-1678), surnommé « le Grand Sorcier », triomphe à Paris en réalisant de fabuleuses « machines » (La Finta Pazza, 1645). L’expressivité de l’Orfeo (1647) de Luigi Rossi ouvre les portes à la musique italienne. Mais l’opéra à l’italienne a très vite ses détracteurs. Les machines de Torelli engloutissent des sommes énormes à un moment où la situation financière du pays est fort grave. Durant la Fronde, on danse peu. Andromède de Corneille est créée au cours d’une accalmie (1650). Le 26 février 1651, le jeune Louis XIV danse en public pour la première fois (Ballet de Cassandre). Épris de danse et de décorum, il sera un brillant défenseur du ballet.