Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
Y

Yougoslavie (suite)

Lorsque A. Petrović remporte un succès international avec J’ai même rencontré des Tziganes heureux (Skupljači perja, 1967), le cinéma yougoslave est en pleine ascension et plusieurs cinéastes s’imposent dans les festivals internationaux. Aux noms précédemment cités, il conviendrait d’ajouter ceux de Fadil Hadžić (Protest, 1967), Vatroslav Mimica, qui s’aventure avec succès dans le long métrage de fiction (Prométhée de l’île de Viševica [Prometej sa otoka Viševice, 1965], Lundi ou mardi [Ponedeljak ili utorak, 1966], l’Événement [Dogadjaj, 1969]), Anno Domini 1573 (1975), Matjaž Klopčić (Sur les ailes en papier [Na papirnatim avionima, 1967], la Fête funéraire [Pozdravi mariju, 1969]), la Peur [Strah, 1974], Bato Čengić (les Enfants d’après [Mali vojnici, 1968], le Rôle de ma famille dans la révolution mondiale [Uloga moje porodice u Svetskoj revoluciji, 1971], Scènes de la vie d’un travailleur de choc [Slike iz života udarnika, 1972]), Krsto Papić (les Menottes [Lisice, 1971], Représentation d’« Hamlet » au village [Predstava « Hamleta » u selu mrduša donja, 1973]), Vladan Slijepčević, Ljubiša Kozomara, Gordan Mihić, Želimir Žilnik, Zvonimir Berković, Zdravko Velimirović, Bogdan Zizvić, Miroslav Jokić.

À partir des années 1972-73, la Yougoslavie joue néanmoins un rôle plus effacé sur le plan mondial. Aleksandar Petrović et Dušan Makavejev, après avoir eu certaines difficultés pour faire accepter leurs scénarios par les autorités de leur pays, ont amorcé une carrière internationale, mais de nombreux autres réalisateurs talentueux ne sont pas parvenus à rencontrer la large audience extranationale qu’ils méritent.

J.-L. P.


L’art


L’antiquité

Après la période illyrienne, qui débute au IIe millénaire av. J.-C. (oppidums et tumulus), l’actuelle Yougoslavie subit, à partir du ive s. av. J.-C., les influences grecque puis romaine. À l’inégalité de cette influence (faible dans la partie orientale du pays, forte dans la partie occidentale) correspondra la division de l’Empire effectuée en 395 : les pays situés à lest de la Drina appartiendront à l’empire d’Orient, ceux qui sont situés à l’ouest à l’empire d’Occident, ce qui conditionnera leur développement ultérieur. Les premières formes de la vie urbaine apparaissent à l’ouest, dans l’actuelle Croatie, aux ive-iiie s. av. J.-C., avec les colonies grecques de Salone (v. Split), d’Epidaure (Dubrovnik*), de Tragourion (Trogir). Après la conquête de l’Illyricum par Auguste apparaissent les cités de Jadera (Zadar), d’Aenona (Nin), de Polai (Pula) et de Parentium (Poreč) en Croatie, de Sirmium (Sremska Mitrovica) en Pannonie, de Poetovio (Ptuj) en Slovénie. Les restes les plus importants de l’art classique sont le palais de Dioclétien à Split, le théâtre de Salone, l’amphithéâtre, l’arc de triomphe et le temple d’Auguste de Pula. L’époque paléochrétienne a notamment laissé — à côté de l’ensemble de Salone — la basilique euphrasienne de Poreč en Istrie, construite au vie s. et dont les mosaïques absidiales représentent le dernier grand éclat de la peinture antique. À l’est de la ligne de Théodose, les cités principales sont Stobi et Lychnidos (Ohrid) en Macédoine, Doclea, près de Titograd, au Monténégro et Naissus (Niš) en Serbie.

Après l’époque des grandes invasions apparaissent les deux aspects de la nouvelle civilisation européenne : occidental en Croatie et en Slovénie, byzantin en Macédoine et en Serbie.


L’art croate

Apparu à Nin vers l’an 800 (vasque baptismale, reliquaires en argent), il se présente comme la conséquence directe de la conquête de la Dalmatie par Charlemagne et, partant, il se développe comme une pousse nouvelle qui se détache du monde byzantin environnant. Ce processus majeur de « débyzantinisation » s’achève en architecture dès le xie s., en peinture murale et en sculpture aux xiie-xiiie s., en peinture sur bois au xive s.


Architecture

L’architecture des ixe-xie s. constitue un tout stylistique et évolutif original, auquel on a donné le nom de « vieux-croate ». Ses monuments sont des petites églises de formes variées, construites en pierres brutes, aux murs renforcés de contreforts et d’arcatures. Toutes voûtées, elles sont souvent surmontées d’une petite coupole sur trompes. Si le plan est basilical, la nef unique se termine, au-delà d’un transept non débordant, par une abside semi-circulaire, polygonale ou carrée. Si le plan est centré, l’espace est divisé en trois, quatre, six ou huit lobes. Ces deux formes, centrale et basilicale, se combinent de façon variée jusqu’à produire, au xie s., l’église à trois nefs de type bénédictin (Sainte-Cécile de Knin). À côté de la monumentale rotonde de Saint-Donat (ancienne Sainte-Trinité) de Zadar (806-812), les principaux monuments se trouvent à Nin, à Knin, à Split* et dans la campagne salonitaine. En Croatie du Nord, l’architecture de pierre apparaît aux xiie-xiiie s. avec la construction des châteaux forts de Kalnik, de Bobovac, de Medvedgrad.

Ainsi, les deux parties du pays, dalmate et pannonienne, l’une ouverte aux influences méditerranéennes, l’autre à celles du Nord, acquièrent leurs propres particularités ; les styles du Nord seront le gothique et le baroque, ceux du Sud le roman et le renaissant, s’enchaînant entre eux sans solution de continuité.

Dans les cités du Sud s’élèvent, à partir du xiie s., les cathédrales romanes de Zadar, de Trogir, de Dubrovnik, de Kotor, etc. Parmi les monastères bénédictins se distinguent Saint-Pierre-au-Bois (Sveti Petar u Šumi) ainsi que Saint-Michel de Lim en Istrie, Sainte-Marie de l’île de Mljet en Dalmatie. Dans le Nord, le gothique apparaît au xiiie s. et persiste jusqu’au xviie s. Les plus importants monuments sont la cathédrale de Zagreb (consacrée en 1217), l’abbatiale cistercienne de Topusko (vers 1300, en ruines) et l’église des Templiers de Glogovnica (1303).

Les xive et xve s. sont pour le Midi la grande époque. Notons le couvent franciscain de Dubrovnik, roman et gothique (xive s.), la cathédrale de Korčula, romane, gothique et renaissante (xve et xvie s.), et la cathédrale de Šibenik, gothique et renaissante (1431-1555), dont le maître principal est l’architecte et sculpteur Juraj Dalmatinac (Georges le Dalmate, † 1473). Né à Zadar, formé à Venise, celui-ci est également actif, entre 1441 et 1473, à Zadar, à Split, à Dubrovnik et à Ancône. Les cités élèvent des fortifications (Trogir, Dubrovnik), tandis que les patriciens font bâtir leurs palais en gothique vénitien et au milieu de jardins à la manière toscane (Trogir, Rab, Split). Parmi les bâtisseurs se distinguent Paskoje Miličević (v. 1440-1516), à Dubrovnik, et Nicolas le Florentin (Niccolo di Giovanni), disciple de Donatello, qui travaille en Dalmatie de 1468 à 1505 et y implante le style de la Renaissance (cathédrale de Šibenik). À l’inverse, le Dalmate Luciano Laurana (v. 1420-1479) fait sa carrière en Italie (Urbino*).

En Croatie du Nord s’élèvent au xive s. les châteaux de Cetin, de Ružica, de Ribnik ; à partir du milieu du xve s., les attaques turques nécessitent leur reconversion en forteresses. Désormais, et durant deux siècles, l’architecture devient principalement militaire dans tout le pays.