Wisigoths (suite)
On observe dans le plan des églises une faveur marquée pour le parti de la croix grecque. Traité d’une manière rustique et massive à Santa Comba de Bande (près d’Orense), il sert de prétexte à de délicates recherches architecturales à São Frutuoso de Montelios (près de Braga, au Portugal). Le plan basilical, qui n’est pas abandonné pour autant, apparaît renouvelé par les singularités qui caractérisent San Juan Bautista de Baños de Cerrato (non loin de Palencia), un ex-voto du roi Receswinthe (661). À la fin de la période, les deux églises de San Pedro de la Nave (près de Zamora) et de Quintanilla de las Viñas (aux environs de Burgos) combinent très habilement les deux partis précédents, qui pourraient cependant sembler contradictoires.
La nouveauté n’est pas moins grande dans le domaine de la sculpture. Celle-ci s’incorpore désormais à l’architecture, soit qu’elle en orne les éléments sensibles : colonnes, chapiteaux, tailloirs et impostes, soit qu’elle se déploie librement en frises à l’extérieur comme à l’intérieur des édifices. Elle conserve en outre son rôle traditionnel dans le décor du mobilier liturgique : supports d’autel et plaques de chancels. Un profond changement de style s’opère avec le triomphe de la technique du méplat et de la taille en biseau. Il va de pair avec un graphisme de plus en plus aigu, qui retire toute sève aux motifs floraux et impose une stylisation poussée aux rares représentations figurées et historiées (San Pedro de la Nave et Quintanilla de las Viñas). Les préférences vont surtout à un décor abstrait et même géométrique (pilastres réemployés dans une citerne musulmane de Mérida, ou conservés au Musée archéologique provincial de Badajoz).
Les caractères propres à l’architecture et à la sculpture monumentale wisigothiques résultent de l’interférence de courants d’origine diverse. On ne saurait nier l’ampleur des influences orientales transmises à travers Byzance et Ravenne, ou venues d’Afrique. Mais il faut aussi tenir compte des traditions locales indigènes et hispano-romaines. Les apports germaniques demeurent faibles, même dans le domaine de l’orfèvrerie, où ils sont cependant les plus perceptibles. Les somptueuses couronnes votives du trésor de Guarrazar (Musée archéologique national, Madrid) se réclament autant de procédés byzantins contemporains que de techniques wisigothiques anciennes.
M. D.
➙ Moyen Âge (art du haut).
