Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

volcan (suite)

Lorsqu’il s’approche de la surface, puis lorsqu’il se transforme en éjecta et en laves après avoir perdu ses gaz, le magma peut, en effet, se consolider de diverses façons. S’il arrive très vite en présence des températures basses de l’extérieur, il se fige brutalement en un verre volcanique, d’aspect très analogue au verre à bouteille artificiel, dans lequel rien n’est visible, même au microscope. Par contre, s’il s’élève assez lentement, des minéraux naissent et grandissent au sein de la masse pâteuse, et les laves ont ensuite un aspect semi-cristallin : sur un fond de verre amorphe se détachent notamment des feldspaths, des amphiboles, des pyroxènes et des péridots, parfois du quartz et des micas, caractéristiques de chaque type pétrographique.

Mais ces minéraux ont des densités différentes, et il peut se produire un tri gravitatif. Par exemple, les premières laves sorties d’une bouche volcanique sont uniquement vitreuses ou renferment des feldspaths (minéraux clairs, légers), tandis que les dernières venues dans la même éruption sont enrichies en pyroxènes et en péridots (minéraux colorés ou noirs, lourds). L’étude au microscope ou l’analyse chimique donnent donc des résultats différents, alors que l’observation sur le terrain prouve qu’il s’agit d’une seule émission d’un magma unique. Des évolutions tardives peuvent d’ailleurs se produire même en surface, où le phénomène dit « de dévitrification » permet la genèse de minéraux nouveaux, aux dépens de la pâte déjà solidifiée, ce qui ne simplifie pas la reconnaissance macroscopique des véritables types de roches.

Enfin, il arrive que le magma se consolide en entier soit franchement en profondeur, soit avant d’atteindre la surface. Dans le premier cas, on a une roche entièrement cristallisée (holocristalline) en massif (batholite), qui ne se distingue en rien des roches dites « ignées », constituants essentiels de l’écorce terrestre ; dans le second, le magma produit une sorte d’intumescence souterraine, ou « volcan avorté », souvent qualifié de pluton (d’après le nom du dieu latin des Enfers), dans lequel la roche peut être holocristalline ou semi-cristalline et même vitreuse sur les bords de la venue magmatique, refroidis plus vite que son centre au contact des terrains encaissants. Il va sans dire que ces deux derniers types de gisements ne sont visibles que lorsque l’érosion ultérieure a décapé leur couverture. Ils nous enseignent, en tout cas, qu’il y a un passage continu entre les faciès des roches volcaniques franches et ceux des roches plutoniques (y compris jusqu’aux plus grandes profondeurs). Ce sont les mêmes magmas qui donnent par exemple les rhyolites des volcans et les granites des batholites ou d’autres couples différenciés seulement de la même façon par leur mode de cristallisation, comme trachyte-syénite, andésite-diorite, basalte-gabbro, etc. À chaque type de roche volcanique, vitreux ou semi-cristallin correspond un type de roche de profondeur, grenu, holocristallin.

L’étude des magmas démontre par conséquent ce fait très important que les volcans ont la valeur de forages profonds (dépassant les possibilités humaines actuelles) et qu’ils nous renseignent parfaitement sur la constitution interne de notre globe, tout au moins pour la zone de mobilisation des magmas située vers la base de l’écorce terrestre d’après les données de la géophysique.


L’activité volcanique


Caractères généraux

La caractéristique la plus frappante de l’activité volcanique est que ses résultats sont rapidement visibles pour l’homme. Tandis que la genèse, puis la destruction d’une chaîne de montagnes, par exemple, demandent de nombreux millions d’années et ne sont donc comprises que par les géologues, la construction d’un édifice volcanique et parfois sa destruction peuvent se réaliser en quelques années, en quelques jours ou en quelques heures.

Ainsi, le volcan du Monte Nuovo, près de Pouzzoles, à l’ouest de Naples, acquit sa hauteur de 140 m en deux jours seulement pendant l’année 1538. Plus récemment, le Paricutín, au Mexique, forma en 1943 un cône haut de 150 m en moins d’une semaine, de 350 m en six mois, pour achever sa croissance avec 540 m de haut et 1 600 m de largeur à sa base au bout d’un an, bien que son cycle complet d’activité ait duré environ dix ans. Bien d’autres exemples actuels pourraient être cités des Açores, des Canaries, d’Islande, etc., qui nous montrent que de petits volcans du type de nos « puys » d’Auvergne* n’ont eu qu’une histoire très courte. Dans de tels cas, le volume des produits solides et liquides émis ne dépasse habituellement guère le kilomètre cube ; tout à fait exceptionnellement, il arrive à être franchement plus notable, comme pour l’éruption du Laki (Islande*) en 1783, avec environ 3 km3 d’éjecta et 12 km3 de laves très fluides (la plus forte émission historique de laves). Par contre, lorsque l’on a affaire à des édifices de quelque importance, ceux-ci ne résultent pas d’une seule éruption, mais de nombreuses phases qui se sont succédé dans le temps. On arrive alors à des massifs volcaniques atteignant plusieurs kilomètres de hauteur et plusieurs dizaines de kilomètres à la base. Nous avons déjà cité le géant Mauna Loa d’Hawaii (9 km, avec un diamètre de 100 à 150 km), mais, même en France, le massif du Cantal a dû atteindre 2 km au-dessus du socle ancien du Massif central, avec une largeur d’une cinquantaine de kilomètres, grâce à une activité qui s’est poursuivie, d’une façon discontinue il est vrai, depuis le Miocène jusqu’au Quaternaire, soit pendant une trentaine de millions d’années.

La destruction peut être plus rapide encore que la construction. Nous avons mentionné l’explosion du Krakatau en 1883, qui raya de la carte en un instant la plus grande partie de cette île comprise entre Java et Sumatra, mais il y eut pire en 1815 lorsque le Tambora, dans l’île de Sumbawa, rejeta brutalement environ 150 km3 de blocs rocheux et de débris variés, provenant beaucoup plus de son substratum que d’un apport autre que gazeux.