Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Verne (Jules) (suite)

 M. Allolte de la Fuye, Jules Verne, sa vie et son œuvre (Kra, 1928 ; nouv. éd., Hachette, 1966). / B. Frank, Jules Verne et ses voyages (Flammarion, 1941). / K. K. Andreïev, les Trois Vies de Jules Verne (en russe, Moscou, 1957). / Jules Verne (l’Arc, Aix-en-Provence, 1966). / G. de Diesbach, le Tour de Jules Verne en quatre-vingts livres (Julliard 1969). / J. Chesneaux, Une lecture politique de Jules Verne (Mospero, 1971). / J. Jules-Verne, Jules Verne (Hachette, 1973). / S. Vierne, Jules Verne et le roman initiatique (Éd. du Sirac, 1973). / M. H. Huet, l’Histoire des voyages extraordinaires. Essai sur l’œuvre de Jules Verne (Lettres modernes, 1974). / M. Serres, Jouvences sur Jules Verne (Éd. de Minuit, 1974).

Vernet (les)

Famille de peintres français des xviiie et xixe s., dont les plus importants, Joseph, Carle et Horace, se succèdent de père en fils.


Le fondateur de cette dynastie d’artistes est Antoine Vernet (1689-1753), modeste décorateur et ornemaniste avignonnais, spécialiste des panneaux peints pour chaises à porteur, qui eut vingt-deux enfants, dont sept suivirent ses traces avec plus ou moins de succès.


Joseph Vernet

(Avignon 1714 - Paris 1789). Seul fils d’Antoine qui atteindra la célébrité, il travaille très jeune avec son père. Protégé par deux mécènes de l’aristocratie aixoise, il part en 1734 pour Rome, où il demeurera près de vingt ans. Il y est l’élève du Lyonnais Adrien Manglard (1695-1760), peintre de marines, voit les œuvres de Claude Lorrain* et de Salvator Rosa. Il se marie à une Irlandaise, fréquente Richard Wilson (v. paysage) et acquiert à partir de 1740 une clientèle internationale (artistes comme Francesco Solimena, hauts personnages français ou anglais). Passionné par l’étude des sites de Rome et de sa campagne, il consacre à ceux-ci de nombreuses œuvres (le Pont et le château Saint-Ange, 1745, musée du Louvre), à propos desquelles on évoque immanquablement Corot*, bien que leurs manières de traduire la lumière soient fort différentes (Vernet aime le dégradé très régulier des tons).

De retour à Paris en 1753, déjà avantageusement connu par ses envois au Salon (il a clé agréé en 1746 à l’Académie royale avec un Coucher de soleil dans un port), il reçoit un accueil triomphal. Le marquis de Marigny, surintendant des Bâtiments, lui donne la seule grande commande de paysages du siècle : les vues de vingt ports de France, dont il réalisera quatorze (la plupart au musée de la Marine, à Paris). Vernet passe dix ans de sa vie à travailler de port en port, « au naturel », c’est-à-dire à partir de notations prises sur le motif. Les exigences documentaires de la commande expliquent une certaine sécheresse de lignes, rachetée cependant par le charme des couleurs.

Installé à Paris en 1762, Vernet poursuit une œuvre à succès, qui répond au goût de la société pour ce que l’on nomme alors la « nature ». Diderot va jusqu’à le trouver « infiniment supérieur à Claude le Lorrain ». C’est l’époque des fameuses Tempêtes, des Clairs de lune et des Naufrages, partie de l’œuvre qui s’accorde parfaitement à l’état d’esprit préromantique et à l’idée du sublime selon Kant (ce qui, dans le spectacle de la puissance de la nature, grandit l’énergie de l’âme).

Joseph Vernet a donc mis à la mode le « paysage naturel », tout en l’élevant, d’après ses contemporains, à la dignité de la « peinture d’histoire » par son habileté à y intégrer des figures. Sans doute, du point de vue de l’évolution du genre, sa période italienne paraît-elle aujourd’hui la plus intéressante, ses tempêtes n’étant plus aussi naturelles à nos yeux qu’à ceux de ses contemporains. Vernet se trouve au carrefour de la tradition paysagiste du Nord implantée en Italie, du goût romantique et enfin du paysage aimé pour lui-même, tel qu’il s’épanouira au xixe s. À sa production, considérable, s’ajoute celle d’imitateurs nombreux, dont ses frères Antoine Ignace (1726 - v. 1775) et Antoine François (1730-1779).


Antoine Charles Horace, dit Carle Vernet

(Bordeaux 1758 - Paris 1836). Fils de Joseph, il fait son apprentissage avec celui-ci, puis avec Nicolas Bernard Lépicié (1735-1784). Très tôt choyé par la société parisienne, il obtient le prix de Rome en 1782, mais ne fait à Rome qu’un bref séjour. D’abord tourné vers la peinture historique, il subit fortement l’influence de David*. En 1789, le Triomphe de Paul Émile (Metropolitan Museum, New York) lui ouvre les portes de l’Académie, où, pendant quelques mois, il siège avec son père. Sous le Directoire, Carie Vernet devient le spécialiste élégant des courses de chevaux — donnant du cheval une interprétation toute nouvelle, souple et nerveuse — ainsi que d’aimables scènes de mœurs. Il se rend célèbre par ses caricatures des Incroyables et Merveilleuses, dont Baudelaire appréciera la sécheresse de trait.

Ayant suivi Bonaparte pendant la campagne d’Italie pour prendre des esquisses de batailles, il les développe en de vastes compositions (la Bataille de Marengo, le Matin d’Austerlitz, musée de Versailles). Retournant à la scène de genre après la Restauration, il continue à peindre des scènes de course et de chasse (Chasse au daim pour la Saint-Hubert en 1818, Louvre).

Aujourd’hui, il est surtout connu par les gravures qui ont été tirées de ses dessins et par ses lithographies : il fait, en effet, partie de l’équipe réunie à partir de 1814 par le publiciste et imprimeur Charles de Lasteyrie, introducteur de la lithographie en France. Près de cinq cents pièces originales, dans ce domaine, témoignent de sa verve, bien qu’il ne tire pas du procédé le même parti qu’un Géricault*, dont, sous l’Empire, leur amour commun des chevaux avait fait un moment son élève.


Horace Vernet

(Paris 1789-id. 1863). Bien qu’ayant commencé par la vignette et la caricature, il est connu avant tout comme peintre de sujets militaires. Ses opinions bonapartistes le font refuser au Salon de 1822, avec notamment la Barrière de Clichy (Louvre), sujet relatif à la défense de Paris, dont il avait été, avec éclat, l’un des acteurs en 1814. Il expose alors quarante-cinq toiles dans son atelier. Charles X l’apprécie, l’inscrit sur la liste civile et lui commande un plafond pour le Louvre (Jules II en conférence avec Bramante, Raphaël et Michel-Ange). Horace Vernet est membre de l’Institut en 1826, directeur de l’Académie de France à Rome de 1828 à 1833.