Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

végétation (suite)

Les formations végétales des littoraux

L’alternance des marées ne fixe pas une limite constante entre les terres émergées et les eaux salées, et, en fonction de la longueur de la submersion, deux domaines peuvent être distingués.

• Un domaine submergé plus de 6 heures par jour et dans lequel ne peuvent croître pratiquement que des Algues. Si dans les basses latitudes la chaleur est plus forte et l’insolation plus intense, dans les hautes latitudes la température basse des eaux est indirectement responsable d’une teneur en éléments nutritifs beaucoup plus élevée. Aussi assiste-t-on à une zonation inverse de celle des terres émergées : par exemple, les eaux froides arctiques à la hauteur de la toundra contiennent de 20 à 100 fois plus de plancton que les eaux tropicales à la hauteur de la forêt luxuriante.

• Un domaine submergé moins de 6 heures par jour. Deux grands faciès se partagent ce domaine en fonction de la latitude : mangroves dans les régions chaudes tropicales et marais maritimes dans les régions tempérées et froides.
— Les mangroves. Ce sont des formations végétales arborées caractérisées par trois adaptations uniques : les racines-échasses, permettant à des arbres comme les Rhizophoras de se percher au-dessus des vases mal consolidées ; les racines à pneumatophores (protubérances verticales permettant sans doute une meilleure aération) ; la viviparité des graines, qui commencent à se développer avant de se détacher de l’arbre mère. Grâce aux courants marins, les mangroves tropicales sont beaucoup plus homogènes floristiquement que les domaines continentaux.
— Les marais maritimes. Des formations herbacées pauvres en espèces se développent sur les vases des littoraux tempérés et froids. Des chaméphytes, quelquefois succulents, et des thérophytes sont adaptés à la fois à la salure de la vase et à la submersion. Dans la bande recouverte à chaque marée, appelée slikke, se développent des Graminacées, comme Spartina Townsendi, dans la partie inférieure, des Chénopodiacées, comme les Salicornes, sur la haute slikke. La bande qui n’est recouverte que par grandes marées, appelée schorre, est occupée par des Plantains et du Triglochin. Au-delà apparaissent les premiers Roseaux et les Iris, marquant la limite avec l’eau douce.

Au-delà de la limite des plus grandes marées, la présence de la mer se fait encore sentir, non seulement sur les substrats rocheux et les falaises, mais surtout sur les dunes, où des Graminacées spécialisées (Agropyrum, Ammophila, Elymus), des épineux (Hippophaé) contribuent à fixer ces substrats mobiles, à fabriquer un sol et à préparer l’avènement de la végétation continentale climacique régionale.


Les formations végétales du bord des eaux douces

Dans les eaux douces stagnantes ou faiblement courantes apparaissent déjà des Phanérogames, flottantes comme la Lentille d’eau, submergées comme le Nénuphar. En bordure, en position submergée partielle ou au ras de la nappe, la végétation de plus en plus diversifiée se dispose en bandes. Deux ensembles de facteurs en commandent la distribution : le niveau de l’eau et l’acidité du milieu.

Une position particulière doit être réservée aux marécages en cours de comblement et aux tourbières. On peut en distinguer deux types.

• Les marais basiques et les tourbières basses. Le comblement par la matière organique se fait en quelque sorte passivement, les débris de Roseaux, de Massettes (Typha), de Cladions tombent dans l’eau et se décomposent très partiellement. Aussi le fond du marécage s’exhausse-t-il jusqu’à apparaître à la surface du plan d’eau. On passe alors à une basse tourbière plane et plate.

• Les hautes tourbières. Par opposition aux précédentes, elles colonisent des eaux acides. Dans ces conditions ingrates, des Sphaignes peuvent vivre. Or, ces Bryophytes peuvent croître sur leurs propres débris à peine décomposés et ainsi élever la surface de la tourbe au-dessus du plan d’eau originel. Alors apparaissent des tourbières bombées.

Quelquefois même, sur des pentes faibles mais en climat très humide, des tourbières à Sphaignes peuvent coloniser tout l’espace sans qu’il y ait véritablement de plan d’eau : ce sont les tourbières-couvertures (blanketbogs) que l’on rencontre par exemple en Irlande. Enfin, en montagne, l’importance de la pluie peut permettre le développement de tourbières même sur pentes fortes. On les qualifie alors d’« ombrogènes ».


Les formations végétales dans les montagnes

Quel que soit le milieu zonal à la surface du globe, la présence de montagnes entraîne des modifications, climatiques surtout, mais aussi chorologiques et édaphiques, qui commandent des formations végétales originales et étagées.

La cause essentielle de cet étagement est d’abord la diminution progressive des températures de l’air (le gradient thermique moyen est de 0,55 °C/100 m, ce qui, aux latitudes tempérées, situe l’isotherme 0 °C entre 2 600 et 3 000 m). Par contre, les températures des sols, dont les valeurs moyennes annuelles sont analogues à celles de l’air, subissent de forts écarts diurnes, et, en altitude, quand les conditions deviennent défavorables à la forêt, les plantes de petite taille bénéficient de ces températures plus élevées au contact du sol.

D’autre part, avec l’altitude, l’air est toujours plus humide qu’en plaine, à cause des températures plus basses. Par ailleurs, les montagnes favorisent les ascendances. Aussi aux montagnes correspondent toujours des précipitations plus fortes, jusqu’à une certaine altitude et une certaine distance du moins. Cette augmentation de la pluie et de la neige n’entraîne pas obligatoirement une meilleure alimentation en eau des plantes, car les pentes fortes favorisent le ruissellement, et les sols peu épais ont moins de réserves.

Enfin, les vents en montagne sont plus violents et fréquents qu’en plaine : il s’ensuit une augmentation de la transpiration ; on évoque ce phénomène en priorité pour rendre compte des formations basses qui surmontent les étages forestiers.