Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vasari (Giorgio) (suite)

Jusqu’à vingt ans, Vasari étudie dans sa ville natale et à Florence, notamment dans les ateliers d’Andrea del Sarto (1486-1530) et de Baccio Bandinelli (1488-1560). Le cardinal Hippolyte de Médicis l’emmène à Rome en 1531, lui permettant de faire des relevés des monuments antiques. En 1541, un voyage à Venise, avec des arrêts à Parme et à Mantoue, permet à Vasari d’élargir ses connaissances de peintre et de futur historien d’art. Le style de l’artiste demeure néanmoins celui du maniérisme* toscano-romain (fresques de sa maison à Arezzo, à partir de 1542). Vasari vit à Rome jusqu’en 1553, protégé par le cardinal Alexandre Farnèse ; il exécute des fresques dans la salle de la chancellerie du Vatican, fréquente Michel-Ange*, qui l’encourage à se tourner vers l’architecture, et publie en 1550 la première édition de ses Vite.

À partir de 1554, il se consacre, à Florence, à de nombreuses commandes du duc Cosme de Médicis*. Il remanie le Palazzo Vecchio, en couvre les murs d’arabesques, de chimères, de trente-neuf grandes compositions consacrées à la gloire du souverain. Sa technique de la fresque est d’une étonnante rapidité. Pour l’administration toscane, Vasari est chargé, en 1560, d’élever le palais des Offices, longue perspective ouverte sur le fleuve par une loggia. Cet édifice immense, qui ne sera achevé qu’après la mort de l’artiste, est exempt de froideur et reste un bon exemple de l’art florentin du xvie s.

Entre-temps, Vasari achève avec Bartolomeo Ammannati (1511-1592), à la chapelle Médicis et à la bibliothèque Laurentienne, les entreprises de Michel-Ange, et, en 1564, il élève le tombeau du maître à Santa Croce. Hors de Florence, il réalise des ensembles urbains : en 1569, à Pise, la place des Cavaliers, composée du palais de ce nom et de l’église Santo Stefano ; en 1572, la place d’Arezzo et sa loge. Il n’abandonne pas pour autant la peinture, exécutant les fresques géantes de la salle royale du Vatican (scènes de la Bataille de Lépante, achevées en 1573).

Vasari écrivain d’art

Rééditées dès 1568 avec des corrections, et maintes fois depuis, les Vite sont un recueil de 158 biographies, certaines collectives, groupées en trois parties dont la première est consacrée aux artistes de l’époque gothique, de Cimabue* à Lorenzo di Bicci, la deuxième à ceux de la Renaissance du quattrocento, de Iacopo* della Quercia à Signorelli*, la troisième à ceux de la Renaissance du cinquecento, de Léonard* de Vinci à Vasari lui-même, le tout précédé d’un prologue et d’un petit traité sur les trois arts. Cette somme ne doit pas être consultée sans précautions. Malgré l’étendue de sa documentation, l’auteur a commis un assez grand nombre d’erreurs de fait. Mais il faut surtout tenir compte de ses partis pris, exprimés d’ailleurs avec autant d’intelligence que de conviction. Vasari est un patriote, qui écrit pour la gloire de Florence* et de la Toscane ; aussi met-il en vedette les artistes toscans. Selon une progression soigneusement calculée, qui bouscule au besoin l’ordre chronologique, l’ouvrage développe une idée directrice : celle du progrès des arts, depuis les précurseurs (Cimabue, Giotto*, etc.) qui les arrachèrent à la barbarie médiévale jusqu’à la plénitude atteinte par Raphaël* et Michel-Ange* ; on doit à ce progrès le triomphe de l’harmonie en architecture, du naturalisme rationnel en peinture et en sculpture. La critique moderne a beau jeu de relever les simplifications, les omissions et les injustices qu’a entraînées cette vision doctrinale. Il reste que l’ouvrage est à la base de nos connaissances sur la plupart des artistes italiens dont il traite. Vasari a très souvent tracé le profil et défini l’apport de ces artistes avec beaucoup de pertinence. On trouve enfin dans les Vite un talent de conteur dont témoignent les anecdotes multipliées à plaisir.

B. de M.

H. P.

 W. Kallab, Vasari-Studien (Vienne, 1908). / Studi vasariani. Atti del Convegno internazionale per il IV centenario (Florence, 1952). / J. Rouchette, la Renaissance que nous a léguée Vasari (Les Belles Lettres, 1959). / E. Rud, Giorgio Vasari, historien d’art de la Renaissance. Une biographie (en danois, Copenhague, 1961). / P. Barocchi, Vasari pittore (Florence, 1964).
CATALOGUE D’EXPOSITION. Giorgio Vasari dessinateur et collectionneur, Cabinet des dessins du musée du Louvre (Réunion des musées nationaux, 1965).

vassalité

Institution du Moyen Âge caractérisée par l’existence de liens de dépendance entre deux catégories d’hommes libres : celle des protecteurs et celle des protégés, ces derniers entrant volontairement au service des premiers tout en conservant leur liberté.



Les origines

L’institution vassalique a de nombreux antécédents : le comitatus (Gefolgschaft), c’est-à-dire le groupe de guerriers libres entrés volontairement au service d’un chef selon les modalités décrites à la fin du ier s. apr. J.-C. par Tacite ; les buccellarii (mangeurs de biscuit), guerriers privés entrés au service des potentes du Bas-Empire. Mais elle ne peut s’épanouir qu’en période d’instabilité politique, voire d’anarchie, lorsque la puissance publique se révèle incapable d’assurer la sécurité et la nourriture des habitants. Il en est ainsi au vie et surtout au viie s. dans la Gaule mérovingienne, particulièrement dans le pays situé entre Loire et Rhin, ainsi que dans le sud-ouest de la Germanie, dans l’Espagne wisigothique et dans l’Italie lombarde.

La catégorie des ingenui in obsequio, c’est-à-dire des nommes libres en dépendance, se diversifie très rapidement. Au sommet, les antrustions, membres de la truste (ou trustis) royale, directement issue du comitatus germanique, constituent un groupe de guerriers d’élite au service direct des souverains et, par conséquent, socialement à part quelle que soit leur origine. Mais, à leur côté, d’autres ingenui (hommes libres) d’humble extraction se trouvent soit in obsequio regis (dans la dépendance du roi), soit in obsequio optimatorum ou procerorum (dans la dépendance des riches, des puissants). Membres d’une suite armée, on les désigne du nom de gasindi ; mais, en raison de leur dépendance, qui ne les prive pourtant pas de leur liberté juridique, on leur donne des appellations généralement réservées aux esclaves : pueri peut-être, vassi sûrement.