Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Univers (suite)

Astres « anormaux »

Il y a des galaxies dites « anormales », qui ne satisfont pas les relations trouvées pour les galaxies dites « normales ». C’est le cas des galaxies explosives telles que Messier 82, pour laquelle des photographies prises avec un filtre ne laissant passer que la raie Hα de l’hydrogène ionisé montrent un enchevêtrement de filaments lumineux, de gaz et de poussières s’échappant du centre de la galaxie. Les galaxies de Seyfert, bien qu’ayant une forme, spirale ou elliptique, régulière, possèdent un noyau central très lumineux, siège d’une activité intense. De très petit diamètre, de l’ordre du parsec ou moins encore, ce noyau peut émettre 40 p. 100 de la lumière totale de la galaxie ; les spectres de ces galaxies ont des raies d’émission intenses et larges provenant de masses gazeuses chaudes, animées de grandes vitesses, pouvant atteindre plusieurs milliers de kilomètres par seconde. Ces galaxies ont aussi un fort excès de rayonnement ultraviolet et de rayonnement infrarouge ainsi qu’une émission radio. On estime que cette activité de Seyfert existe dans 1 à 2 p. 100 des galaxies ; elle n’est donc pas très rare et a peut-être un sens évolutif. Les galaxies de Markarian, à fort excès de rayonnement ultraviolet, les galaxies bleues de Arp viennent d’être découvertes récemment. Les galaxies compactes de Zwicky représentent une autre catégorie d’objets, lumineux comme une galaxie ordinaire, mais avec un diamètre de dix à cent fois plus petit, riches en gaz d’hydrogène neutre et en étoiles brillantes très jeunes.

Les galaxies émettent normalement un faible rayonnement radioélectrique, mais certaines d’entre elles, appelées radiogalaxies, rayonnent une fraction importante de leur énergie dans ce domaine de longueur d’onde. Elles éjectent de la matière sous forme de plasma, gaz complètement ionisé, dans lequel des électrons, animés de vitesses voisines de celle de la lumière, s’enroulent autour des lignes de forces du champ magnétique du plasma en émettant un rayonnement continu dit synchrotron. Les radiogalaxies sont le plus souvent des galaxies elliptiques géantes. L’émission radioélectrique est parfois si puissante (1028 W/Hz/sr) et nous parvient de si loin que la galaxie optique est hors de portée des télescopes. La plus lointaine radiogalaxie photographiée est Bouvier A, dont la vitesse de récession v, calculée par la loi Doppler-Fizeau, est de près de 150 000 km/s, la moitié de la vitesse de la lumière. Pouvant émettre en radio autant que les radiogalaxies, les quasars*, découverts en 1963, posent de nombreux problèmes. Leur luminosité intrinsèque est de l’ordre de cent fois celle d’une galaxie géante. Les quasars qui émettent des ondes radioélectriques, appelés QSR, ont un rayonnement continu synchrotron qui peut varier du simple au double en un jour, la région active responsable de cette variation étant donc très petite, inférieure à l’unité astronomique. Mais, la plupart des quasars, appelés QSO, n’ont pas d’émission radioélectrique. Leur spectre optique comporte un fond continu synchrotron auquel se superposent des raies d’émission larges, caractéristiques d’une nébuleuse gazeuse de 15 000 K, de masse 106 masses solaires et de rayon 10 pc, formant une atmosphère autour d’un noyau actif. Les noyaux des galaxies de Seyfert et certaines galaxies très compactes ressemblent fort à des quasars, dont la nature est encore inconnue. Jusqu’à la magnitude 20, il y a environ 106 quasars optiques. Enfin, la découverte des plus lointains quasars a révolutionné l’astrophysique : leur vitesse de récession, d’après la loi Doppler-Fizeau, dépasse la vitesse c de la lumière. Ainsi, celle du quasar 4C 05 . 34 est de 863 100 km/s, soit près de trois fois la vitesse de la lumière c. Certains astrophysiciens remettent en question l’interprétation du décalage spectral par une vitesse de récession et font appel à des effets relativistes ; d’autres supposent que les grandeurs physiques, telles que la masse de l’électron, apparemment constantes dans notre voisinage, sont différentes dans des astres très lointains. Actuellement, le problème n’est pas résolu. Mais si l’interprétation par une vitesse de récession est valable, il est, par contre, certain que la mécanique classique de Newton et la loi Doppler-Fizeau ne sont pas valables pour des astres dont la vitesse de récession approche celle de la lumière.


Le domaine de la relativité générale

Au-delà de 1 Gpc, il faut faire appel à la relativité générale d’Einstein. Dès le début du xxe s., plusieurs faits astronomiques ont mis en cause la validité de la mécanique newtonienne, et plusieurs observations à des distances bien inférieures au gigaparsec n’étaient pas explicables par la mécanique classique. En revanche, elles s’interprétaient par l’effet relativiste d’un fort champ gravitationnel. Ainsi en est-il pour la planète Mercure, proche du Soleil, dont l’orbite elliptique n’est pas fixe par rapport aux étoiles, le périhélie avançant de 43 secondes d’arc environ par siècle. Pendant l’éclipse de 1919, devenue historique, car elle permit de confirmer une prédiction de la théorie d’Einstein, on a pu observer des étoiles très proches angulairement du Soleil et dont les rayonnements nous parvenaient après être passés tout près du globe solaire. La comparaison avec les positions des étoiles observées à une époque antérieure, quand le Soleil n’était pas dans le champ, a montré que les rayons lumineux étaient déviés par le Soleil. Actuellement, on observe cette déviation sur des ondes radioélectriques provenant de quasars d’aspect ponctuel, précis comme des étoiles. De même, un fort champ de pesanteur modifie l’énergie d’une onde électromagnétique : ce fait a été observé sur des rayonnements sortant d’étoiles, en particulier du Soleil, dont les raies spectrales sont en effet rougies.


Principes

Pour interpréter l’expérience d’Albert Michelson (1852-1931) montrant que la lumière ne se comporte pas comme un phénomène mécanique et que sa vitesse de propagation ne se compose pas avec la vitesse de rotation de la Terre, Einstein conçoit les deux principes de base de la théorie de la relativité restreinte : le principe de relativité, selon lequel la vitesse de propagation de la lumière est indépendante du mouvement du laboratoire qui la reçoit, et le principe de l’invariance de la vitesse de la lumière, selon lequel la vitesse de propagation de la lumière est indépendante du mouvement de la source qui l’émet. Il en déduit qu’aucun corps matériel ne peut se mouvoir à une vitesse supérieure ou égale à celle de la lumière : c = 300 000 km/s. La relativité générale repose sur un troisième principe, qui est le principe de l’équivalence entre force gravitationnelle et force d’inertie. Elle comprend les trois propositions suivantes.
1. L’Univers est rempli de matière et d’énergie (sous forme de rayonnements, par exemple) qui sont localisées par trois coordonnées d’espace, x, y, z, et une coordonnée de temps, t ; l’ensemble forme l’espace-temps S à quatre dimensions.
2. La distribution de la matière et de l’énergie dans l’Univers détermine la structure géométrique de l’espace-temps S (matière-énergie ⇔ géométrie) : cette interdépendance est régie par les équations d’Einstein.
3. Les particules de matière dans l’Univers décrivent dans l’espace-temps S des courbes, dites lignes d’Univers des particules, qui sont des géodésiques de l’espace-temps, une géodésique étant le plus court chemin entre deux points. Il n’est plus besoin d’attraction gravitationnelle à distance pour expliquer les mouvements des corps matériels : ceux-ci ont la propriété de suivre les géodésiques de l’espace-temps S. Ainsi, les orbites planétaires, la trajectoire d’un corps tombant en chute libre ou bien celle d’un rayon lumineux sont des géodésiques dans l’espace-temps S. Les équations de la relativité générale sont impossibles à résoudre dans leur généralité. Mais, si l’on suppose l’Univers homogène et isotrope, c’est-à-dire l’espace possédant les mêmes propriétés dans toutes les directions, on trouve que l’espace-temps peut être représenté par un espace courbe à trois dimensions, x, y, z, dont le rayon de courbure R est fonction d’un temps appelé temps cosmique.