Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

turbulence (suite)

On montre facilement que les équations locales du mouvement moyen (équations de Reynolds) peuvent s’écrire sous la forme

Dans le mouvement moyen, la contrainte de frottement en M pour un élément de surface d’orientation a pour composante avec

Dans le cas particulier de l’écoulement entre deux plans parallèles dont le mouvement moyen se fait suivant Ox1 (voir figure),
À l’exception du voisinage immédiat de la paroi, la contrainte laminaire de Newton est négligeable devant la contrainte turbulente de Reynolds qui est donc responsable de la dissipation d’énergie au sein du fluide ; on voit ainsi toute l’importance du tenseur des contraintes turbulentes de composantes dans l’étude de la turbulence.

Le système des quatre équations locales de Reynolds fait intervenir en plus des quatre inconnues, pression p et composantes de la vitesse moyenne, les composantes du tenseur des contraintes turbulentes, soit six inconnues supplémentaires, puisque ce tenseur est symétrique. Sans de nouvelles hypothèses, le système d’équations du mouvement moyen reste indéterminé. C’est ainsi que l’on introduit des modèles de turbulence tels que la « longueur de mélange de Prandtl », relations expérimentales concernant la structure de l’écoulement turbulent, analogues aux lois de comportement relatives à la nature du fluide.


Structure interne des écoulements turbulents


Intensité de la turbulence

L’instabilité de l’écoulement entraîne la formation de tourbillons qui se développent dans l’écoulement moyen et se fractionnent ensuite en tourbillons plus petits qui dissipent leur énergie mécanique en chaleur. Comme l’énergie cinétique moyenne du fluide se décompose en énergie cinétique du mouvement moyen et en énergie cinétique du mouvement d’agitation il est naturel de caractériser l’importance du brassage turbulent par le rapport de l’énergie cinétique d’agitation à l’énergie cinétique du mouvement moyen. La racine carrée de ce rapport, appelée intensité de la turbulence I, est la première donnée statistique de l’écoulement turbulent :

À titre d’exemple, I ≃ 0,001 dans l’atmosphère et I ≃ 0,1 dans un torrent.

La turbulence est isotrope si, en un point M, elle est homogène si cette valeur constante est indépendante du point M.


Échelle de turbulence

La seule répartition spatiale de l’intensité de la turbulence n’est pas suffisante pour définir complètement le mouvement d’agitation. Il est nécessaire de connaître aussi l’influence respective des différentes particules fluides sur certaines de leurs caractéristiques ; en termes statistiques, on parle de corrélation. Reprenons l’exemple de l’écoulement entre deux plans parallèles et considérons, dans un plan normal à l’écoulement moyen, deux points M et N distants de r, et dont les vitesses sont désignées par V et U. Le coefficient de corrélation R(r) entre les vitesses fluctuantes et est défini comme suit :

et l’échelle de turbulence L dans la direction x2 a pour expression

l’intérêt de cette nouvelle donnée statistique étant de fixer la taille moyenne des tourbillons dans la direction considérée.

Dans l’état actuel de nos connaissances, la dynamique des écoulements turbulents est une des branches les plus empiriques de la mécanique des fluides. Certes, la technique de mesure relativement récente de l’anémométrie à fil chaud, qui permet une exploration systématique de la couche* limite se développant le long des parois solides, est un outil puissant d’étude de la turbulence. De grands progrès restent à faire, qui devraient apporter une solution à l’un des problèmes de survie de l’humanité, la lutte contre la pollution de deux fluides privilégiés, l’air et l’eau, qui font notre environnement.

J. G.

➙ Dynamique des fluides.

 J. O. Hinze, Turbulence (New York, 1959).

Turcs

Groupes humains parlant la langue turque ; plus spécialement citoyens de la république de Turquie.


L’histoire des Turcs dans l’Antiquité, au Moyen Âge et à l’époque contemporaine, en Asie centrale et en Sibérie, est assez difficile à établir, parce que nous ne possédons encore que des informations fragmentaires, dont bien des éléments sont l’objet de discussion, parce qu’il y a eu une grande instabilité de l’habitat, avec de vastes glissements de populations, parce qu’enfin les noms de tribus et de peuples peuvent exprimer, à des siècles d’intervalle, des réalités différentes.


La langue turque

La langue turque est une langue agglutinante qu’on classe souvent dans la famille ouralo-altaïque, mais qu’on préfère parfois apparenter au mongol et au mandchou dans une famille altaïque que d’aucuns jugent encore hypothétique. On peut diviser cette langue en deux groupes principaux : le premier, dit « langues à R », comprenant le bulgare ancien et le tchouvache moderne ; le second, dit « langues à Z », comprenant toutes les autres et lui-même parfois subdivisé en langues à D (kirghiz, oghouz, ouïgour) et en langues à Y (Sibérie orientale, Mongolie, Chine). La morphologie a pour procédé unique la suffixation et ignore l’opposition des genres, celle des nombres ne jouant qu’un rôle restreint. Le caractère syntaxique dominant est que la partie gouvernante d’une proposition grammaticale suit les parties gouvernées.

À l’exception de quelques rares mots isolés apparaissant dans des transcriptions étrangères, en particulier chinoises, on ne possède aucun document sur la langue turque antérieure aux grandes inscriptions écrites en Mongolie septentrionale au début du viiie s. À cette époque, le turc présente de remarquables phénomènes d’usure, qui prouvent l’ancienneté de son usage. Il est clair que déjà il n’est pas unifié. La différenciation entre les langues turques s’accroîtra au cours des temps, malgré de notables efforts d’uniformisation. De nos jours, les influences contradictoires qui s’exercent sur les divers peuples et leur entrée dans des univers culturels différents accentuent la séparation. La promotion de langues purement orales en langues littéraires écrites incite à noter les aberrations et le particularisme. Avant l’islām, le turc s’est transcrit en caractères appelés abusivement runiques, puis les caractères ouïgours se sont imposés dans toute l’Asie centrale. Après la conversion à l’islām, les caractères arabes, mal adaptés aux besoins de la langue, ont été employés. Dans le turc ottoman surtout, une foule de mots et de constructions arabo-persanes ont envahi le vocabulaire et la syntaxe. Depuis 1928, la république de Turquie a adopté l’alphabet latin en modifiant quelques caractères. Les Turcs de l’U. R. S. S. ont opté pour les caractères cyrilliques.