Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Trématodes (suite)

Les Douves

Les Douves se classent selon la position du pore génital par rapport à la ventouse ventrale. Si le pore génital se trouve en avant, on distingue les Fasciolidés, dont les testicules et les ovaires sont ramifiés, les Opisthorchidés, dont les testicules sont en arrière des ovaires, et les Dicrocélidés, dont les testicules sont situés en avant des ovaires. Si le pore génital se trouve en arrière, il s’agit des Troglotrémidés.

La grande Douve, ou Douve du foie (Fasciola hepatica), est l’agent de la distomatose hépatique, dont les hôtes définitifs sont non seulement l’Homme, mais aussi des Bovidés et des Ovidés. L’hôte intermédiaire est Limnaea truncatula ; le support végétal le plus courant est le Cresson sauvage, qu’ingère accidentellement l’Homme. La Douve, ayant atteint le foie après avoir traversé la paroi duodénale, gagne les canaux biliaires, où elle se fixe. Cette parasitose est relativement fréquente en France, dans certaines régions d’élevage où le bétail est infesté. Elle se traduit au début par de la fièvre, des douleurs hépatiques et des signes allergiques tels que l’urticaire, puis à la phase d’état, par des signes proprement hépatiques. La recherche des œufs de Douve dans les selles n’est positive qu’au bout de trois ou quatre mois, et le diagnostic repose plus volontiers sur la découverte d’une forte éosinophilie sanguine, autour de 50 p. 100 dans les trois premiers mois, sur les réactions immunologiques et éventuellement sur le tubage duodénal, permettant de mettre en évidence directement la Douve. Le traitement consiste dans l’administration d’émétine ou de ses dérivés, et la prophylaxie consiste à interdire la vente du Cresson sauvage. D’autres Douves peuvent être à l’origine de troubles divers chez l’Homme. Ainsi, la petite Douve (Dicrocœlium lanceolatum) entraîne une symptomatologie très proche de la grande Douve, mais elle affecte habituellement les herbivores. La Douve de Chine (Clonorchis sinensis), nécessitant un deuxième hôte intermédiaire qui est un Poisson, se transmet par ingestion de ce dernier consommé cru, et donne, comme la Douve des Félidés (Opisthorchis felineus), une symptomatologie hépatique. Par ailleurs, la Douve de l’intestin (Fasciolopsis Buski), transmise par absorption de végétaux aquatiques (châtaignes d’eau), est responsable de troubles digestifs et d’œdème. La Douve du poumon (Paragonimus Ringeri) est transmise par ingestion d’un deuxième hôte intermédiaire, un Crustacé. Elle est à l’origine d’une toux quinteuse avec expectoration parfois striée de sang.

Les Bilharzies

Chez les Bilharzies (ou Schistosomes), le cycle évolutif est sensiblement analogue à celui des Douves, cependant les sporocystes donnent non des rédies, mais des sporocystes-fils, qui eux-mêmes donnent des cercaires à queue fourchue, ou furcocercaires. Ceux-ci, équipés de petites épines à la partie antérieure de leur corps, infestent l’Homme activement, par pénétration directe à travers la peau.

Parmi les Bilharzies figurent quatre variétés pathogènes pour l’Homme : Schistosoma hæmatobium, S. Mansoni, S. intercalatum et S. japonicum.

• S. hæmatobium, agent de la bilharziose (ou Schistosomiase) urogénitale, vit dans les veines du système porte ; la femelle va pondre dans les plexus veineux périvésicaux. Répartie dans toute l’Afrique, le Moyen-Orient et débordant quelque peu sur l’Europe méridionale, la bilharziose uro-génitale se caractérise essentiellement par un maître symptôme qui est l’hématurie (sang dans les urines). Celle-ci succède à une période initiale d’infestation traduite par des phénomènes allergiques à type d’urticaire, accompagnés parfois de fièvre élevée. Le diagnostic repose non seulement sur la notion de contexte géographique, mais sur la recherche des œufs dans les urines, caractérisés par leur éperon terminal. On peut retrouver ces mêmes œufs par la rectoscopie grâce à une biopsie rectale. Les examens immunologiques ne sont pas encore, pour la plupart, assez spécifiques ou d’application assez courante pour permettre le diagnostic. Le traitement a longtemps reposé sur les sels d’antimoine, mais aujourd’hui on dispose d’un dérivé de l’imidazol appelé niridazole.

• S. Mansoni, agent de la bilharziose intestinale, vit dans les plexus veineux hépatiques ; la femelle va pondre dans le plexus mésentérique. Très répandue non seulement à travers toute l’Afrique, mais aussi en Amérique latine et aux Antilles, la bilharziose intestinale, après une phase initiale comparable à celle de la bilharziose urinaire, se manifeste à la période d’état par des douleurs abdominales et des troubles digestifs pouvant évoluer jusqu’à la cirrhose. Le diagnostic se fonde sur la recherche des œufs dans les selles, caractérisés par leur éperon latéral, ainsi que sur la rectoscopie avec biopsie rectale. Le traitement est identique à celui de la bilharziose urinaire.

• Quant à S. intercalatum, responsable également d’une bilharziose intestinale, son tropisme est analogue à celui de S. Mansoni. Cette variété s’observe surtout en Afrique centrale.

• Reste S. japonicum, agent de la bilharziose artérioso-veineuse. Il vit dans les veines et les artères des Mammifères et est à l’origine d’une maladie grave surtout observée en Extrême-Orient. Après une phase initiale essentiellement cutanée apparaissent des signes généraux sévères avec manifestations cutanées, intestinales, hépatiques, pulmonaires et nerveuses réalisant la maladie de Katayama. La recherche des œufs dans les selles, la rectoscopie avec biopsie permettent le diagnostic.

Les diverses bilharzioses peuvent être à l’origine de complications parfois redoutables : retentissement sur le haut appareil rénal, surinfection et aboutissement à l’insuffisance rénale pour Schistosoma hæmatobium, syndrome d’hypertension portable avec parfois manifestations hémorragiques pour S. Mansoni et S. intercalatum ; épuisement de l’état général et tableau de cirrhose pour S. japonicum.

Le traitement par le niridazole a certes amélioré le pronostic individuel, encore que son efficacité sur S. japonicum soit beaucoup moins nette que sur S. Mansoni ou sur S. intercalatum, et surtout que sur S. hæmatobium.