Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

Tōkyō (suite)

L’aspect d’Edo va changer quand, à partir de 1868, les modes occidentales s’infiltreront. Les bases de l’actuel Musée national sont jetées en 1870-1875. Mais le tremblement de terre de 1923 laisse la ville à l’état de chaos. À côté des anciennes maisons de bois se construisent de grands immeubles en dur. Ils font du Tōkyō d’aujourd’hui une ville de contrastes : on peut y admirer à la fois les superbes monuments en béton que sont les bâtiments olympiques et la cathédrale Sainte-Marie de Tange* Kenzō et les vieux quartiers où se laissent secrètement découvrir les vestiges d’autrefois.

M. M.

 W. Klein, Tōkyō (Delpire, 1964). / Tōkyō et ses environs (Hachette, 1964). / Le Musée national de Tōkyō (Éd. des Deux Coqs d’or, 1969).

Tolède

En esp. Toledo, v. d’Espagne, en Nouvelle-Castille ; ch.-l. de province ; 44 000 hab. (Tolédans).


Avant la conquête romaine de l’Espagne, Tolède était la capitale des Carpetans. Conquise en 192 av. J.-C. par les Romains, elle devient un municipe cité par l’historien Tite-Live, qui l’appelle Toletum. Colonie de Rome durant les trois premiers siècles de notre ère, Tolède subit les invasions barbares.

Les Wisigoths en font le centre d’un vaste empire qui comprend la province gauloise de Narbonnaise. Le roi wisigoth Leovigild (573-586) y établit la capitale de ses États : sa dynastie y régnera jusqu’en 709. Tolède joue également un rôle religieux très important ; à partir du ve s., de nombreux conciles nationaux s’y tiennent. C’est au cours du concile de Tolède de 589 que le roi Reccared Ier (586-601) abjure l’arianisme. En 681, le XIIe concile de Tolède proclame la suprématie du siège tolédan sur toute l’Église d’Espagne.

Après le règne du roi Wamba (672-680), la monarchie wisigothique tombe en décadence (début du viiie s.) ; un étranger à la dynastie, le duc de Bétique, Rodrigue († 711), est élu roi (710). Peu après, les Arabes, profitant de divisions internes, franchissent le détroit, et leur chef, Tāriq ibn Ziyād, bat l’armée de Rodrigue à la bataille de Guadalete (19-26 juill. 711) avant de s’emparer de Tolède et de toute l’Espagne.

Durant trois siècles, l’ancienne capitale des rois goths est une simple dépendance du puissant califat de Cordoue. Au début du xie s., elle devient la capitale d’un petit royaume maure indépendant qui a secoué le joug des califes omeyyades. À cette époque, son rayonnement intellectuel est considérable ; ses écoles juives, où enseignent Abraham ibn Ezra (1089-1164) et Juda Halevi (v. 1075 - v. 1141), sont célèbres.

Le roi Alphonse VI* de Castille reprend Tolède aux musulmans en mai 1085. Il y élève une forteresse, l’alcazar, dont le premier gouverneur est le Cid* Campeador.

Les rois Alphonse VIII et Alphonse X* le Sage renforcent les fortifications, qui résistent victorieusement à plusieurs assauts des troupes arabes. Tolède demeure jusqu’en 1561 la capitale du royaume de Castille, puis d’Espagne.

Les Rois Catholiques embellissent la ville : leur fille, Jeanne la Folle, y naît en 1479, mais la prospérité de Tolède est atteinte par les mesures prises par les Rois Catholiques contre les Maures et les Juifs.

Au début du xvie s., Tolède est au cœur de la révolte des comuneros, partisans du pouvoir local opposés au centralisme des Habsbourg. Après la défaite et la mort du chef de la rébellion, Juan de Padilla (1484-1521), sa veuve, María Pacheco († 1531), retranchée dans Tolède, résiste longtemps (1521-22) aux armées de Charles Quint.

En 1561, Philippe II transfère sa capitale à Madrid ; Tolède garde le titre de « cité impériale et couronnée ». Si elle perd son rang politique, elle conserve son rayonnement artistique, illustré par le Greco*.

Depuis la fin du xixe s., l’alcazar de Tolède abrite l’académie d’Infanterie. Pendant la guerre civile de 1936-1939, les élèves de l’école militaire adhèrent au Mouvement national du général Franco ; sous la direction du colonel J. Moscardó (1878-1956), les cadets et des partisans nationalistes y soutiennent, du 22 juillet au 27 septembre 1936, un siège mémorable contre les milices républicaines avant d’être délivrés par les troupes franquistes du général J. E. Varela (1891-1951).

P. P. et P. R.


Tolède, ville d’art

En dehors de quelques éléments de fortifications, il ne subsiste rien de la Tolède wisigothique. Son premier monument notable illustre l’histoire de l’architecture musulmane à la fin du califat de Cordoue. Il s’agit d’une ancienne mosquée construite vers l’an 1000, transformée en église et agrandie après la Reconquête chrétienne : l’ermita del Cristo de la Luz. L’appareil de brique, le décor mural et l’usage des voûtes nervées témoignent d’une heureuse fusion entre les influences andalouses et d’anciennes traditions locales.

Même après la Reconquista, Tolède, qui avait conservé un fort noyau de peuplement musulman, continua à entretenir des rapports suivis avec l’Andalousie. On ne s’étonnera donc pas d’y trouver un foyer d’art mudéjar vivant et original, qui sut tirer des effets pittoresques de l’usage de la brique. Il est à l’origine de nombreuses églises monastiques et paroissiales. Certaines sont à nef unique, d’autres dotées de collatéraux communiquant avec le vaisseau central par de grandes arcades outrepassées. Toutes sont couvertes de plafonds artesonados, l’abside seule étant voûtée. Les clochers sont de véritables minarets décorés sur leurs quatre faces de panneaux d’arcatures et d’entrelacs. D’autres arcatures apparaissent à l’extérieur des absides.

Les chefs-d’œuvre de l’art mudéjar tolédan sont deux anciennes synagogues : Santa María la Blanca et le Tránsito La première, qui remonte au xiiie s., ne compte pas moins de cinq nefs dont les arcs outrepassés retombent sur des piles prismatiques par l’intermédiaire de très beaux chapiteaux. Le décor comprend en outre des revêtements muraux en plâtre d’un dessin sobre et ferme. Le Tránsito, qui date du xive s., offre un contraste voulu entre l’extérieur, très dépouillé, et une somptueuse ornementation intérieure, imitée de celle des monuments de Grenade*.