Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Tertiaire (suite)

Le terme de Tertiaire est donc bien compris : seules sont discutées les positions exactes de ses limites. Quand il n’y a pas d’organismes déterminants, il n’est pas toujours facile de fixer la limite Crétacé-Tertiaire (limite inférieure) ; les études sur le Quaternaire font varier et généralement reculer l’âge (– 1,5 MA, puis – 2 MA, actuellement – 3 MA) de la limite supérieure.

Le climat semble, au moins au début du Tertiaire et dans les régions européennes, avoir été plus chaud et plus humide qu’aujourd’hui. Graduellement, cet aspect subtropical a diminué et les températures se sont nettement abaissées.


La vie

Faune et flore ressemblent de plus en plus à la faune et la flore contemporaines ; toutes les classes du règne végétal et du règne animal actuels sont représentées.

Chez les Végétaux, c’est, après l’apogée des Gymnospermes au Secondaire, la prédominance des Angiospermes ; au début, toutefois, ces derniers ont un net cachet tropical à cause du climat : Palmiers, Lauriers, Camphriers, Magnolias. Au milieu du Tertiaire, les Graminacées prennent une très large place ; leur absence serait aujourd’hui difficile à imaginer en raison de leur rôle alimentaire pour les Oiseaux et les Mammifères, particulièrement dans la lignée des Équidés, et de la formation des prairies, dont le rôle géologique dans le contrôle de l’érosion est notable.

Dans l’histoire des animaux, la fin du Secondaire a été marquée par la disparition totale des grands Reptiles, des Ammonites, des Rudistes. La répartition des organismes marins ressemble beaucoup à l’actuelle : les Brachiopodes, naguère si florissants, tombent de 15 à 1 p. 100 dans la liste des espèces. Cependant, les groupes particuliers de Foraminifères se développent : Nummulites, Alvéolines, Orbitoïdes, Globorotalidés, dont l’évolution complexe sert de repère stratigraphique. Poissons, Crocodiles, Tortues, Serpents ne se modifient plus guère. On note le développement des Oiseaux (sans dents). Mais le phénomène le plus remarquable est la conquête de tous les milieux par les Mammifères. Rares, de petite taille, de présence discrète au cours du Secondaire, ces derniers remplissent le « vide écologique » laissé par la dégénérescence des Reptiles.

Au début du Tertiaire, c’est une explosion brutale : apparaissent les ancêtres des familles actuelles, en même temps que des groupes originaux aujourd’hui disparus. Puis les faunes mammaliennes acquièrent un cachet moderne, tandis que s’éteignent les groupes archaïques : c’est alors que se distinguent les principales lignées, celle du Cheval, les Carnivores, etc. Si les familles actuelles sont apparues dans la première moitié du Tertiaire, les genres actuels apparaissent dans la seconde. Les Anthropoïdes (à partir de – 30 MA), nombreux, sont des exemples de lignées évolutives bien connues ; celle du Cheval, celle des ancêtres du Mammouth et de l’Éléphant également.

Les Marsupiaux (il y en a en Europe jusqu’au milieu du Tertiaire), durement concurrencés par tous ces Mammifères placentaires, vont disparaître. Il n’en subsiste pratiquement plus qu’en Australie. Dans ce pays, par contre, l’absence des placentaires permet un grand développement de ces Marsupiaux, qui, du coup, occupent toutes les niches écologiques, allant même jusqu’aux formes carnivores (le Loup de Tasmanie).

Cet exemple montre qu’il n’est pas possible d’envisager l’histoire du monde sans évoquer la séparation des blocs continentaux. La dérive des continents semble responsable de la diversification du monde des Mammifères (30 ordres de Mammifères en 65 MA pour 20 ordres de Reptiles sur 200 MA) et de leur répartition géographique.


Le monde au Tertiaire

Ainsi, il est nécessaire de faire appel encore une fois à ce mécanisme continu de la dérive des continents, héritage du Secondaire. Les océans s’ouvrent de plus en plus : les planchers océaniques recouverts de sédiments marins tertiaires sont les plus nombreux (deux tiers). Les continents vont gagner leur position actuelle, et les océans acquérir une configuration qui nous est familière (par exemple, l’Atlantique Nord). Une séparation totale a lieu entre l’Australie et l’Antarctique. La collision entre le bloc Asie et l’Inde provoque la formation de l’Himālaya. Par contre, en compensation de cet éloignement des continents et témoignant de l’acquisition d’une stabilité, apparaissent des ponts continentaux, comme celui qui assure la jonction des deux Amériques (Panamá).

Dans la Téthys, l’alternance d’écartement et de resserrement des blocs aboutit à l’évolution finale des domaines géosynclinaux secondaires : les serrages entraînent de vives compressions et sont responsables des déformations les plus spectaculaires des chaînes du système alpin : les plissements et les charriages.

Le Tertiaire est une période où se poursuit la redistribution des masses hercyniennes et où s’achèvent les structures alpines visibles actuellement : Atlas, cordillères Bétiques, Alpes, Apennin, Carpates, Balkans, Hellénides, chaînes de l’Asie Mineure, Iran, Birmanie, Indonésie, chaînes insulaires pacifiques, sans oublier les Pyrénées, le Caucase, l’Himālaya.

Si l’Éocène paraît être plus simplement une époque où les mécanismes secondaires semblent se poursuivre, l’Oligocène et le Miocène sont des temps de crise orogénique importante, marqués par la fracturation ou la compression de zones étendues, par l’apparition et la mise en place d’unités nouvelles, par le développement du volcanisme. Par la suite, vers la fin du Pliocène, se produit une dernière et profonde modification de la configuration de ces chaînes nouvellement formées : de grands effondrements donnent naissance à la Méditerranée.

En France, les dépôts tertiaires sont très fréquents, plissés ou non. En effet, le bassin de Paris et le bassin d’Aquitaine sont restés longtemps envahis par les mers, dont les témoins sont les roches du sous-sol de l’Île-de-France, du Bordelais ou du Bassin rhodanien. L’orogenèse alpine a été sensible partout, mais, évidemment, plus notablement dans les chaînes neuves (Pyrénées, Provence, Jura et Alpes) et dans les domaines proches (rejeu des marges du Massif central, formation du fossé rhénan, de la Bresse). À la fin de l’ère tertiaire, la France offre sa physionomie actuelle, à l’exception de quelques golfes envahis par la mer (basse Loire et vallée du Rhône) et en faisant abstraction, toutefois, de la configuration du littoral, qui est un trait actuel.

P. F.

➙ Alpes / Géologie / Géosynclinal / Orogenèse / Paléontologie / Quaternaire / Secondaire / Tectonique.