Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

tempéré (géomorphologie du domaine) (suite)

On peut toutefois se demander si l’inefficacité du système morphogénétique des régions tempérées humides n’est pas trop vite affirmée à partir de quelques mesures, certes concordantes, mais dans lesquelles la part d’erreur a d’autant plus de chances d’être grande que les phénomènes à mesurer sont petits : est-il prudent de généraliser des mesures nécessairement limitées dans le temps quand on sait que l’efficacité des processus ne devient réelle qu’au-delà de seuils encore mal connus ? Une crue millénaire n’est-elle pas capable d’évacuer en quelques jours des tonnages d’alluvions infiniment supérieurs à ceux que des crues moyennes peuvent déplacer ? D’autre part, si les formes héritées de la dernière période froide n’ont guère subi de retouches, il ne faut pas oublier que le climat actuel s’est établi il y a tout juste 10 000 ans, ce qui est fort peu à l’échelle géolologique.

Il reste que, même si l’on minimise peut-être aujourd’hui le rôle du système morphogénétique tempéré, son efficacité est sans aucun doute faible, et son action a trop peu duré pour qu’elle ait pu remodeler les formes héritées. Il semble donc vain, dans ces conditions, de vouloir caractériser un type de modelé en équilibre avec le climat des moyennes latitudes.

Au total, le processus dominant de nos régions est bien l’altération, laquelle progresse beaucoup plus vite que sous les climats froids ou secs, mais infiniment moins vite que dans les milieux tropicaux humides. Les caractéristiques climatiques l’expliquent. Le gel n’est jamais intense et n’atteint que rarement la roche en place bien protégée par son manteau de débris. La chaleur reste modérée en été, mais est tout de même suffisante pour permettre une attaque chimique des minéraux ; son action est cependant limitée par la courte durée de la saison estivale et plus encore par la faiblesse du drainage des sols liée à une pluviosité médiocre en été. Il s’agit donc d’une altération ménagée.

Toutefois, ces données doivent être nuancées suivant les différents domaines morphoclimatiques tempérés. Ce sont les milieux tempérés océaniques, au climat très égal, qui sont les plus caractéristiques du système qui vient d’être décrit. Sur les marges septentrionales des régions tempérées de l’hémisphère Nord, les plus marquées par les glaciers quaternaires, ainsi que dans les régions continentales aux hivers plus rigoureux et aux précipitations moindres, la gélifraction joue un rôle plus grand ; mais l’atonie des processus érosifs y est semblable. Au contraire, en milieu méditerranéen à étés chauds et secs et à pluies fortement concentrées, le système morphogénétique se teinte d’une nette agressivité que la destruction d’un couvert végétal fragile a considérablement renforcée : ravinements, glissements de terrain sont les processus les plus actifs de l’évolution des versants et fournissent aux rivières une charge abondante entraînée lors de crues brutales et accumulée en cônes de déjections, plaines alluviales et deltas. Les milieux subtropicaux des façades orientales des continents, enfin, constituent des domaines originaux dans la mesure où, connaissant des hivers rigoureux, ils sont baignés en été d’une chaleur et d’une humidité tropicales. Les altérations y sont donc beaucoup plus poussées. Mais les défrichements y ont entraîné une crise de rhexistasie d’autant plus considérable que les pluies y sont très abondantes et parfois catastrophiques (cyclones tropicaux).

R. L.

➙ Aplanissement / Érosion.

 C. A. Cotton, Landscape as developed by Processes of Normal Erosion (Cambridge, 1941 ; 2e éd., Christchurch, 1948). / P. Macar, Principes de géomorphologie normale, étude des formes du terrain des régions à climat humide (Masson et Vaillant-Carmanne, Liège, 1946). / P. Birot, Essai sur quelques problèmes de morphologie générale (A. Colin, 1949) ; Précis de géographie physique générale (A. Colin, 1959 ; 3e éd., 1968). / J. Tricart et A. Cailleux, Traité de géomorphologie, t. I : Introduction a la géomorphologie climatique (S. E. D. E. S., 1966).

Templiers ou Chevaliers du Temple

Ordre militaire et religieux.



Naissance de l’ordre du Temple

L’ordre du Temple est fondé en 1119 à Jérusalem par un noble champenois, Hugues de Payns ou de Pains (v. 1070-1136), et sept autres chevaliers français, compagnons de Godefroi de Bouillon. Depuis 1099, les Francs se sont installés à Jérusalem et emparés de la Palestine ; le roi Baudouin II (1118-1131) leur donne une demeure dans son palais, proche de l’emplacement de l’ancien temple de Salomon, d’où leur autre nom de « Pauvres Chevaliers du Christ et du temple de Salomon ».

Les chevaliers prennent comme règle celle de saint Augustin : leur mission consiste à protéger les pèlerins chrétiens qui se rendent en Terre sainte en veillant spécialement sur la sécurité des chemins qui conduisent de la côte de Syrie à Jérusalem. Plus tard, l’ordre ajoutera à ces fonctions de police des opérations financières : remboursement aux croisés, à leur arrivée en Palestine, des dépôts qu’ils font dans une maison d’Europe avant leur départ et autres activités bancaires.

Les Templiers voient leur nombre augmenter rapidement après le concile de Troyes de 1128, où saint Bernard* se fait l’ardent propagandiste de l’ordre. Saint Bernard participe à l’élaboration de leur règle en 75 articles, imitée de celle qu’il a imposée à ses cisterciens. Cette règle, traduite en français, est accrue au xiiie s. Le costume des religieux, un grand manteau blanc marqué d’une croix rouge pour les chevaliers, un manteau brun ou noir pour les servants, rappelle aussi l’habit des moines de Cîteaux. D’autre part, saint Bernard rédige un traité de propagande De laude novae militiae (Louange de la nouvelle milice, v. 1130) pour faire connaître l’ordre et attirer de nouvelles recrues.

Les chevaliers s’installent en Europe en 1147 ; ils tiennent à Paris, ville qui sera l’un de leurs ports d’attache, une assemblée générale à laquelle assistent le pape Eugène III et le roi de France, Louis VII.