Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Suisse (suite)

L’ensoleillement privilégie les stations de montagne. En hiver, certaines de celles-ci présentent un ensoleillement d’une durée double ou triple de celle de certaines villes de plaine. Ainsi l’ensoleillement, en décembre, est de 37 heures à Zurich, 52 à Bâle, 46 à Berne, 29 à Neuchâtel, mais de 117 heures à Säntis, 80 à Saint-Moritz, 115 à Montana, 79 à Davos, 102 à Lugano. Cette situation se répète de novembre à février. Les stations d’altitude sont ainsi favorisées en hiver sur le plan de l’ensoleillement, qui n’est pas à confondre avec celui des températures.

F. R.


L’histoire


Des origines à la naissance de la Confédération

C’est vers la fin du Paléolithique supérieur que les hommes commencèrent à s’installer sur le territoire actuel de la Suisse. Avec le recul des glaciations, ce peuplement s’étendit des vallées vers les montagnes (Paléolithique et Mésolithique). Au Néolithique, cultivateurs et éleveurs créèrent les premiers petits centres agricoles. Pendant l’âge du bronze s’établirent des cités lacustres construites sur pilotis. Puis, à l’âge du fer, les civilisations celtiques de Hallstatt et surtout de La Tène (qui doit son nom à une station protohistorique située à l’extrémité orientale du lac de Neuchâtel) se développèrent, et des relations se nouèrent avec l’Italie du Nord. Vers la fin de l’époque de La Tène, des Celtes, les Helvètes et les Rauraci du Jura et des plateaux, établirent des villages et des places fortifiées.

En 58 av. J.-C., les Helvètes gagnèrent la Gaule en quête de nouvelles terres. Mais César les arrêta (victoire romaine de Bibracte) et les refoula dans leurs montagnes ; leur pays fut soumis au pouvoir de Rome et rattaché à la Gaule romaine. L’Helvétie joua, en raison de l’importance de ses voies naturelles de communication, un rôle important dans le monde romain. L’occupant y installa quelques colonies de vétérans, une à Nyon (Julia Equestris) et une autre près de Bâle, à Augst (Augusta Rauracorum), ainsi qu’une garnison à Windisch (Vindonissa), en Argovie. Le pays, dont le chef-lieu était Avenches (Aventicum), se romanisa rapidement et profita d’une certaine prospérité. Deux grandes routes franchissaient les Alpes : l’une, par le Grand-Saint-Bernard, débouchait dans la vallée du Rhône ; l’autre, par le Splügen, mettait l’Italie en communication avec celle du Rhin. D’autres voies transversales assuraient le trafic d’ouest en est.

Sous la domination romaine, l’Helvétie commença à se christianiser au ive s. Mais, pendant la période de la grande migration des peuples, les Alamans repoussèrent le christianisme vers l’ouest, et c’est seulement au viie s., sous l’action des missionnaires venant en partie d’Irlande, que peu à peu tout le pays s’est converti à la foi chrétienne. Quant à la juridiction ecclésiastique, elle devait être attribuée aux évêchés de Bâle, de Constance, de Coire, de Côme, de Sion, de Genève et de Lausanne. La fondation d’abbayes comme Saint-Gall, Pfäfers et, plus tard, Einsiedeln marqua les étapes de cette christianisation progressive.

Placée sur la frontière de l’Empire romain, l’Helvétie avait subi dès la fin du iiie s. les invasions barbares et, au ve s., le pays avait été occupé par des tribus germaniques, les Burgondes à l’ouest, les Alamans à l’est. Les Burgondes se mêlèrent facilement à la population autochtone, dont ils adoptèrent la langue. Ce ne fut pas le cas des Alamans — encore païens à cette époque —, qui repoussèrent les habitants dans les vallées supérieures des Alpes. Mais la germanisation progressa et finit par gagner tout le pays. Dans les hautes vallées des Alpes (la Rhétie), les dialectes romains (le romanche et le ladin) se maintinrent. Ce fut d’abord la Reuss qui forma la frontière primitive entre les Burgondes et les Alamans ; plus tard, la limite fut reportée à l’Aar, puis à la Sarine, rivière qui aujourd’hui encore sépare les ethnies allemande et romande.

Pendant que se constituait lentement la féodalité, les régions helvétiques menèrent une vie effacée dans le royaume mérovingien, puis dans l’Empire carolingien ; le pays devint peu à peu un conglomérat de souverainetés laïques, ecclésiastiques et urbaines. Plusieurs dynasties cherchaient l’hégémonie : la maison de Savoie au nord du Léman ; les Zähringen, qui jusqu’à leur extinction en 1218 créèrent dans le Nord-Est et au-delà du Rhin plusieurs villes fortes (Fribourg-en-Brisgau, Fribourg-en-Nuithonie). De 888 à 1032, l’ouest de l’Helvétie fit partie d’un royaume autonome de Bourgogne qui avait son centre en Suisse romande. Mais les rois de Bourgogne étaient incapables de tenir tête à la féodalité grandissante : la puissance réelle appartenait à leurs vassaux. En 1032, à la mort du dernier roi de Bourgogne, le roi de Germanie hérita de son titre et, dès lors, l’Helvétie entière fit partie du Saint Empire germanique.


La Confédération

Tandis que la puissance impériale s’amenuisait, la bourgeoisie des premières communautés urbaines s’employa à obtenir l’autonomie, en particulier dans le domaine de la police et de la justice. Ces communautés obtinrent de Frédéric II des privilèges de villes libres et impériales : l’empereur avait en effet besoin de soutien dans la lutte qui l’opposait au pape. Mais l’appui de l’Empire était insuffisant, et les villes durent se grouper pour assurer leur défense : ainsi naquirent un peu partout des confédérations. La Confédération suisse fut l’une d’entre elles, mais elle dut son origine à l’existence de communautés paysannes dont la cohésion reposait sur la gestion en commun des bois et des alpages, assurée par l’assemblée des propriétaires, qui se réunissait chaque printemps et constituait un embryon de force politique.

À la fin du xiie s., les habitants d’Uri, qui formaient avec Schwyz une de ces corporations rurales, avaient rendu accessible le passage du Saint-Gothard, ce qui leur apportait des ressources financières considérables, en raison de l’importance des échanges entre l’Allemagne et l’Italie. Craignant d’être mis au rang de tenanciers de la maison de Habsbourg, qui souhaitait étendre son autorité sur la plus grande partie de la Suisse centrale actuelle, ils recherchèrent l’appui de l’empereur, qui accorda à Uri, en 1231, et à Schwyz, en 1240, une lettre de franchise (charte d’immédiateté) leur procurant la faculté de se gouverner eux-mêmes. Cependant, en 1273 — après le Grand Interrègne —, Rodolphe de Habsbourg fut élu empereur, et les communautés rurales n’eurent plus la possibilité d’opposer l’empereur aux Habsbourg, les deux personnages étant confondus. L’empereur fit administrer les vallées autour du lac des Quatre-Cantons par des fonctionnaires (baillis) qui indisposèrent la population et menacèrent les libertés traditionnelles des communautés.