Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

stratégie (suite)

dissuasion, action de tout ordre menée par un État en vue de décourager un adversaire éventuel d’entreprendre contre lui un acte d’agression en lui prouvant que la valeur de l’enjeu qu’il convoite est inférieure à celle des dommages que l’État menacé est déterminé à lui infliger. (Pour être crédible, la dissuasion suppose l’existence d’une force de frappe, aujourd’hui nucléaire, capable, en tout état de cause, d’agir en représailles.)

doctrine militaire, ensemble cohérent d’orientations ou d’options traduisant la solution qu’un pays a choisie dans une situation donnée pour assurer le facteur militaire de sa défense. (La doctrine militaire, qui évolue en fonction de la situation internationale, est déterminée conjointement par le gouvernement et le haut commandement.)

escalade, progression contrôlée par l’autorité politique de l’importance quantitative et qualitative des moyens militaires mis en œuvre dans un conflit par chacun des adversaires, soit à son initiative, soit pour répondre à une surenchère de la partie adverse. (Cette progression comporte aujourd’hui le risque de conduire à l’emploi de l’arme nucléaire.)
Par extension, accélération, jugée le plus souvent inéluctable, de la puissance des armements nucléaires qui pourraient être mis en œuvre a partir du moment où le plus faible d’entre eux aurait été effectivement employé par l’un des partenaires. (« L’escalade est à la fois un danger auquel on veut parer et une menace à laquelle on ne peut ni on ne veut renoncer » [Raymond Aron].)

force de frappe, nom donné depuis 1945 à un ensemble de moyens militaires dotés d’armes nucléaires stratégiques et capables d’agir instantanément sur le territoire d’un État adverse, notamment pour répondre à une agression. (Syn. force de dissuasion, force nationale stratégique.)
Première frappe, nom donné dans un conflit à la première mise en œuvre d’une force de frappe par l’un des partenaires.
Seconde frappe, engagement d’une force de frappe en représailles des dommages subits du fait d’une première frappe.

guerre classique ou conventionnelle, conflit où n’est employée aucune arme nucléaire (par opposition à guerre nucléaire).

guerre froide, expression employée depuis 1948 pour caractériser les relations américano-soviétiques (ou, par extension, celles de deux autres États), se traduisant par des actes persistants d’hostilité de tout ordre (diplomatique, économique, etc.), mais excluant délibérément la forme d’un conflit armé.

guerre psychologique, mise en œuvre systématique de mesures et de moyens divers destinés à influencer l’opinion ou le comportement des populations ou des armées adverses de façon à amoindrir, à paralyser ou à briser leur volonté de se battre ou de résister.

guerre révolutionnaire, doctrine de guerre élaborée par les théoriciens marxistes-léninistes et qui vise à provoquer, à attiser, à contrôler et à exploiter les mouvements de masse de toute nature de l’adversaire afin de prendre le pouvoir en s’assurant progressivement le contrôle de la population selon un processus scientifiquement étudié et conduit en vertu des principes permanents de la stratégie.

guerre subversive, action concertée dirigée contre les pouvoirs publics d’un pays par des organisations clandestines disposant ou non de l’appui d’une partie de la population et d’un soutien extérieur afin de paralyser l’exercice de ces pouvoirs. (Insidieuse et permanente, employant les procédés les plus divers, cette forme de guerre peut viser des objectifs très variés, allant du contrôle d’un secteur limité au bouleversement complet de l’ordre politique ou social.)

guerre totale, forme de guerre se donnant pour objectif l’anéantissement complet de l’adversaire. (Cette conception, issue de Clausewitz, a été reprise au xixe s. par les pangermanistes, puis par les théoriciens nationaux-socialistes.)

logistique. V. l’article.

opérationnel, se dit de l’aspect spécifiquement militaire de la stratégie et de tout ce qui concerne les opérations militaires.
Par extension, se dit aussi d’un matériel d’armement dont l’expérimentation est terminée et qui est désormais capable d’être engagé en opérations.

polémologie. V. l’article.

représailles massives, théorie stratégique fondée sur la détermination affichée par un État de riposter immédiatement avec la puissance maximale de ses armes nucléaires à toute agression ou à toute menace caractérisée d’agression. (Cette théorie a été adoptée notamment par les États-Unis de 1945 à la fin des années 1950).

riposte graduée, théorie stratégique américaine (en anglais flexible response) élaborée autour de 1961 par McNamara et fondée sur la volonté d’adapter le plus exactement possible à la nature et à la puissance de la menace ou de l’action exercée par un adversaire le choix des moyens militaires à mettre en œuvre pour lui répondre.

science militaire, étude objective et théorique des facteurs qui déterminent ou conditionnent la nature, la préparation ou le déroulement des conflits. (Elle s’efforce de faire apparaître les données et les relations d’ordre théorique pouvant être appliquées à la solution de problèmes réels au niveau de la stratégie, de la logistique, de la tactique, de l’organisation et de l’emploi des forces armées.)

stratégie générale, mise en œuvre, par un gouvernement, des moyens de toute nature (politique, économique, militaire, etc.) dont il dispose pour réaliser les objectifs définis par sa politique.

stratégie indirecte, celle qui veut éviter l’affrontement brutal et direct avec l’adversaire principal. (Elle s’efforce d’obtenir la décision indirectement, soit par des opérations militaires sur des théâtres secondaires, soit en agissant sur ses alliés, soit en employant des moyens [politiques ou économiques] autres que militaires. La stratégie indirecte, qui a longtemps caractérisé la politique britannique, s’oppose à la stratégie directe, qui recherche la décision en attaquant l’adversaire principal sur le théâtre principal avec le maximum de moyens militaires : c’était celle de la victoire par la bataille de Foch.)