Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Spenser (Edmund)

Poète anglais (Londres v. 1552 - id. 1599).


Le flambeau de la poésie en langue anglaise allumé par Chaucer* au début du xive s. ne retrouve son vrai éclat — malgré sir Thomas Wyat (v. 1503-1542) et le comte de Surrey (v. 1518-1547) — que cent cinquante ans plus tard avec Edmund Spenser. Ce bourgeois londonien bon teint, devenu secrétaire de lord Arthur Grey of Wilton (1580), puis shérif de Cork en 1598, passe presque toute sa vie en Irlande, et View of the Présent State of Ireland (publié en 1633), ouvrage en prose, réunit la somme de ses opinions sur cette question épineuse. Le fait de vivre loin de Londres, de la Cour et des cercles littéraires stimulants ne nuit pas à sa gloire. The Shepheardes Calender (1579) affirme, dès avant son départ, la personnalité littéraire de Spenser, alias « Colin Clout », le berger poète qu’on revoit dans Colin Clouts corne Home againe (1595), dédié à sir Ralegh et hommage à Élisabeth Ire et à sa cour. Ce Calendrier du berger, dans sa forme pastorale, mode d’expression favorite du poète, contient en quelque sorte l’essentiel des expériences et des influences de ses années de jeunesse. De 1561 à 1569, Spenser suit les cours de la Merchant Taylor’ School, dirigée par le fameux Richard Mulcaster, défenseur de la langue anglaise face à celles du continent. En 1569, il contribue à Theatre for Worldlings de Jan Van der Noot (v. 1540 - v. 1595), en traduisant du français des pièces de Du Bellay et de Marot (traducteur de Pétrarque). La période de 1569 à 1576 le trouve à Pembroke Hall, à Cambridge, qui l’acquiert à la low church et détermine son hostilité à l’Église romaine. Enfin, en 1579, au service du comte de Leicester, Spenser fréquente sir Philip Sidney (1554-1586). Un amour commun de la langue anglaise et de la recherche métrique unit les deux hommes, et Astrophel rend en 1595 un hommage posthume à cette amitié. Humaniste et aussi fervent admirateur de Chaucer, Spenser rêve d’apporter à la langue anglaise une contribution égale à celle de la Pléiade et de Du Bellay à la langue française. Son élégie Daphnaida (1591) rappelle The Book of the Duchess de Chaucer, tandis que Complaints (1591) se souvient de Du Bellay, et notamment dans le sonnet « The Ruines of Time ». Dans ce même volume figurent aussi le charmant « Muiopotmos » et surtout « Mother Hubberds Tale », poème satirique et première épopée burlesque anglaise, où les aventures du Renard et du Singe permettent une critique qui n’épargne ni la Cour ni le clergé. Deux œuvres témoignent de la vie sentimentale du poète : Amoretti, sur son amour, et Epithalamion (1595) — chef-d’œuvre du genre —, pour son mariage avec Elizabeth Boyle en 1594. À la suite de cet épithalame, Spenser écrit Prothalamion (1596), demandé par le comte de Worcester pour le mariage de ses filles. La grande œuvre de Spenser reste The Faerie Queene. Cette pièce maîtresse de la littérature élisabéthaine, dédiée à sa souveraine, la « Gloriana », l’immortalise de son vivant. Elle suscite de nombreux émules, de Michael Drayton aux frères Fletcher par exemple, et on la verra tour à tour encensée ou dépréciée au rythme du mouvement qui fait monter ou descendre les classiques dans l’empyrée. Vaste et incomplète entreprise qui ne comprend que six volumes, soutenus par un lien ténu (I à III, 1590 ; IV à VI, 1596), sur les douze prévus, ce « pageant » magnifique demeure essentiellement didactique. On y sent l’influence de l’Arioste, du Tasse dans la forme, celle d’Aristote et de Platon pour la doctrine. L’allégorie triomphante, aussi bien morale que politique et religieuse, tente, une fois de plus, et après Four Hymnes (1596), de réaliser la synthèse de la pensée antique et chrétienne et le renouvellement de l’anglais dans le fonds natal par l’assimilation des valeurs étrangères. Si The Faerie Queene ne manque pas de ces archaïsmes qui font froncer le sourcil de Ben Jonson, elle consacre l’apport à la poésie nationale de cette strophe fameuse, que reprendront avec tant de bonheur les romantiques de Byron* à Shelley* et à Keats* :

D. S. -F.

 E. Legouis, Edmund Spenser (Bloud et Gay, 1923). / W. Nelson, The Poetry of Edmund Spenser (New York, 1963). / M. Evans, Spenser’s Anatomy of Heroism (Londres ; 1970). / P. Bayley, Edmund Spenser : Prince of Poets (Londres, 1971).

Spermatophytes ou Spermaphytes

L’un des deux embranchements (avec les Cryptogames vasculaires) des végétaux vasculaires. (On dit aussi Phanérogames.)


Une des plus grandes divisions du règne végétal est, en effet, soulignée par l’apparition d’un tissu conducteur, qui est absent chez les Thallophytes (Champignons, Algues) et chez les Bryophytes ; c’est là une étape phylogénétique extrêmement importante, qui caractérise tout un vaste ensemble de végétaux. Cette acquisition, qui, outre son rôle fondamental de conduction de la sève, joue un rôle de soutien (fibres du bois), favorise l’essor du stade sporophytique ; celui-ci prend alors de grandes dimensions, la phase gamétophytique étant de plus en plus réduite. La reproduction se fait à partir d’organes mâles (anthéridies donnant des anthérozoïdes) et d’organes femelles (archégones produisant des oosphères) qui apparaissent sur les prothalles, ces derniers correspondant à la phase gamétophytique. C’est la dépendance ou l’indépendance de la phase prothallienne vis-à-vis du sporophyte qui permet de définir chez les végétaux vasculaires deux embranchements : celui des Ptéridophytes (Cryptogames vasculaires), où les prothalles, phase gamétophytique sont indépendants du sporophyte, et celui des Spermatophytes (Phanérogames), où les prothalles sont très réduits et enchâssés dans les tissus du sporophyte. En outre, dans ce dernier groupe, les organes sexuels sont entourés de pièces foliaires plus ou moins spécialisées, dont l’ensemble prend le nom de fleur, alors que rien de semblable n’existe chez les Cryptogames vasculaires. Dans les Phanérogames, deux sous-embranchements sont à considérer : les Gymnospermes et les Angiospermes. Le premier est en quelque sorte un groupe intermédiaire entre les Cryptogames vasculaires et les Angiospermes. Chez les Gymnospermes, en effet, le prothalle femelle, quoique parasite du sporophyte, est un peu moins réduit que chez les Angiospermes ; il en est de même du prothalle mâle (grain de pollen).