Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

soutènement (suite)

• Étançon hydraulique. Il est moins lourd (un étançon à friction peut peser plus de 50 kg), plus régulier (la compressibilité de l’étançon à friction dépend de son état d’entretien et de la façon dont il a été mis en serrage), et le début du coulissement se fait sous une charge plus forte, donc s’oppose mieux, dès le début, à l’affaissement du toit ; mais il est nettement plus cher. C’est une sorte de gros vérin composé de deux tubes cylindriques pouvant coulisser l’un dans l’autre ; la mise en serrage se fait par une pompe à piston plongeur incorporée, et il y a une soupape de décharge tarée.

Cependant, le dressage et la mise en serrage des étançons, la mise en place des chapeaux métalliques articulés, leur démontage à l’arrière-taille et leur transport dans la nouvelle allée représentent un travail long et pénible, qui ralentit la progression de la taille ; aussi le temps passé par le personnel pour le soutènement est-il important.

• Soutènement marchant. Ce matériel très coûteux permet des vitesses d’avancement de taille et des rendements inconnus jusqu’alors. C’est un soutènement hydraulique autoripable. Des soupapes reliées à une tuyauterie flexible alimentée en émulsion d’huile soluble dans l’eau sous une pression de 100 à 200 bar permettent à des vérins de réaliser tous les mouvements : desserrage, avancement, mise en serrage. On distingue trois types de soutènement marchant.
— Dans le soutènement par piles, un large châssis de base rigide ou élastique supporte de trois à six étançons hydrauliques de grande force portante, puisqu’on ne craint plus l’enfoncement dans le mur (de 500 à 800 t de portance pour tout le châssis), sur lesquels sont fixés par rotules une plaque ou deux larges chapeaux, dont le porte-à-faux permet le front dégagé ; pour suivre de plus près le dégagement du toit, il peut y avoir en avant un petit chapeau télescopique, ou articulé, pressé contre le toit par un petit vérin. Un vérin horizontal pousse le convoyeur blindé contre le front qui a avancé, puis, la pile étant desserrée, le vérin ripe celle-ci vers la nouvelle position du convoyeur blindé.
— Dans le soutènement par cadres, chaque cadre est composé de deux étançons hydrauliques de grande portance (jusqu’à 200 t) fixés sur une large semelle et reliés rigidement entre eux ; sur chaque étançon est assemblé par rotule un robuste chapeau métallique, relié à l’autre par une articulation ; le chapeau avant présente un important porte-à-faux. Deux (ou trois) cadres placés côte à côte constituent un ensemble ; ils sont reliés entre eux par de courtes bielles, et, grâce à un vérin intercalé, l’un des cadres, qui a été desserré, avance par rapport à l’autre, qui reste en serrage.
— Dans le soutènement par bouclier (ou « soutènement à flèche »), une large et longue pièce oblique (le bouclier) est articulée à sa base sur l’extrémité arrière du châssis ; sur elle s’appuient les premiers éboulis du foudroyage ; cette pièce peut avoir à supporter de 100 à 200 t ; un (ou deux) très puissant étançon hydraulique fait lever la tête de ce bouclier et la presse contre le toit ; sur cette tête est articulée près de son milieu une plaque, appelée flèche, qui soutient sur toute sa longueur le toit.

Comme on souhaite pouvoir commander à distance le soutènement marchant, le type à bouclier paraît être celui qui s’adapte le mieux à cette commande en raison du nombre relativement faible des vérins.

J. A.

➙ Abattage / Exploitation à ciel ouvert et souterraine / Galerie de mine / Risque minier.

Soutine (Chaïm)

Peintre français d’origine lituanienne (Smilovitch, gouvern. de Minsk, 1894 - Paris 1943).


Pour comprendre le choc que la peinture de Soutine produisit dans les esprits lors des débuts de l’artiste en France, il faut la situer dans son contexte historique, à une époque où l’expressionnisme* ignorait encore une telle violence dans la déformation. Cet art est étroitement lié à la révolte interne, aux refoulements du peintre, qui ressentira toute sa vie les blessures de son enfance ; miroir d’un drame intérieur, il est d’autant plus significatif, et ne peut laisser le spectateur indifférent.

Fils d’un modeste tailleur de campagne, Soutine connaîtra une existence des plus difficiles. Chassé de l’école pour insubordination, giflé lorsqu’il dessine des visages sur les murs du village, il prend très tôt la résolution de fuir famille, ghetto et école. Après avoir travaillé à Minsk chez un photographe, il décide, en 1910, de suivre les cours des beaux-arts de Vilna (Vilnious), où il se lie avec Michel Kikoïne (1892-1968) et Pinchus Krémègne (né en 1890), qui vont, comme lui, choisir la France pour y poursuivre leur carrière. En 1913 (ou un peu plus tôt), Soutine réalise son rêve de partir pour Paris. Enfin, il peut voir les œuvres des précurseurs de l’art moderne et surtout celles de Van Gogh*, qui le fascinent. Inscrit à l’atelier Cormon de l’École nationale des beaux-arts, il y retrouve Kikoïne et Krémègne. À la « Ruche », où il a élu domicile, il encontre Chagall*, Léger*, Delaunay*... Mais c’est surtout avec Modigliani* qu’il établit, dès 1915, de solides liens d’amitié, les deux hommes s’étant découvert les mêmes penchants anticonformistes. Modigliani lui ayant présente Leopold Zborowski, son marchand de tableaux, Soutine est pris en charge par ce dernier, qui, en 1918, l’envoie travailler dans le Midi. Des séjours à Vence et à Cagnes précèdent son installation à Céret, dans les Pyrénées Orientales.

Avant son départ de Paris, Soutine s’était déjà orienté vers une expression tumultueuse, mais ses couleurs ternes et ses sujets (cadavres d’animaux) étaient peu engageants. Sous le soleil du Midi, l’homme du Nord a la révélation de la lumière et, avec elle, de la couleur. Sa palette se dore de tons éclatants, voire virulents, à l’image de ses pulsions intérieures. Ses structures semblent emportées dans un tourbillon, secouées par un séisme qui fait vaciller maisons, arbres, ciels, tandis que les visages se tordent sous la grimace. En 1922, le mécène et collectionneur américain Albert C. Barnes, subjugué par l’expression poignante de son art, lui achète un premier lot de vingt-cinq toiles. Du jour au lendemain, Soutine connaît alors l’aisance et le commencement de la gloire.