Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sonate (suite)

Beethoven ainsi a fait oublier parfois injustement les sonates de ses contemporains ; citons celles d’Étienne Nicolas Méhul (1763-1817), Daniel Gottlieb Steibelt (1765-1823), Nicolas Joseph Hüllmandel (1751-1823), Ignaz Pleyel (1757-1831), Muzio Clementi*, François Adrien Boieldieu (1775-1834), Johann Nepomuk Hummel (1778-1837), destinées non seulement au piano, mais au violon, au violoncelle, à la harpe, à la clarinette, parfois à la flûte.

Si le romantisme adopte des formes libres (prélude, impromptu, fantaisie, romance...), la sonate, par l’effort de structure qu’elle impose, a souvent fécondé l’élan créateur des compositeurs. Schubert*, Chopin*, Schumann* (qui use du principe cyclique) utilisent librement ce cadre et élargissent les proportions du développement, que Beethoven souhaitait concis et charpenté. Mendelssohn*, plus rigoureux, prolonge davantage les recherches du maître de Bonn dans sa sonate op. 6 aux parties enchaînées et renoue avec la tradition de la sonate d’orgue. À ses côtés, citons Karl Czerny (1791-1857), mais aussi Louis Spohr (1784-1859), C. M. von Weber* et, en France, Alexandre Pierre François Boëly (1785-1858), dont on remarque la rigueur contrapuntique.

1853 reste une date capitale dans l’histoire de la sonate avec celle de Liszt*, qui renouvelle le cadre dans la filiation de Beethoven. Œuvre d’un seul tenant bâtie sur trois thèmes (et un élément cyclique apparenté au choral) où une structure élaborée soutient lyrisme et virtuosité. Brahms* suit aussi la tradition beethovénienne et cyclique dans ses sonates pour piano, pour violon, et ses remarquables sonates pour violoncelle et piano et pour clarinette et piano. Les sonates de Max Reger* subissent son influence et seront destinées aux mêmes instruments.

Mis à part la sonate pour piano d’Alkan (1813-1888), il faut attendre en France 1876 pour renouer avec la forme. La première sonate pour violon et piano de G. Fauré* ne laisse pas deviner l’austérité tourmentée de la seconde, en 1918, ni des deux sonates pour violoncelle et piano, où le cycle apparaît à travers un même thème, celui de Pénélope, sans cesse repris et renouvelé.

C’est César Franck*, en 1886 (sonate pour piano et violon), qui systématise l’emploi de formules cycliques à travers une construction rigoureuse. Il sera suivi par Guillaume Lekeu (1870-1894) en 1891. Paul Dukas* inaugure le xxe s. avec sa monumentale sonate pour piano (1901), qui mène la forme à un apogée.

Comme en France avec Camille Saint-Saëns*, Vincent d’Indy*, Guy Ropartz (1864-1955), Albert Roussel*, Louis Vierne*, la sonate connaît un renouveau à l’étranger et se trouve marquée par les tendances nationales — A. Dvořák*, L. Janáček* — et les recherches d’écriture nouvelles : Aleksandr Nikolaïevitch Skriabine (1872-1915), Frank Martin*, Charles Ives*. Zoltán Kodály*, en 1915, consacre une importante sonate au violoncelle seul.

Debussy* n’écrivit que trois des six sonates qu’il projetait. Cursives, elles adoptent des formes libres : Prologue, Sérénade, Pastorale, Interlude, qui renouent avec l’esprit du xviiie s. Ravel*, après le dépouillement de la sonate pour violon et violoncelle (1922) et sa rigueur contrapuntique, introduit le jazz avec humour dans celle qu’il écrit pour piano et violon (1927).

Hindemith* et Prokofiev* abordent la sonate dans un esprit néo-classique. Le premier écrit un nombre important de sonates pour les instruments les plus divers. Citons celles qui sont sans accompagnement pour violon, alto, violoncelle ; celles qui sont écrites pour viole d’amour, trombone... Prokofiev donne à la forme des proportions plus monumentales à travers neuf sonates pour piano, des sonates pour violon, violoncelle et une sonate pour violon seul.

Bartók*, dès ses deux sonates pour violon et sa sonate pour piano (1926), introduit des recherches rythmiques très nouvelles, développées plus encore dans la sonate pour deux pianos et percussion (1937) aux timbres subtils, dont il donnera une version orchestrale (concerto pour deux pianos). En 1944, la sonate pour violon seul, bâtie sur des moules classiques (chaconne, fugue), pousse à l’extrême les limites instrumentales.

Après Bartók, la sonate demeure un cadre où s’intègrent les compositeurs les plus avancés : en 1945, c’est la sonate pour piano de Jolivet*, disciple de Varèse*, et en 1947-48 une floraison d’œuvres capitales sous la plume de Dutilleux*, Boulez*, Barraqué* et Cage* (piano préparé). Ils perpétuent et conduisent en des horizons nouveaux un des cadres les plus universels du langage musical.

Il faut en effet préciser que la sonate en tant que forme a envahi la musique instrumentale à travers la musique de chambre (trio, quatuor, quintette), le concerto, la symphonie et l’ouverture.

La sonatine

Le terme de sonatine apparaît à la fin du xviie s. chez Johann Rosenmüller (1619-1684), Johann Heinrich Schmelzer (v. 1623-1680) et correspond en France à celui de sonatille (Jacques Aubert [1689-1753]).

Au xviiie s., il désigne une petite sonate de style léger (Telemann, Händel), mais C. P. E. Bach écrit des sonatines pour deux clavecins concertants et grand orchestre qui s’apparentent à la symphonie. Après Clementi, Beethoven et Schubert, on est surpris de voir la forme illustrée par Max Reger.

Le xxe s. nous livre sous ce titre d’apparence modeste des œuvres remarquables signées par Ravel, Busoni, Roussel, Milhaud, Dutilleux, Hindemith et Bartók.

M. R.

 E. Borrel, la Sonate (Larousse, 1951). / W. S. Newman, The Sonata in the Baroque Era (Chapell Hill, N. C., 1959 ; 2e éd., 1966).

sondage

Méthode d’enquête portant sur un échantillon — groupe d’individus ou d’unités statistiques prélevé dans un ensemble plus important, ou population — et destinée à recueillir les informations nécessaires pour estimer certaines caractéristiques de la distribution d’un ou de plusieurs caractères dans cette population ou dans cet ensemble, soit pour décrire cette distribution, soit pour servir de base à une décision ou à une action sur les mécanismes qui engendrent cet ensemble.