Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sol (suite)

Fonctions de l’humus

Quoi qu’il en soit et quel que soit son mode de formation, l’humus va, dans une large mesure, se complexer avec les argiles (ou les carbonates) pour donner le complexe argilo-humique, qui joue un si grand rôle régulateur dans la vie du sol. Ce complexe augmente la capacité de rétention d’eau du sol et, par ses chaînons polyosidiques surtout, est le facteur essentiel de la formation des « agrégats », qui, par les pores (micro- et macropores) qui se ménagent entre eux, assurent la tenue du sol et son aération.

L’humus apparaît ainsi comme le facteur majeur de la conservation des sols.

Enfin, cette grosse molécule est difficilement attaquable par les microorganismes : aussi aura-t-elle tendance à s’accumuler dans le sol, tout au moins sous les climats tempérés et froids ; cependant, sa lente minéralisation par la microflore « autochtone » va libérer très progressivement les éléments minéraux qui lui sont liés, assurant ainsi, dans les conditions écologiques naturelles, la nutrition de la végétation spontanée (herbacée ou forestière) ; elle libère également de petites molécules glucidiques et azotées que l’on sait maintenant être utilisées également par la plante (véritable « nutrition complémentaire »).


Les grands types d’humus

Il faut préciser de nouveau qu’il n’y a pas « un » humus, mais de nombreux types, à propriétés fort différentes, en fonction des types de végétation, du climat et du profil pédologique (v. plus loin).


Techniques modernes d’étude de l’humus

Tels sont, sommairement exposés, les caractères des substances humiques intéressant essentiellement l’agronomie. Il est, néanmoins, indispensable de dire un mot des recherches biochimiques et chimiques, qui ont fait de grands progrès depuis la mise au point des techniques modernes : radio-isotopes (lignine marquée 14 C) ; fractionnement par solubilité ou précipitation en milieux acides ou alcalins ; détermination des groupements carboxyliques libres, des groupements —OH phénoliques des différentes fractions précédentes (permettant de différencier acides humiques — eux-mêmes subdivisés en « bruns et gris », ou encore en α, β, γ humus —, acides fulviques, humines...) ; études spectroscopiques, dont la plus intéressante est celle qui est réalisée en infrarouge ; fractionnement en fonction des grosseurs moléculaires par passage sur gel de Séphadex ; électrophorèse ; enfin chromatographie sur papier, après hydrolyse (6 NHCl) pendant dix-huit heures à 100 °C, des fractions les plus polymérisées et les plus résistantes (humines).

Il faut retenir de ces travaux ce qui peut intéresser l’agronomie : temps de rémanence moyen de l’humus (équilibre synthèse-dégradation) ; action de l’humus sur l’agrégation des sols (liée à son degré de polymérisation) et ses liaisons avec les argiles (complexe argilo-humique déjà signalé) ainsi qu’avec les anions et les cations, pouvant « séquestrer » ceux-ci (Fe++, Cu++, PO4 etc.).

Ainsi, ce que l’on appelle humus couvre un ensemble de substances de nature et d’origine très diverses, qui joue un rôle capital dans la vie, la fertilité et la conservation des sols.

L’eau et le sol

L’eau du sol se présente sous diverses formes.

• L’eau de gravité remplit plus ou moins (suivant le degré de saturation) tous les interstices laissés i libres entre les différentes particules ; solides. Lorsqu’elle est abondante, elle entraîne la constitution d’un milieu asphyxique peu favorable à la vie (vase des marais).

• L’eau de capillarité est retenue entre les particules fines dans les espaces étroits du sol ou constitue à la surface de ces mêmes particules un mince film d’eau maintenu par la tension capillaire.

• Les eaux d’imbibition et d’absorption sont fixées aux complexes argilo-humiques.

• L’eau combinée est engagée dans des substances chimiques.

• Enfin, de l’eau à l’état de vapeur subsiste dans les intervalles remplis d’air dans les sols très secs.

L’eau disponible est essentiellement constituée par l’eau de capillarité et par une partie de l’eau d’imbibition ; les autres formes ne sont pas utilisables par les végétaux, qui fanent lorsqu’ils n’ont pas d’autre ravitaillement. L’eau disponible est maintenue au sol par diverses forces de rétention, que le végétal doit vaincre pour attirer l’eau dans ses cellules.

J.-M. T. et F. T.

J. P. et H. F.


Le profil pédologique

La genèse d’un sol tend à faire apparaître des horizons superposés dont l’ensemble constitue un profil. Ces horizons sont d’autant mieux individualisés que le sol est plus évolué. Outre sa couleur, définie à l’aide d’un code international, chaque horizon peut être caractérisé par ses éléments constitutifs, sa texture, sa structure, ses propriétés chimiques et le type d’humus.

• Les éléments constitutifs. Les sols sont formés essentiellement de matières minérales, auxquelles se mêlent, en proportion variable suivant les horizons, des matières organiques provenant de la décomposition des débris végétaux (humus, au sens large). La phase minérale comprend des minéraux non altérés, résultant de la désagrégation de la roche mère, et des minéraux altérés, en majorité des argiles, qui constituent le complexe d’altération.

• La texture. C’est la dimension des éléments constitutifs. La fraction grossière consiste en limons et en sables, éventuellement en graviers et en cailloux ; dans les horizons superficiels, elle peut aussi comporter des débris végétaux non encore décomposés. La fraction fine est formée des colloïdes minéraux et humiques (taille inférieure à 2μ).

• La structure. Il s’agit de la manière dont les éléments sont groupés. Elle est liée à l’état des colloïdes : s’ils restent dispersés, la structure est particulaire, meuble quand ils sont grossiers, massive quand ils sont fins (sols compacts). Mais, s’ils floculent, ils forment des agrégats qui peuvent cimenter des particules grossières et constituer des grumeaux, des polyèdres, des prismes... Texture et structure déterminent la porosité, qui a des conséquences essentielles sur la vie dans le sol : les sols à structure particulaire sont mal aérés et, s’ils sont compacts, ils peuvent même être asphyxiants. En revanche, plus la teneur en éléments fins est élevée, plus le sol retient d’eau ; mais celle-ci n’est pas entièrement disponible pour les plantes, car, au-delà d’un seuil, appelé point de flétrissement permanent, les forces de rétention exercées par les particules du sol excèdent la force de succion des racines.