Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Sin-kiang (suite)

La mise en valeur récente

La conquête des terres arides du Xinjiang, avec la mise en valeur des ressources industrielles, est un des grands aspects de l’aménagement de l’espace chinois entrepris depuis 1949.

Il y aurait actuellement plus de 3 000 000 d’hectares de terres irriguées au Xinjiang (900 000 ha en 1949) ; il s’agit, outre l’extension de l’irrigation dans les oasis du Tarim, de la création de nouvelles terres agricoles par l’implantation de fermes d’État (220 en 1961) et surtout par les soins du « Corps de production et de construction » de l’Armée populaire. Ces fronts pionniers agricoles se situent essentiellement sur le piémont méridional des Tianshan, près de Kouldja (Yining), dans la vallée de l’Yili, et surtout sur le bassin de la rivière Manasi, au nord des Tianshan, où les nouvelles terres irriguées sont consacrées au blé, au coton et à la betterave à sucre.

Ce n’est qu’à partir de 1950 qu’a été entreprise, avec l’aide soviétique, l’exploration de l’ensemble des ressources industrielles du Xinjiang. Il s’agit notamment d’or et d’uranium dans la haute vallée de l’Irtych (Altaï), de cuivre, de plomb, de zinc, de tungstène dans la partie orientale des Tianshan, de charbon, dont les réserves seraient très importantes, mais qui ne fait jusque-là, semble-t-il, l’objet d’une exploitation notable que dans le bassin de Hami, à l’est des Tianshan, et à Liutaowan (Lieou-t’ao-wan), près d’Ouroumtsi.

La découverte la plus importante fut celle du pétrole. Un petit gisement était exploité par les Russes depuis 1938 à Dushanzi (Tou-chan-tseu), à 200 km à l’ouest d’Ouroumtsi et où fut construite une première raffinerie ; en 1955, un important gisement (peut-être 300 Mt de réserves) était découvert à quelque 120 km au nord, auquel on donna le nom de Karamai (« huile noire » en ouïgour). Mis en exploitation à partir de 1958, il doit fournir 4 Mt annuelles, acheminées par pipe-line à Dushanzi qui est dotée depuis 1959 d’une seconde raffinerie.

Parallèlement, l’industrialisation a gagné les antiques cités des oasis du Xinjiang, et notamment : Hami, à l’est (plus de 50 000 hab.), dotée d’une petite aciérie ; Kachgar (en chinois Kashi), à l’ouest du bassin du Tarim, la principale ville du Xinjiang méridional (plus de 150 000 hab.), important centre textile (coton, soie) ; Kouldja (en chinois Yining), dans la vallée de l’Yili (plus de 200 000 hab., seconde ville du Xinjiang), où les industries métallurgiques et textiles complètent les activités traditionnelles (cuir, tabac).

Ouroumtsi (en chinois Wulumuqi), la capitale, est située au débouché de la grande passe transversale qui assure la liaison, à travers les Tianshan, entre le sud et le nord du Xinjiang ; reliée depuis 1959, par Lanzhou (Lan-tcheou), au réseau ferré de la Chine orientale, la ville a connu un développement remarquable dont témoigne l’évolution démographique : 90 000 habitants en 1949, 320 000 en 1958 et plus de 500 000 actuellement. Le charbon de Liutaowan et le minerai de fer exploité à l’est des Tianshan y alimentent la première unité sidérurgique du Xinjiang ; des filatures de coton, des usines de matériel agricole et de matériel minier y ont été également implantées depuis une dizaine d’années.

Cette mise en valeur récente du Xinjiang s’accompagne d’une politique active de peuplement par des immigrants chinois ; ainsi, la population du Xinjiang atteindrait actuellement 10 000 000 d’habitants ; les Chinois y tiendraient alors désormais une place aussi importante que les Ouïgours, mais ils seraient essentiellement concentrés au nord des Tianshan.

P. T.

Sinn Féin

Mouvement nationaliste irlandais, qui tire son nom de deux mots gaéliques signifiant « nous-mêmes » (en y incluant l’idée « nous seuls »).


Le mouvement a connu dans son histoire trois phases bien distinctes. Il apparaît en 1902, lorsque le journaliste Arthur Griffith (1872-1922), qui dirige depuis 1899 le journal United Irishman, met sur pied un parti rêvant d’une Irlande autonome et inspiré par la tactique du mouvement national hongrois. Convaincu que la puissance militaire de la Grande-Bretagne rend tout soulèvement impossible, Griffith prêche une forme de résistance passive ; pour le Sinn Féin, l’Acte d’union de 1800 est illégal ; par conséquent, les députés irlandais doivent cesser de siéger à Westminster, et il faut constituer un Parlement national, le « Conseil des Trois Cents », formé des conseillers régionaux et municipaux élus en Irlande. Ce gouvernement irlandais parallèle, ignorant les Britanniques, s’appuierait sur une économie nationale fonctionnant selon un système d’autarcie. C’est la phase modérée du Sinn Féin, dont les tendances correspondent aux vues de beaucoup de bourgeois patriotes opposés à la violence et fort conservateurs sur le plan social. Toutefois, on note une certaine évolution vers des positions plus radicales dans les années qui précèdent 1914.

En 1916-17 commence la seconde période de l’histoire du Sinn Féin. En quelques mois, celui-ci se transforme à la fois en mouvement avancé et en mouvement de masse. En lui se rassemblent partisans de l’indépendance et partisans de la république. Ainsi va-t-il être à l’origine directe de la naissance de l’Éire. Ce tournant décisif découle du soulèvement de Pâques 1916, qui éclate à Dublin et qui bouleverse la situation politique. Bien que le Sinn Féin, en tant que tel, n’ait point pris part à l’insurrection, il en recueille le bénéfice. En effet, la dureté de la répression menée par les autorités britanniques a retourné complètement l’opinion irlandaise, et celle-ci, se détachant des nationalistes modérés, partisans du Home Rule, se rallie au Sinn Féin, où se retrouvent tous les adversaires de la domination britannique, qui ne voient d’espoir que dans l’indépendance. En octobre 1917, lors de son congrès, le parti se réorganise. Les nationalistes avancés en prennent la tête : tandis qu’à tous les échelons les républicains remplacent les modérés aux leviers de commande, Eamon De Valera* succède à Griffith comme leader. Plusieurs succès marquants à des élections partielles insufflent la confiance, et, lorsque le gouvernement anglais veut imposer la conscription au printemps 1918, l’opposition acharnée du Sinn Féin traduit le refus unanime d’un pays. La répression (arrestation des leaders, interdiction du parti) ne fait que renforcer la popularité du mouvement, et les élections de décembre 1918 se traduisent par une éclatante victoire du Sinn Féin, qui remporte 73 sièges contre seulement 6 aux nationalistes modérés, les home rulers (les unionistes obtiennent de leur côté 23 sièges ulstériens et 3 dans le Sud). Désormais, toutes les forces vives du nationalisme basculent derrière le Sinn Féin, si bien que celui-ci peut, à bon droit, se targuer de représenter la majorité des Irlandais.