Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Sicile (suite)

➙ Anjou / Aragon / Carthage / Espagne / Frédéric II de Hohenstaufen / Grèce / Grèce d’Occident / Italie / Naples / Phéniciens / Puniques (guerres) / Pyrrhos / Rome / Syracuse.

 M. Amari, Storia dei musulmani di Sicilia (Florence, 1854-1872 ; nouv. éd., Catane, 1933-1939 ; 5 vol.). / E. A. Freeman, The History of Sicily from the Earliest Times (Oxford, 1891-1894 ; 4 vol.). / E. Pais, Storia della Sicilia e della Magna Grecia (Turin, 1894). / F. Chalandon, Histoire de la domination normande en Italie et en Sicile (A. Picart, 1907 ; 2 vol.). / E. Jordan, les Origines de la domination angevine en Italie (A. Picard, 1909). / W. Cohn, Das Zeitalter der Hohenstaufen in Sizilien (Breslau, 1925). / J. Bayet, la Sicile grecque (les Belles Lettres, 1931). / L. Natoli, Storia di Sicilia (Palerme, 1935). / B. Pace, Arte e civiltà della Sicilia antica (Milan et Rome, 1935-1949 ; 4 vol.). / V. Epifanio, Gli Angioini di Napoli e la Sicilia (Napoli, 1936). / J. Bérard, la Colonisation grecque de l’Italie méridionale et de la Sicile dans l’Antiquité, l’histoire et la légende (De Boccard, 1941 ; nouv. éd., P. U. F., 1957). / T. J. Dunbadin, The Western Greeks (Oxford, 1948 ; nouv. éd., 1968). / F. de Stefano, Storia della Sicilia dal secolo xi al xix (Bari, 1948). / F. Braudel, la Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II (A. Colin, 1949 ; 2e éd., 1967, 2 vol.). / M. Vaussard, Histoire de l’Italie contemporaine (Hachette, 1950). / G. Faure, En Sicile (Arthaud, 1952). / P. Alatri, Lotte politiche in Sicilia sotto il governo della destra, 1866-1874 (Turin, 1954). / E. G. Leonard, les Angevins de Naples (P. U. F., 1954). / F. Villard, la Sicile grecque (Girodias, 1956). / H. Tuzet, la Sicile au xviiie siècle, vue par les voyageurs étrangers (Heitz, Strasbourg, 1956). / J. Hure, Histoire de la Sicile (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1957 ; 2e éd., 1965). / A. T’Serstevens, Sicile, Éoliennes, Sardaigne, itinéraires italiens (Arthaud, 1958). / L. Pareti et P. Griffo, La Sicilia antica (Gênes, 1959 ; trad. fr. la Sicile antique, Hachette, 1960). / M. Brandon-Albini, Sicile secrète (Horizons de France, 1960) ; la Sicile et son univers (Hachette, 1972). / A. G. Woodhead, The Greeks in the West (Londres, 1962). / J. Boardman, The Greek Overseas (Harmondsworth, 1964). / P. Lévêque, la Sicile (P. U. F., 1967). / E. Laloy, la Révolte de Messine (Klincksieck, 1968 ; 3 vol.). / D. Roussel, les Siciliens entre les Romains et les Carthaginois à l’époque de la Première Guerre punique (Les Belles Lettres, 1971).


L’art en Sicile

Située à l’articulation des deux grands bassins de la Méditerranée, la Sicile garde dans ses monuments le souvenir des grandes civilisations qui s’y sont épanouies successivement.


La période grecque

Des cités nées de la colonisation hellénique, il nous reste des temples de style dorique, analogues à ceux de la Grèce*, mais construits en pierre — non en marbre — et souvent plus vastes : ainsi les temples ruinés de Sélinonte, de diverses époques, principalement du vie s. av. J.-C. ; celui d’Athéna, à Syracuse, transformé en cathédrale ; ceux d’Agrigente, connus sous les noms fictifs de temple d’Hercule, de Junon, de la Concorde, etc., ce dernier particulièrement bien conservé et faisant admirer l’équilibre classique des constructions du ve s., comme celui de Ségeste, d’aspect plus grandiose, où l’on croit pouvoir reconnaître un sanctuaire à ciel ouvert. Parmi les temples du ve s., celui de Zeus, à Agrigente, se distinguait par ses dimensions colossales et le goût baroque de ses atlantes sculptés (en partie au musée d’Agrigente). D’ailleurs, d’une façon générale, la sculpture jouait un rôle important dans les temples siciliens. Le musée archéologique de Palerme a recueilli des morceaux de style vigoureux : les quatre séries de métopes provenant du temple de Ségeste, reflet de l’évolution de la sculpture depuis l’époque archaïque jusqu’à l’épanouissement classique du ve s. ; les têtes de lions ayant servi de gargouilles au temple d’Himère. Des figures modelées en terre cuite ornaient souvent métopes et frontons, formaient les acrotères aux angles et au faîte du toit (musée de Syracuse). On connaît aussi des statues isolées.

On doit à la civilisation grecque plusieurs théâtres, aux gradins taillés dans le roc : celui de Syracuse, le plus important ; ceux de Taormina, de Palazzolo Acreide, de Ségeste. Chef-d’œuvre militaire, le château Euryale, près de Syracuse, a été élevé au ve s. par le tyran Denys l’Ancien.

Le décor de la vie profane ou religieuse a fait prospérer l’industrie des figurines votives moulées en terre cuite, la céramique, dont l’évolution reflète celle de la céramique grecque, et l’art des monnaies, dans lequel Syracuse a atteint la perfection.


La période romaine

La civilisation hellénique dut s’adapter aux goûts et à l’édilité des Romains. Les théâtres furent souvent transformés pour accueillir les nouveaux spectacles : ainsi celui de Taormina reçut au iie s. apr. J.-C. un grand mur de scène habillé de colonnes. Celui de Tyndare voisine avec une basilique à nef voûtée et des vestiges d’habitations, comme en offre aussi le site de Solunte. Syracuse et Catane ont gardé l’essentiel de leurs amphithéâtres. Plus tardive (iiie-ive s.) est la vaste villa de Casale, près de Piazza Armerina, ensemble complexe de cours, de salles, de portiques et de corridors aux sols revêtus de somptueuses mosaïques que la stylisation un peu brutale du dessin et l’intensité des tons apparentent à celles de l’Afrique romaine ; on y trouve des sujets mythologiques, des chasses ou encore des divertissements tels qu’une sorte de jeu de tennis auquel se livrent des jeunes filles en « bikini ».


La Sicile normande

La domination de l’empire d’Orient n’a rien laissé sur le sol de l’île. De la période arabe, on ne voit que d’humbles vestiges. Mais la tradition musulmane entre pour une large part, avec l’influence byzantine et celle de l’Europe romane, dans la synthèse originale et brillante qui caractérise l’art sicilien du temps de la monarchie normande. L’élément arabe se reconnaît dans le tracé des arcs brisés et entrelacés, dans les ouvrages de charpente et de menuiserie, dans la polychromie des surfaces extérieures où jouent les tons de la brique, du calcaire et de la lave, enfin dans la construction de coupoles dont la calotte est visible au dehors. Transmis par les monastères bénédictins de l’Italie du Sud, l’apport de l’Occident apparaît dans la structure des plus grandes églises, dans le dessin des campaniles à baies superposées, dans les colonnades des cloîtres ; il est prépondérant dans la sculpture. L’influence byzantine, enfin, sensible dans le choix fréquent de plans centrés, inspire surtout la richesse souvent féerique de la décoration intérieure. Aux marbres diversement colorés qui composent les dallages, revêtent la zone inférieure des parois, et dans lesquels sont taillées les colonnes avec leurs chapiteaux, répondent les mosaïques qui généralement tapissent les parties hautes. Par l’époque et le style, les mosaïques siciliennes se rattachent à celles du second âge d’or byzantin, après la crise iconoclaste ; on les doit d’ailleurs à des artistes venus de Grèce ou de Constantinople, ou au moins à des autochtones formés par eux. Comme en Orient, elles déroulent les épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testament en vastes cycles soumis à un ordre à peu près fixe et font apparaître à la conque de l’abside ou sous la coupole principale la figure majestueuse du Christ Pantocrator.