Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Athos (mont) (suite)

Dépendances des monastères souverains, les skites se présentent sous la forme soit de monastères (Saint-André [russe] à Karyaí ; Prodhrómou [roumain]), soit d’agglomérations monastiques villageoises ayant un centre commun avec place publique, kyriakón (katholikon), réfectoire, hôtellerie. D’autres annexes des monastères sont constituées par les cellules, ou kathismata (hameaux monastiques isolés), et les ermitages.

Des édifices les plus anciens, il ne reste que le Protáton, église principale de la communauté à Karyaí (chef-lieu de la république monastique), de forme basilicale (ixe s.), et les katholika de Lávras (v. 1000), de Vatopedhíou (xie s.) et d’Ivíron (1000), ainsi que des fragments sculptés. Les autres édifices sont du xiiie s. (Khiliandharíou), du xvie s. et même du xxe s. La plupart des katholika appartiennent à un type spécial athonite (d’origine thessalonicienne) d’église en croix inscrite avec adjonction d’une salle, la liti (entre naos et narthex), et d’absides latérales. Le tout est surmonté d’une coupole centrale et d’un ensemble de calottes, de petites coupoles et de voûtes. La décoration extérieure est obtenue par le jeu des éléments constructifs, par la peinture rouge ou encore par un décor de céramique et de faïence. À l’intérieur des plus anciens édifices existent de beaux dallages de marbre et de mosaïque, ainsi que des placages de marbre et, plus tard, de faïence sur les murs.

Rien ne nous est conservé de la décoration figurée des églises et des ensembles monastiques avant les xie-xiie s.


Les mosaïques

Au monastère de Vatopedhíou, deux panneaux du xie s., un du xiie s. et deux compositions (Annonciation et Saint Nicolas) des xiiie-xive s., au Xenofóndos, deux panneaux (Saint Georges et Saint Dhimítrios) de l’époque des Paléologues sont tout ce qui subsiste.


Les fresques

Il reste quelques fragments du xiie s. à Vatopedhíou et à Ravdhoúkhou. Mais c’est surtout l’époque des Paléologues qui est bien représentée : au xiiie s. par les peintures de deux chapelles à Khiliandharíou et surtout au xive s., époque de grande activité. Trois ensembles du début de ce xive s. nous sont conservés : les peintures du Protáton à Karyaí, qui sont l’œuvre, selon la tradition, du grand peintre de Thessalonique Manouíl Pansélinos et qui ont été récemment restaurées (réalisme, mouvement, vérité intime, fraîcheur de couleurs) ; les fresques du katholikon de Khiliandharíou (serbe) du temps de Miloutine (1300), repeintes et pas encore restaurées (figures élégantes et élancées) ; celles de Vatopedhíou, dont une petite partie reste intacte. Il existe encore quelques restes au Pandokrátoros, et des fragments à Lávras. Ces peintures du xive s. comptent parmi les meilleures réalisations de l’art des Paléologues rattachées au centre de Thessalonique.

Le xvie siècle marque profondément la peinture du mont Athos avec l’affirmation de l’école dite « crétoise » (d’après le lieu d’origine de la plupart des peintres). Cette école continue la peinture des Paléologues, mais sans la même recherche d’élégance : elle est plus sobre et réservée, plus ascétique, équilibrée et adaptée à l’architecture, avec des formes nettement modelées. Elle est assez ouverte aux influences occidentales. Dans les conditions spéciales de l’Athos, avec les grandes surfaces à décorer, l’élan créateur des peintres crétois s’est exercé sous l’influence, aussi, des grands ensembles laissés par le xive s. On peut donc parler d’un art crétois-athonite. Cependant, comme aux époques précédentes, l’Athos n’est pas un centre artistique autonome, mais un lieu de passage, un lieu de rencontre des artistes. Le mont Athos conserve seize grands ensembles de l’école crétoise, datés de 1535 à 1560. Le moine Théophane, son chef de file, décora le katholikon de Lávras (1535) et le katholikon de Stavronikíta (1546), un autre Théophane le narthex de Xenofóndos (1563), Zorzi le katholikon de Dhionyssíou (1547), Antoine celui de Xenofóndos (1544). Frángos Katellános, le seul qui ne fût pas Crétois, décora à Lávras la chapelle Saint-Nicolas (1560), y pratiquant un art proche des Crétois.

D’autres ensembles imitant l’art de Théophane ont été peints au xviie s. et pendant une partie du xviiie. Mais vers le début du xviiie s. se dessine un mouvement de retour vers les modèles anciens, dont le représentant le plus connu, et non le plus doué, est Dhionýssios de Fourná (1670-1746), auteur d’un fameux Guide de la peinture. Plusieurs fresques de cette époque nous sont conservées dans des chapelles et des annexes. Les peintres ne viennent plus de Crète, mais d’Épire et de Macédoine notamment. Après le milieu du xviiie s., la peinture athonite porte l’empreinte du baroque populaire et naïf qui, souvent, n’est pas sans qualité (par exemple, le peintre bulgare Zaharij Zograf [1810-1853], qui peint vers 1850 l’exonarthex de Lávras).


Les autres richesses artistiques

Les icônes (du xive au xxe s.) suivent les mêmes tendances et sont dues aux mêmes auteurs. Les trésors, églises et chapelles renferment de nombreux objets de luxe (calices des viiie-xe s., ivoires, revêtements d’icônes, broderies), dons des empereurs de Byzance, des princes serbes et roumains, des tsars de Russie. Les bibliothèques gardent des manuscrits anciens (du viiie au xve s.), souvent illustrés, des chrysobulles et des livres rares. Les meubles de bois sculptés (iconostases, trônes, stalles, lustres, etc.) sont, pour la plupart, du xviiie s. Enfin, des gravures populaires ont été produites au mont Athos pendant les xviiie et xixe s.

M. G.

 H. Brockhaus, Die Kunst in den Athos Klöstern (Leipzig, 1891 ; 2e éd., 1924). / N. P. Kondakov, Monuments de l’art chrétien de l’Athos (en russe, Saint-Pétersbourg, 1902). / G. Smyrnakis, la Sainte Montagne (en grec, Athènes, 1903). / G. Millet, Monuments de l’Athos (E. Leroux, 1927). / F. Dölger, Mönchsland Athos (Munich, 1943). / J. Lacarrière, Mont Athos, montagne sainte (Seghers, 1955) ; l’Été grec (Plon, 1976). / J. Decareaux, Une République de moines (Fayard, 1956). / D. Théoklitos, Entre la terre et le ciel, le monachisme hagiorite (en grec, Athènes, 1956). / « L’Athos et le monachisme orthodoxe », numéro spécial de Contacts (1960). / P. Sherrard, Athos, the Mountain of Silence (Londres, 1960). / J. Biès, Mont Athos (Itinéraires) [A. Michel, 1963]. / Le Millénaire du mont Athos (963-1963). / Études et mélanges (Monastère de Chèvetogne, 1964 ; 2 vol.). / P. Lemerle et coll., Actes de Lavra, t. I : Des origines à 1204 (Lethielleux, 1971).