Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Roumanie (suite)

Les rivières, qui servaient au flottage des bois, commencent à être exploitées en vue de la production électrique : les centrales en escalier de la rivière moldave Bistriţa (barrage de Bicaz), celles qui sont en construction sur les affluents du Danube, l’Argeş ou le Lotru, et bien d’autres de capacité moyenne doivent élever sensiblement le pourcentage encore faible d’énergie hydraulique (de 8 à 10 TWh sur 45, même en comptabilisant la production des Portes de Fer, qui représente environ 5 TWh). Enfin, cette montagne s’ouvre au tourisme malgré son éloignement de l’Europe occidentale.

La Podgoria (« pays situé au pied de la montagne ») forme les Précarpates ou les Subcarpates. Elle est constituée de collines découpées dans des dépôts tendres de piémont, très défrichées, peuplées de gros villages enfouis dans les vergers de pruniers — qui donnent l’eau-de-vie nationale, la ţuică —, et offrant surtout, au-dessus de la Moldavie et de l’Olténie, de beaux vignobles. La Podgoria fut souvent abri et refuge, par exemple au cours de la dernière guerre, et a maintenu de fortes densités de population agricole et artisanale qui ont conservé les coutumes roumaines. Elle reste jalonnée de villes et de gros bourgs de contact.


Les plateaux

Ils ne dépassent pas 600 m d’altitude, et se présentent de chaque côté de la chaîne. Le plateau transylvain est formé d’une série de niveaux d’aplanissement et d’une cuvette sédimentaire renfermant des diapirs et des dômes, d’où sont extraits le sel et surtout le méthane, dont la production place la Roumanie au premier rang en Europe orientale (U. R. S. S. exclue). Lorsque les grands affluents de la Tisza, le Mureş, et le Someş, découpent en aval le plateau en larges vallées, on parle de la « plaine » de Transylvanie.

Le plateau moldave est une table couverte d’épais dépôts pliocènes, peu dérangés, découpés par les affluents du Siret et du Prut. C’est un pays de forêts défrichées, densément peuplées de gros villages.

La Dobroudja* (Dobrogea) est une table entre Danube et mer Noire, présentant au nord, sous la forme de chicots, les formations les plus anciennes de la Roumanie, au sud un plateau monotone, resté longtemps terre de pâturages extensifs, et qui, de nos jours, découpé en vastes exploitations d’État, est le véritable grenier de la Roumanie.


Les plaines

Elles sont également des greniers et se distinguent non seulement par leur position, mais également par leur réseau hydrographique et l’extension récente de leur mise en valeur. Celles de la Tisza (Tisa), formant la majeure partie du Banat roumain, sont de profonds golfes de la plaine pannonienne : cônes de déjections, terrasses, rubans alluviaux ou zones marécageuses ou salines rappellent les rebords de la Grande Plaine hongroise.

La plaine roumaine correspond aux régions les plus basses à l’est des Carpates : l’Olténie, les galeries humides des affluents du Danube et la plaine alluviale de celui-ci, appelée balta, forment des zones inondables, mais également propices à l’irrigation. En Valachie et en Moldavie, certaines plaines connaissent un climat à tendances steppiques. Les terres noires apparaissent au nord de la Moldavie et le Bărăgan, ancienne steppe à chardons, est morcelé en grands domaines d’État.

Enfin, la Roumanie occupe les quatre cinquièmes du plus vaste delta d’Europe, celui du Danube*, un des ensembles les plus isolés, les plus sauvages d’Europe, encore peuplé par les Lipovans, vieux-croyants russes qui avaient trouvé refuge dans des terres dont la majeure partie sont submersibles. Le delta est devenu un laboratoire d’aménagement du milieu naturel, avec la station et la ville nouvelle de Maliuc, sur le bras de Sulina. On a prévu des réserves naturelles ou touristiques protégées, des espaces consacrés à une agriculture spéciale, l’industrialisation de la pêche et surtout la récolte, par des moissonneuses géantes, des roseaux, effectuée au printemps et transportée par barges spéciales jusqu’au combinat de cellulose de Brăila. La navigation nouvelle qui doit alimenter le combinat de Galaţi est susceptible d’entraîner d’autres modifications.

A. B.


L’histoire


Les origines

Le territoire de la Roumanie conserve de nombreux vestiges archéologiques datant du Paléolithique (1 000 000-10 000 av. J.-C.), à Bugiuleşti (en Olténie), dans la vallée du Dîrjov (département de l’Olt), ainsi que du Néolithique (5 500-2 500 av. J.-C.), époque durant laquelle se constituent les grands groupes culturels de Boian-Gumelniţa, de Cucuteni-Ariuşd, de Hamangia, etc.

À la fin du IIIe millénaire av. J.-C. et au début du IIe a lieu l’expansion des Indo-Européens avec leur établissement dans l’espace carpato-balkanique ; durant cette même période se produit le processus de désagrégation des vieilles cultures néolithiques, les tribus thraciques installées dans la péninsule balkanique contribuant au développement de la civilisation du bronze (IIe millénaire av. J.-C.).

À l’âge du fer (Ier millénaire av. J.-C.) s’effectue au sein du groupe thrace la délimitation ethnique et linguistique des populations connues dans la tradition historique écrite sous le nom de Géto-Daces (les Gètes et les Daces constituent en fait un même peuple et aux deux dénominations sous lesquelles celui-ci apparaît dans certaines sources ne correspond qu’une différence d’ordre régional).

Dans le développement de leur culture matérielle et spirituelle, les Géto-Daces assimilent des influences scythiques, thraciques (du Sud), grecques (par l’entremise des colonies établies sur le littoral de la mer Noire : Histria, Callatis, Tomis) et celtiques. Au ier s. av. J.-C., sous Burebista (v. 70-44 av. J.-C.), sont posées les bases de l’État esclavagiste dace, connu dans l’histoire sous le nom de Dacie* (qui s’étend approximativement sur l’actuel territoire de la Roumanie). Démembré après la mort de Burebista, l’État dace est consolidé de nouveau par la suite et parvient à l’apogée de sa puissance économique, politique et militaire sous le règne de Décébale (87-106 apr. J.-C.). Les tentatives de l’Empire romain en vue d’établir une frontière sur le bas Danube provoquent de fréquents conflits entre les Daces et les Romains, conflits qui aboutissent aux deux guerres (101-102 et 105-106) menées par l’empereur Trajan* en Dacie, à l’écroulement de l’État dace et à la transformation de la Dacie en province romaine (106-271).