Retz (Jean-François Paul de Gondi, cardinal de) (suite)
À la mort de son oncle, Jean-François de Gondi, le 21 mars 1654, ses amis, prévenant l’action du roi, lui assurent la succession de l’archevêque, en l’installant canoniquement. Mazarin, furieux, lui demande alors de démissionner sous peine de plus durs châtiments. Retz cède et est transféré à la prison de Nantes. Il s’en évade bientôt, le 8 août 1654, et pense se rendre à Paris pour y soulever le peuple ; mais une chute de cheval le force à s’exiler à Madrid, puis à Rome, où il contribue à faire élire le nouveau pape, Alexandre VII. Avant de partir de France, Retz a révoqué sa démission de l’archevêché de Paris, « extorquée par la force ». Durant ses années d’exil, le clergé parisien, dont il entretient le zèle par de fréquentes lettres pastorales, lui reste fidèle, ce qui crée dans le diocèse de Paris une situation des plus confuses. Il finit par se brouiller aussi avec le pape, puis erre aux Pays-Bas, toujours poursuivi de la haine de Mazarin, qu’il « menaçait encore, dit Bossuet, de ses tristes et intrépides regards ».
Après la mort de Mazarin (9 mars 1661), le roi lui permet de rentrer en France, mais seulement à condition qu’il donne sa démission. En février 1662, Retz s’installe à Commercy, une de ses seigneuries, signe sa démission et reçoit en compensation de gros bénéfices ecclésiastiques, dont l’abbaye de Saint-Denis.
Louis XIV, qui ne l’aime pas, le charge pourtant d’une mission diplomatique auprès du pape (1665) ; par son habileté, Retz parvient à éviter la rupture entre la France et le Saint-Siège, mais, n’ayant pu obtenir le poste d’ambassadeur à Rome, qu’il escomptait, il revient en France. Il participe ensuite aux trois conclaves qui voient l’élection de Clément IX (1667), de Clément X (1670) et d’Innocent XI (1676) et où il joue un rôle capital. En France, il vit soit à Commercy, soit à l’abbaye de Saint-Mihiel et commence à rédiger ses Mémoires (édités en 1717), où il se révèle l’un des plus brillants écrivains français. Si ces Mémoires contiennent d’abord sa propre apologie, ils n’en sont pas moins irremplaçables comme document sur la France durant la Fronde. En 1675, Retz paie ses énormes dettes et renonce à son train fastueux ; il veut même donner sa démission de cardinal, ce que le pape refusera. Il mène dès lors, du moins en apparence, une vie édifiante au monastère de Saint-Mihiel et dans son abbaye de Saint-Denis.
Ce dernier « rôle », il le joue à la perfection, édifiant ses contemporains, dont Mme de Sévigné s’est fait l’écho. Sa correspondance révèle cependant que le fond de son âme n’avait pas changé. Il meurt à Paris, chez sa nièce, la duchesse de Lesdiguières, le 24 août 1679.
P. R.
➙ Fronde (la).
L. Batiffol, Biographie du cardinal de Retz (Hachette, 1930). / F. Albert-Buisson, le Cardinal de Retz (Plon, 1954). / J. Castelnau, Retz et son temps (Taillandier, 1955). / P. G. Lorris, Un agitateur au xviie siècle, le cardinal de Retz (A. Michel, 1956). / J. Matrat, le Cardinal de Retz (Structures nouvelles, 1969).
