Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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retombées radioactives (suite)

Évaluation de la radioactivité des retombées radioactives

La radioactivité étant due à un certain nombre de facteurs complexes, il n’est pas possible de définir une période comme on le fait pour une seule source. Dans le cas des retombées radioactives, la décroissance radioactive obéit à ce qu’on appelle quelquefois la loi en t–1, 2, et qui se traduit par la formule :

It étant le débit de dose au bout du temps t, et I1 la valeur du débit de dose une heure après l’explosion. Cette loi approximative ne peut être appliquée qu’à condition que la quantité des retombées ne soit pas modifiée dans l’intervalle de temps considéré. Sur le plan pratique, le débit de dose est divisé par 10 quand le temps est multiplié par le facteur 7.

Le phénomène aura l’allure suivante. On suppose qu’au départ il n’y a aucune activité dans la zone où l’on se trouve ; la radioactivité constatée part donc de zéro pour augmenter progressivement pendant la retombée. On a une courbe croissante du débit de dose en fonction du temps ; si, à partir du temps t, en admettant qu’il n’y a plus de retombées importantes, le débit de dose décroît selon la loi
It = I1 t–1, 2,
on a la courbe BC. Pendant cette décroissance, il tombera toujours des poussières, la chute ne s’arrêtant pas en effet systématiquement à un certain moment. À l’aide de cette courbe, on peut connaître approximativement la dose reçue dans un certain intervalle de temps t1, t2 (représentée par l’aire colorée). Dans ces conditions, on peut définir le débit de dose I1 comme celui qu’on mesurerait au lieu considéré si on supposait que toutes les retombées, au lieu d’être réparties dans le temps, tombaient instantanément, en totalité, en ce lieu, une heure après l’explosion.


Aspect des lieux après les retombées

La répartition, selon la grosseur des particules, de l’activité déposée au sol par les retombées obéit approximativement à la loi de Gauss, la variable étant le logarithme du diamètre de la particule. On évalue à 1 p. 100 de l’activité totale celle qui est déposée par les particules possédant un diamètre supérieur à 400 µ ; à 3 p. 100 celle qui est déposée par les particules dont le diamètre est de 300 à 400 µ ; à 12 p. 100 celle qui est due aux particules ayant un diamètre inférieur à 50 µ. Les retombées radioactives se trouvent donc réparties un peu partout sur le sol, où elles ne se distinguent pas a priori des autres poussières. En l’absence de vent, on peut admettre que ces poussières constituent une couche plane, infinie et uniforme ; si, au contraire, on veut tenir compte de l’amoncellement des poussières dû au vent, les calculs de protection deviennent très difficiles. Pour simplifier, on considère comme dangereuses les retombées qui se trouvent dans un rayon de 300 m au lieu observé ; au-delà de cette distance, on admet que les retombées interviennent pour produire au point considéré un débit de dose égal au 1/10 de celui qui est produit sur les 300 premiers mètres ; de même, on tient compte pour la même proportion du rayonnement diffusé, ou effet de ciel. Outre la quantité des poussières, il faut également considérer la nature et l’énergie du rayonnement ; comme il est impossible d’entrer dans le détail, on n’envisage dans les calculs de protection que le rayonnement gamma et on admet pour celui-ci une énergie moyenne de 0,7 MeV.


Protection contre les retombées radioactives

Dans le cas des retombées radioactives, le produit de la couche de demi-atténuation (C. D. A.) d’un matériau par sa masse volumique est une valeur à peu près constante, de l’ordre de 15, ce qui permet de calculer, pour un matériau de nature donnée, la valeur approchée de la couche de demi-atténuation. Sur le plan national, il avait été décidé il y a quelques années, dans l’éventualité d’une guerre nucléaire, de faire l’inventaire des constructions existantes pour connaître le pourcentage de la population susceptible d’être protégée dans les bâtiments offrant un coefficient de protection suffisant contre les retombées radioactives. Supposons une personne se trouvant à découvert au moment d’une retombée radioactive, elle subira dans cette position toute la retombée et absorbera une dose D. Si, dès l’apparition du phénomène, elle cherche refuge dans le sous-sol d’un immeuble voisin, elle absorbera une dose D′ inférieure à D dans une certaine proportion K, telle que . Le problème posé consistait à déterminer les immeubles ayant un coefficient K supérieur à 40, c’est-à-dire dans lesquels les occupants ne recevront que le quarantième de la dose qu’ils absorberaient sans protection. Pour augmenter la valeur du coefficient K, une solution consiste à épaissir les murs ainsi que les plafonds des caves et des sous-sols.


Études particulières

Certains produits de fission ont été particulièrement étudiés dans le cas de retombées immédiates ou différées, lesquelles constituent un facteur d’augmentation (de l’ordre du dixième) de la radioactivité naturelle. Le plus étudié de ces produits de fission est le strontium 90 ; c’est un émetteur bêta de période de 28 ans, chimiquement voisin du calcium, dont il suit le métabolisme. Un engin nucléaire d’une puissance de 1 Mt libère 143 000 Ci de strontium 90, ce qui créerait, en supposant une répartition uniforme à la surface du globe, une contamination radioactive de 0,2 à 0,3 mCi/km2. La contamination du sol par les retombées différées n’est pas uniforme. Il y a une plus grande proportion de strontium 90 dans l’hémisphère Nord aux alentours du 40e parallèle, sans aucun échange de contamination entre les deux hémisphères, Nord et Sud. Si, au lieu de ne considérer que le strontium 90, on fait intervenir l’ensemble des produits de fission, on obtient des chiffres beaucoup plus élevés. Les activités bêta totales moyennes des retombées sur la France, consécutives aux expérimentations nucléaires, ont atteint en millicuries par kilomètre carré : 550 en 1961, 1 300 en 1962 et 1963, 300 en 1964, 80 en 1965, 25 en 1966, 13 en 1967, 23 en 1968, 27 en 1969, 33 en 1970 et en 1971, 12 en 1972, 4,5 en 1973, 18 en 1974 et 8,8 en 1975. Ces résultats ont été établis par le Service central de la protection contre les radiations ionisantes (S. C. P. R. I.), relevant du ministère de la Santé publique et du ministère des Affaires sociales et dont les laboratoires sont installés au Vésinet.

Ph. R.

➙ Bombe nucléaire / Nucléaire (énergie) / Radioactivité.