Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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ressources naturelles

Ensemble des substances indispensables à l’existence humaine et qui ne se présentent généralement pas sous l’aspect et au lieu où le besoin s’en fait sentir.


L’environnement dans lequel évoluent les sociétés est en partie leur œuvre. Elles le construisent en empruntant au monde physique et au monde vivant des matières ou des formes d’énergie qu’elles remodèlent ou changent de place. Tant qu’un produit n’est pas utilisé par l’homme, ou tant qu’il n’est pas nécessaire de faire effort pour se le procurer, il ne constitue pas une ressource. Il le devient lorsqu’il se fait rare.


Leur nature

Les ressources naturelles évoluent donc avec le nombre des hommes ; lorsque les populations se multiplient, des biens qui étaient jusqu’alors libres deviennent objet de compétition. Les ressources naturelles se transforment également en fonction des techniques : au fur et à mesure que le progrès s’affirme, on emploie plus d’énergie, et sous des formes nouvelles, plus de produits agricoles pour les usages alimentaires ou non alimentaires, et surtout plus de denrées minérales. Certains produits se trouvent, au cours de cette transformation, dévalorisés, car ils sont remplacés par de nouvelles matières premières qui se révèlent plus adéquates pour satisfaire tel ou tel besoin. Pour les populations préhistoriques, le silex et l’obsidienne étaient des denrées fondamentales : on ne les cite même plus parmi les produits indispensables à la vie sociale.

La liste des ressources naturelles évoluait lentement dans les sociétés traditionnelles, dont la démographie était, dans le long terme, généralement assez stable, et dont la technologie demeurait simple. Les besoins essentiels étaient ceux de nourriture, de vêtements, de logement et de protection contre la chaleur ou le froid : la plus grande partie des ressources naturelles d’alors provenait des règnes animal ou végétal. Avec la révolution industrielle*, et avec l’explosion démographique qui l’a accompagnée, la situation s’est transformée profondément : les techniques modernes impliquent un univers instrumental beaucoup plus complexe et l’utilisation de sources d’énergie beaucoup plus puissantes. On a donc fait appel, beaucoup plus que par le passé, aux ressources minérales.

Depuis une vingtaine d’années, on assiste à une transformation d’un autre type : l’augmentation de population, sa concentration dans certaines aires urbaines et l’usage accru des sources d’énergie fossile ont provoqué des pénuries nouvelles ; l’air pur, l’eau* deviennent des biens rares, des ressources naturelles, même dans les pays où ils avaient toujours paru inépuisables. L’eau manque jusque dans les régions les plus arrosées, et l’air pur dans toutes les grandes agglomérations. Du fait de la pollution* et de l’entassement, l’étendue où se promener, se détendre, se distraire devient également rare, cependant que les richesses potentielles des associations naturelles risquent d’être détruites par les agressions dont le milieu est presque partout victime. Les espaces ruraux aménagés, les espaces vierges apparaissent désormais comme des ressources essentielles, dont on ne sait pas encore assurer la gestion de manière satisfaisante pour l’humanité.

Il semblait facile autrefois de dire où cessaient les ressources naturelles ; au-delà commençaient les biens libres. Il apparaît désormais qu’un bon nombre de produits de consommation indispensables à nos sociétés sont des biens fabriqués, mais qu’on ne sait ou ne peut remplacer : un paysage historique n’est pas reproductible à volonté. Il y a donc désormais beaucoup d’analogie entre les problèmes que pose la gestion des ressources en espaces libres ou naturels, et ceux que suscitent la protection et l’entretien de biens qui semblent indispensables aux satisfactions intellectuelles des groupes : les monuments et, plus encore, l’ensemble des espaces marqués par la vie des groupes passés.


Ressources renouvelables et non renouvelables

L’économiste distingue deux types de ressources naturelles en fonction de données fondamentales de l’écologie. Pour certains produits, d’année en année, le stock exploitable se reconstitue : on parle de « ressources renouvelables ». Ce sont celles qui naissent de la transformation de l’énergie solaire à travers les pyramides écologiques qui se sont développées naturellement à la surface de la terre, ou que l’homme y a asservies. L’énergie du vent, des marées, des eaux courantes a la même origine : elle est donc inépuisable, tout en étant limitée, à un instant donné, par l’ensemble des mécanismes qui déterminent la transformation de l’énergie solaire à la surface de la Terre.

Aux ressources renouvelables, il importe d’opposer celles qui ne le sont pas : les richesses minérales, les combustibles fossiles sont prélevés sur des stocks qui ne se sont pas modifiés depuis l’origine de la Terre (pour les minéraux), ou qui ont été déposés depuis plusieurs centaines de millions d’années (pour les combustibles fossiles). Au rythme actuel, les réserves accumulées depuis le début de l’ère primaire risquent d’être totalement utilisées en moins d’un millénaire, c’est-à-dire 500 000 fois plus vite qu’elles ne se sont constituées.

La distinction entre ressources renouvelables et ressources épuisables n’est pas toujours aussi nette. En matière agricole, les récoltes peuvent se répéter d’année en année à condition qu’on ne détruise pas la fertilité des sols, qu’on ne provoque pas la ruine de ceux-ci. À la limite, si on laisse se développer l’érosion, toute la terre arable est emportée : on a traité la richesse agricole comme un mineur exploite un filon. On en a tiré profit, mais on a sacrifié l’avenir.

Les ressources naturelles renouvelables ont un coût constant. Cependant, lorsque la population augmente, il convient de mettre en valeur de nouvelles terres. Comme on a commencé par les plus fertiles, les produits qu’on arrive à tirer de l’agriculture sont de plus en plus onéreux, car ils proviennent d’une nature de plus en plus avare. Aussi est-on obligé, pour augmenter la production, de laisser monter l’ensemble des prix : c’est celui des exploitations marginales qui sert de référence. Les autres terres rapportent désormais des rentes. Ainsi dans le long terme, et si la technologie ne change pas, on doit voir se manifester une hausse des prix des produits de l’agriculture, de l’exploitation forestière ou de la pêche.

En fait, cette hausse est combattue plus ou moins efficacement par l’invention de nouvelles technologies, qui permettent d’accroître la fertilité des terres (technique d’assolement, amendements ou engrais) ou de diminuer les frais d’exploitation (utilisation de moyens mécaniques qui limitent les dépenses de main-d’œuvre et multiplient les économies d’échelle).