République (IIIe) (suite)
Le 1er novembre, Paul Marchandeau accepta d’échanger avec lui le portefeuille des Finances pour celui de la Justice. Dès le 12, Reynaud développa à la radio un programme depuis longtemps mûri ; un train de 42 décrets-lois lui permit, à partir du 13, de le mettre en action : impôts nouveaux, économies massives, semaine de travail portée en fait de quarante à quarante-huit heures, suppression des majorations d’heures supplémentaires. Par ailleurs, Reynaud se montra partisan d’une politique intransigeante à l’égard de l’Allemagne. Entre Daladier et lui, la rivalité grandit avec l’entrée de la France dans la Seconde Guerre* mondiale (3 sept. 1939). Quand Daladier démissionna (20 mars 1940), ce fut naturellement à Paul Reynaud que le président Lebrun recourut pour former un cabinet de Défense nationale. Paul Reynaud prit le portefeuille des Affaires étrangères, mais il garda Daladier à la Défense nationale. Ne pouvant songer à une offensive directe contre les Allemands, il voulut développer une « stratégie périphérique », ce qui l’amena à envoyer le général Weygand* en Syrie dans l’espoir — qui se révéla vain — de reconstituer un nouveau « front de Salonique ». La guerre russo-finlandaise ayant attiré l’attention des belligérants sur la Scandinavie, riche en minerai de fer, utilisé par les Allemands, il essaya, d’accord avec les Britanniques, de couper la « route du fer », qui partait des rives norvégiennes. L’invasion de la Norvège et du Danemark par les Allemands fit échouer cette opération de diversion : cet échec allait déterminer Reynaud à la démission (9 mai), quand eut lieu l’invasion de la Belgique et de la Hollande par les troupes du IIIe Reich (10 mai).
Désireux de faire face malgré tout, Paul Reynaud remania son ministère (18 mai) : il fit passer Daladier aux Affaires étrangères et prit le portefeuille de la Défense nationale ; le maréchal Pétain* fut fait vice-président du Conseil et ministre d’État. Le 19 mai, alors que la débâcle se dessinait, Gamelin* fut limogé au profit de Weygand. Reynaud avait voulu rendre confiance au pays en appelant les populaires soldats qu’étaient Pétain et Weygand, mais il lui fallut compter de plus en plus avec leur forte personnalité et avec leurs avis, qui allaient s’opposer aux siens, notamment en matière d’armistice : Weygand — appuyé par Pétain — réclama celui-ci avec insistance à partir du 12 juin. Pour renforcer son cabinet, Paul Reynaud avait, le 5 juin, éliminé Daladier et repris le portefeuille des Affaires étrangères ; en même temps, il avait constitué un sous-secrétariat d’État à la Défense nationale, confié au général de Gaulle. Mais il était trop tard : les Allemands avançaient rapidement ; le 10 juin, le gouvernement quittait Paris pour Tours puis Bordeaux, où Paul Reynaud en vint à l’idée d’un repli en Afrique du Nord. Mais, débordé par Pétain et Weygand, Reynaud démissionna le 16 juin.
Interné sur l’ordre de Pétain (sept. 1940-1942), il fut déporté par les Allemands (1942-1945). Après la Seconde Guerre mondiale, il fut député du Nord (1946-1962) et se fit l’un des champions de l’unité européenne.
P. P.