Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Asie de la mousson (suite)

Le « sous-continent » indien est un monde à peu près clos par la barrière montagneuse qui l’enferme au nord : il a sa propre « mousson », et le relief joue un rôle déterminant dans la répartition des pluies. Au contraire, l’Asie du Sud-Est, la Chine orientale et le Japon subissent l’effet de phénomènes qui leur sont extérieurs : l’appel d’air vient ici de l’Asie centrale, et l’air vient d’Australie (pour la plus grande part) ; en Asie du Sud-Est, le relief joue un rôle déterminant dans la pluviosité. Ce rôle est bien moindre en Chine ou au Japon, où interviennent des phénomènes tempérés (dépressions de front polaire).


Les typhons

Cependant, outre la mousson, un autre phénomène tropical affecte certaines côtes de la région (rivages du golfe du Bengale, des mers de Chine et du Japon) : les typhons, générateurs de pluies très abondantes. Les typhons sont des dépressions barométriques très creuses, qui attirent des vents très violents, des pluies diluviennes et un raz de marée. Ils se déplacent surtout en septembre et en octobre, de l’équateur vers le nord-ouest, puis obliquent vers le nord-est et même le sud-est. Le Japon est le pays du monde où les typhons sont les plus violents.


L’hiver

Dans ces pays qu’uniformise l’été, l’hiver est un premier facteur de différenciation. En cette saison, la latitude joue pleinement son rôle, et il y a des pays tropicaux (sans hiver thermique) et des pays tempérés (avec hiver thermique). L’hiver est extrêmement froid en Chine du Nord-Est, froid en Chine du Nord, frais en Chine du Sud, dans les plaines de l’Indus et la haute plaine du Gange, chaud aux latitudes tropicales et équatoriales. Dans l’ensemble, l’Asie extrême-orientale a un hiver anormalement rigoureux pour sa latitude.

En hiver règne partout sur l’Asie méridionale et extrême-orientale un flux du secteur nord, mais il ne devrait pas partout être appelé mousson. Le froid, dû à la continentalité, crée de très hautes pressions sur la Sibérie orientale (1 035 mb). Ces hautes pressions, d’origine thermique, envoient (phénomène de mousson) vers le sud un air froid et sec, de direction N.-E. - S.-O. ou N.-O. - S.-E. Cet air marque très fortement l’hiver de la Chine et du Japon. L’hiver est très froid à Pékin (– 4,4 °C), plus froid encore dans le Nord-Est et froid à Shanghai (Chang-hai). Il est sec dans le Nord-Est et le Nord, et assez pluvieux sur la Chine méridionale. L’anticyclone sibérien donne normalement des temps anticycloniques calmes et froids sur la Chine du Nord-Est et du Nord jusque vers le 35° N. ; plus au sud, il crée (phénomène de tourbillon) ou, au moins, renforce les dépressions cycloniques d’ouest, qui circulent sur la Chine centrale et méridionale. Devenu instable sur la mer du Japon, relativement chaude sur sa rive japonaise à cause du Kuroshio, il provoque sur cette dernière d’énormes chutes de neige (6 m). Cet air polaire (Pc) parviendrait en fin d’hiver (févr.-mars) jusqu’au golfe du Tonkin, où il provoquerait les pluies fines continues du crachin. Tout à fait exceptionnellement, il provoquerait de petites pluies fines beaucoup plus au sud. Mais il est peu probable qu’il pénètre plus avant, vers le sud, en Asie du Sud-Est. Celle-ci est, de décembre à février, sous l’influence d’un flux d’air du secteur nord, sec et frais, mais non pas froid, qui donne la « saison fraîche » : ciels clairs et lumineux. Vraisemblablement originaire d’anticyclones subtropicaux (peut-être renforcés par l’air polaire de la mousson), ce flux d’air est donc un alizé. Le vent modéré et agréable qui souffle à la même époque sur l’Inde est un vent du nord, sec et frais (Delhi : 15 °C en janvier), originaire d’une haute pression autochtone qui se tient normalement sur le nord-ouest du sous-continent, donc à une latitude subtropicale : ce vent est un alizé. Il se fait sentir jusqu’à la fin de février. Le Pendjab, cependant, a quelques pluies de décembre à février (66 mm à Lahore) : elles sont dues au passage de dépressions d’ouest peu actives, quand l’anticyclone a une position méridionale.


Le relief

S’opposent très fortement des plaines alluviales très basses et très plates et des régions hautes. Celles-ci comportent des zones de relief relativement calme, où dominent les plateaux (socles et « pseudo-socles »), et des zones de relief très vigoureux (chaînes tertiaires).


Les « plateaux »

Le Deccan est un ensemble de plateaux : plateau de Mysore au sud (600 m), dominant le plateau de Tamilnād (300 m) et la « plaine » de Coromandel (moins de 75 m) ; plateau du Telingāna, au centre (500 m) ; Chotā Nāgpur au nord-est ; plateau Marathe et plateau Mālwā au nord-ouest. L’ensemble est incliné d’ouest en est, et les Ghāts occidentaux, orientés N.-S., sont le relief le plus vigoureux, perpendiculaire au flux de mousson ; ils culminent au sud, en hauts blocs à sommets plats, Nīlgiri (2 635 m) et Anamalai-Palni (2 695 m) ; les plus grands fleuves (Mahānadi, Godāvari, Kāviri) coulent d’ouest en est. À l’est, les Ghāts orientaux, orientés N.-E. - S.-O., sont plus bas et morcelés (Dewodi Mounda, chaînes de Cuddapah, Ghāts du Tamilnād). Au nord enfin, les crêtes étroites des Arāvalli prolongent le Deccan jusqu’à Delhi. À l’exception des plateaux Marathe et Mālwā, nappes horizontales de basaltes crétacés, les plateaux du Deccan sont des « pénéplaines à inselbergs », glacis presque nivelés, parsemés de buttes aux flancs abrupts. Les monts Cuddapah et les Arāvalli sont des crêtes appalachiennes de quartzites, vestiges modestes de chaînes cambriennes. Les autres montagnes sont dues à des failles : au nord de 16° N., les Ghāts occidentaux sont un escarpement de faille ; plus au sud, ils sont des horsts comme les Ghāts orientaux. Possédant toutes les formes de relief typiques d’un socle tropical, le Deccan est une des plus vieilles terres du monde, où dominent les gneiss archéens.

L’Asie du Sud-Est est fragmentée : péninsule indochinoise, péninsule malaise, Bornéo. Mais ces régions reposent sur une vaste plate-forme sous-marine, la plus grande du monde, la plate-forme de la Sonde : un léger soulèvement (moins de 75 m) créerait un vaste ensemble de relief calme, étendu à l’est jusqu’à la mer de Sulawesi ou de Célèbes (– 5 500 m) et dominant à l’ouest par l’escarpement de 1 000 m du plateau Chan les plaines de l’Irrawaddy. Le relief est plus vigoureux cependant que celui du Deccan. Les principales lignes de relief sont méridiennes, donc presque perpendiculaires au flux de mousson : escarpement du plateau Chan, Tenasserim, chaînes malaises disposées en échelons, monts d’Annam (et non « Cordillère annamitique »), chaînes du nord de la Thaïlande et du Laos septentrional, Dong praya yen ; les chaînes du Viêt-nam du Nord (au sud du fleuve Rouge) sont orientées N.-O. - S.-E., ainsi que l’ensemble des monts du sud du Cambodge. Ce n’est plus un socle. Les terrains sont plus variés, et les calcaires permiens donnent d’extraordinaires karsts à pitons. Des orogenèses secondaires, de plus en plus récentes de l’intérieur vers l’extérieur, ont affecté l’ensemble ; mais, sauf exception (Viêt-nam du Nord), les plis ont été lourds, accompagnés de montées de batholites et d’éruptions volcaniques. Enfin, les chaînes, très usées, sont en partie enfouies sous leurs propres débris, une couverture de grès roses étant restée presque horizontale. L’ensemble est consolidé, et le relief est dû surtout à des failles tertiaires. Nous avons proposé l’appellation de « pseudo-socle de la Sonde ».