Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
Q

Québec (province de) (suite)

L’immense nord n’est peuplé que de façon très sporadique : villes minières isolées dont la prospérité varie fortement selon les cours du métal et l’importance de l’extraction, comptoirs de traite, villages d’autochtones en voie de sédentarisation, points de passage des trappeurs ou des prospecteurs. Ses richesses potentielles, hydro-électriques et minérales, partiellement exploitées et connues, sont considérables.

Les changements de la société québécoise ont mis en relief des problèmes dont un des plus importants est celui des déséquilibres régionaux. L’hypertrophie de Montréal, d’une part, l’exode rural et la situation difficile des régions périphériques, de l’autre, justifient l’expression « Montréal et le désert québécois ». La nationalisation de l’électricité, la création d’une société générale de financement, les lois d’aide différentielle à l’industrie et la fondation d’une société de développement industriel donnent à l’État provincial les moyens d’améliorer la situation des régions en difficulté, mais ceux-ci n’ont eu que des effets limités jusqu’à présent.

Ces mêmes moyens devraient permettre au gouvernement provincial de remédier au problème du chômage en corrigeant les faiblesses de l’industrie par la diversification des fabrications et par la transformation des produits forestiers et miniers jusqu’au stade des objets finis.

Un autre problème grave est celui de l’affaiblissement démographique du Québec, principalement du fait des francophones, qui menace à terme non seulement la position des Franco-Québécois dans l’ensemble de la population canadienne, mais aussi la « survivance du fait français en Amérique », courageusement assurée depuis deux siècles, et le remarquable essor culturel que connaît aujourd’hui la société canadienne-française.

P. B.

➙ Canada / Montréal / Québec / Saint-Laurent.

 R. Blanchard, l’Est du Canada français (Beauchemin, Montréal, et Masson, 1935 ; 2 vol.) ; le Centre du Canada français (Beauchemin, Montréal, 1935, 2e éd., 1948) ; l’Ouest du Canada français (Beauchemin, Montréal, 1953-54 ; 2 vol.) ; le Canada français ; province du Québec (Fayard, 1960). / P. Biays, les Marges de l’œkouméne dans l’est du Canada (Presses de l’université Laval, Québec, 1964). / J. Warkentin (sous la dir. de), Canada. A Geographical Interpretation (Toronto, 1967). / J. Girard, Géographie de l’industrie manufacturière du Québec (ministère de l’Industrie et du Commerce, Québec, 1970 ; 2 vol.). / F. Grenier (sous la dir. de), Québec (Toronto, 1972). / H. Morissette, les Conditions du développement agricole au Québec (Presses de l’université Laval, Québec, 1972). / M. Saint-Germain, Une économie à libérer (Presses de l’université, Montréal, 1973).


L’histoire

Habité par une forte majorité francophone, le Québec est le bastion du premier « peuple fondateur » du Canada. Jusqu’à l’établissement du régime anglais, son histoire se confond avec celle du Canada*. Quelques mois après la signature du traité de Paris (1763), qui abandonne toutes les possessions du roi de France en Amérique du Nord au souverain anglais, une « province de Québec » est créée de part et d’autre du Saint-Laurent. Ce territoire forme une pointe jusqu’au lac Nipissing, au nord-est du lac Huron : c’est désormais dans ces limites que devront vivre les vaincus, dont le domaine s’étendait auparavant, tout au moins théoriquement, jusqu’aux approches des Rocheuses et du delta du Mississippi.

Les rapports entre les Anglais et les « nouveaux sujets » se régularisent grâce à la collaboration du clergé, que les événements vont désormais placer à la tête des francophones : le libre exercice de la religion catholique est garanti, et Mgr Briand (1715-1794), l’évêque de Québec, chante les louanges des « nobles vainqueurs ». Ces derniers en viennent à considérer que les Canadiens forment un rempart contre les troubles qui se développent dans les colonies de la côte de l’Atlantique. Ainsi, le 22 juin 1774, l’Acte du Québec étend considérablement les limites de la province, qui va désormais des côtes du Labrador jusqu’au-delà du lac Supérieur et, vers le sud, jusqu’à l’Ohio. Cet immense accroissement de leur territoire s’accompagne aussi, pour les francophones, du rétablissement partiel de leur législation particulière. Le système seigneurial est conservé, mais les autorités vont se garder la possibilité d’installer de nouveaux colons, anglophones, sur les tenures libres. Beaucoup pensent alors que, en peu de générations, les premiers habitants du pays seront absorbés et perdront peu à peu sinon leur religion, tout au moins leur langue. D’autant que, en 1783, l’émancipation des États-Unis s’accompagne de l’accélération du peuplement anglais vers le nord : l’arrivée des « loyalistes » va être fatale à la première province « de Québec », déjà amputée par l’indépendance américaine de ses parties méridionales : en 1791, la région de l’Ontario, que ces derniers commencent à coloniser, constitue le « Haut-Canada », les francophones étant établis dans le « Bas-Canada ».

L’histoire des deux régions présente un notable parallélisme, puisque chaque division administrative voit se développer les mêmes oppositions : contre la « clique du château » au Bas-Canada, contre le « Family Compact » au Haut-Canada.

Dans la première région, Louis Joseph Papineau* prend la défense des francophones, et un début d’insurrection se produit même en 1837 : les « patriotes » parviennent à repousser les troupes anglaises au village de Saint-Denis. La réponse de Londres à ces troubles, par la voix de lord Durham, sera l’union des deux régions en 1840. La langue française perd alors son caractère officiel. Pour empêcher les francophones de jouer un rôle correspondant à leur nombre (ils sont beaucoup plus nombreux que les anglophones), il est convenu qu’ils éliront le même nombre de députés (42) que ceux du « Canada-Ouest ».