Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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protection de la nature (suite)

Les trois autres catégories d’espèces animales menacées requièrent moins de commentaires. Dans les océans, une espèce qui fit beaucoup parler d’elle est la Baleine*, dont la raréfaction par surexploitation est si inquiétante qu’à la conférence des Nations unies sur l’environnement, tenue à Stockholm en 1972, il fut proposé de lui appliquer un moratoire de chasse de dix ans pour laisser ses stocks se reconstituer. Mais les intérêts en jeu étaient trop grands, et la proposition fut repoussée. Le caractère international des eaux de haute mer rend encore malaisée la prise d’autres mesures, pourtant urgentes, de protection ou, du moins, de raisonnable exploitation des espèces vivantes, tant Mammifères (Phoques, etc.) que Poissons et mêmes Crustacés, Mollusques, etc., qui peuplent les océans. Pour les Poissons d’eau douce, la situation n’est vraiment menacée que là où la pollution de l’habitat compromet les conditions d’existence des espèces. Ailleurs, le maintien d’un équilibre satisfaisant reste possible par la promulgation de lois et de règlements sur la pêche, qui sont généralement bien observés. Le taux très élevé de reproduction du Poisson est, d’ailleurs, un facteur favorable, qui permet le repeuplement rapide d’une nappe d’eau où existe la nourriture nécessaire à un développement ichtyologique. La pisciculture, notamment dans le cas de la Truite, peut, en outre, intervenir pour assister la pêche sportive. On saisira cette occasion pour signaler un autre péril menaçant actuellement, à travers la flore comme à travers la faune, les équilibres biologiques de la planète : ce sont les effets fâcheux des introductions intempestives, dans un écosystème, d’espèces exotiques ; on songera à l’introduction du Lapin en Australie, du Rat musqué en Europe, de la Jacinthe d’eau en Asie et en Afrique.

Enfin, il en sera terminé avec la faune lorsqu’un mot aura été dit de l’appauvrissement croissant de l’environnement rural en espèces animales inférieures — Batraciens, Reptiles, microfaune du sol et principalement Insectes —, transformations peu apparentes, nées surtout de la présence, en quantités croissantes dans le milieu, d’éléments toxiques que l’Homme moderne y introduit volontairement ou involontairement par les déchets de ses productions et de ses consommations, par ses usages accrus d’engrais et de pesticides de toute nature. Très peu a été envisagé jusqu’à présent pour s’opposer par la loi à ces transformations, pourtant lourdes de conséquences, de l’environnement rural des pays industrialisés.


Les remèdes

Le cadre fondamental du concept de la « protection de la nature » est ainsi tracé, annonçant ses trois prolongements logiques :
1. des mesures de portée générale, dont la plupart ont déjà été évoquées précédemment, visant à combattre en tous lieux l’appauvrissement ou l’altération du cadre rural de base (végétation, sol, eau, faune) ;
2. des efforts de planification, s’inscrivant dans des politiques générales d’aménagement* du territoire et cherchant, d’une part, à concentrer en des zones partiellement sacrifiées certains phénomènes récessifs considérés comme inévitables et, d’autre part, à susciter des évolutions progressives, des améliorations — anthropocentriquement parlant — des écosystèmes ou des paysages ;
3. des régimes de protection encore beaucoup plus sévères et appliqués à des aires limitées : les réserves naturelles, le terme étant pris dans son sens le plus large.

Dans la plupart des régions industrialisées, la politique d’aménagement du territoire est enserrée dans des dispositions légales plus ou moins heureusement harmonisées avec le cadre constitutionnel et la mentalité générale des habitants du pays. Selon le cas, des crédits plus ou moins importants sont mis en œuvre, une sévérité plus ou moins grande est manifestée par les autorités et acceptée par les citoyens, une concertation plus ou moins efficace est organisée entre ces derniers et les responsables des planifications et des décisions. Et, selon les pays aussi, la nature est mieux protégée, les enlaidissements sont mieux empêchés, le cadre de vie rurale est maintenu ou rendu plus apte, dans son équilibre sauvegardé, à répondre aux aspirations de l’Homme.


Les réserves naturelles

Il s’agit, en principe, de territoires pas trop exigus — quelques centaines d’hectares au minimum, sauf rares exceptions —, dans lesquels toutes les formes d’exploitation et d’occupation par l’Homme, ou certaines d’entre elles seulement, sont soit contrôlées et limitées, soit interdites.

Lorsqu’on se borne à délimiter une étendue encore en majorité ou entièrement rurale et que, tout en continuant à y permettre les exploitations rurales classiques — agriculture, élevage, coupe de bois, chasse et pêche, y compris, bien entendu, résidence et libre circulation —, on s’applique à y entraver ou à y empêcher les manifestations d’industrialisation, d’urbanisation, d’implantation excessives d’infrastructures ou de résidences secondaires, afin d’y conserver des zones vertes de détente et de récréation au bénéfice des citoyens, et en particulier des citadins, on se trouve en présence de l’institution généralement dénommée parc naturel.

À l’autre extrémité de la gamme des réserves naturelles se trouve le sanctuaire intégral, la zone, souvent plus réduite en superficie que les autres aires protégées et surtout que le parc naturel, dans laquelle les écosystèmes sont totalement soustraits à toute intervention humaine, où toute occupation et même circulation est interdite, sauf à ceux à qui est confié le soin soit de surveiller, soit d’étudier scientifiquement cette réserve naturelle intégrale. L’intitulé de ce type de sanctuaire varie selon que l’on y intervient ou non pour favoriser la présence de certaines espèces ou la prévalence de certaines associations.

Très près de la réserve intégrale, mais avec des adoucissements, parfois, quant à la sévérité absolue du régime de protection, et avec la possibilité pour les visiteurs d’y pratiquer le tourisme, vient le parc national. En moyenne, ce dernier est plus vaste que la réserve intégrale (en France, gares nationaux de la Vanoise, des Écrins, du Mercantour, de Port-Cros, des Pyrénées occidentales et des Cévennes). Par définition, il est « national », c’est-à-dire créé par la plus haute autorité compétente du pays, ce qui le distingue des parcs provinciaux (Canada), des parcs d’État (États-Unis) ou encore des réserves privées.

Enfin, il existe encore nombre de types de réserves dites « spéciales » ou « partielles », dont la dénomination suffit à indiquer la spécificité : réserve de faune, ornithologique, forestière, géologique, anthropologique, à Éléphants, etc.

J.-P. H.

➙ Aménagement du territoire / Eau / Environnement / Érosion / Faune / Nuisance / Océan / Pollution / Sol / Végétation.