Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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poste (suite)

Sous la monarchie française


La poste du roi

Celle-ci n’est, à l’origine, qu’une poste à des fins privées. Au fur et à mesure que le rôle du roi grandit, qu’il incarne progressivement l’État, qu’il devient le personnage de qui tous les seigneurs tiennent leur fief, sa poste se différencie progressivement des autres institutions. Les conflits dus à la concurrence seront innombrables avant que le monopole postal soit reconnu par tous. Jusqu’à une date récente, on attribuait à Louis XI la création de la poste en France, en s’appuyant sur un texte qui semble faux (édit du Luxies, 1464). On peut, néanmoins, affirmer que Louis XI a effectivement réintroduit dans notre pays le système des relais permettant d’accélérer le transport. Jusqu’alors, les voies empruntées pour communiquer avec la Cour variaient suivant la résidence du roi et suivant les contingences politiques et militaires. Un réseau permanent de relais est désormais mis en place. Le règne d’Henri IV marque une autre étape dans l’évolution de la poste. À l’instigation de son contrôleur général des Postes, Guillaume Fouquet de La Varane (ou de La Varenne, 1560-1616), le roi prend plusieurs mesures importantes, particulièrement la création de la poste aux lettres : le rôle des maîtres de poste est modifié ; ceux-ci ne se contentent plus de fournir des chevaux aux personnages officiels et d’en louer aux particuliers ; ils doivent, désormais, assumer le transport des lettres des particuliers. Sous le règne de Louis XIII, vers 1630, les fonctions postales importantes sont érigées en offices : les acquéreurs deviennent propriétaires de leurs charges moyennant un versement au Trésor royal.

En 1668, Louvois rachète la charge de surintendant général des Postes, que les déboires et la mort de Jérôme de Nouveau en 1665 ont rendu vacante. Le monopole de la poste royale se précise et se resserre.


La ferme des postes

Une nouvelle organisation est mise en place, qui se caractérise par la juxtaposition de deux autorités distinctes. D’une part, le surintendant veille à la sauvegarde des intérêts publics, s’assure du respect des clauses du contrat et veille à l’application des tarifs, exerçant en quelque sorte le rôle de l’autorité de tutelle dans le droit public moderne. D’autre part, le fermier, en vertu d’un contrat passé avec le roi, est chargé de l’exploitation du service postal. Son rôle est analogue à un concessionnaire de service public moderne. Le premier bail de la ferme des postes est conclu en 1672 pour une durée de cinq ans. Cet acte fait apparaître le rôle actif que vont jouer les familles Pajot et Rouillé. Le bail sera renouvelé périodiquement à leur profit, moyennant le relèvement, à chaque échéance, de la somme à verser au Trésor royal, et cela jusqu’en 1738, date à laquelle se substitue une autre dynastie postale, le groupe Grimod et Thiroux, qui installe ses membres à toutes les positions clefs de l’institution fermière. Le système de la ferme durera jusqu’à la Révolution.


La poste aux chevaux, la poste aux lettres et les petites postes

Au cours du xviiie s. coexistent la poste aux chevaux, incarnée par les maîtres de poste titulaires d’un brevet royal, propriétaires du relais, souvent auberge, et responsables du transport, et la poste aux lettres, implantée dans les localités les plus importantes (1 000 bureaux en France) en 1735. Ces bureaux sont chargés de la réception et de l’expédition des correspondances. Les directeurs placés à leur tête reçoivent un traitement fixe adapté à l’importance du bureau. À cette époque, en France comme à l’étranger, la distribution à domicile n’existe pas pour les lettres expédiées d’une localité pour un destinataire habitant la même localité. Pour pallier cette lacune, des initiatives privées instituent des petites postes ; c’est le cas à Paris, où, en l’année 1759, C. H. Piarron de Chamousset (1717-1773) obtient du roi un privilège à cet effet. L’affaire est tellement rémunératrice que le roi s’empresse de reprendre les droits concédés en dédommageant le promoteur. Des entreprises similaires sont tentées dans d’autres villes.


De la Révolution à la fin du second Empire

En 1789, le système postal subsiste sans autres changements que ceux qui sont réclamés par de nombreux cahiers de doléances. Le personnel de la poste jouissait de nombreuses exemptions fiscales ; c’était un moyen pour compenser la faiblesse de sa rémunération. Au nom de l’égalité, ces privilèges sont abolis. Les maîtres de postes se trouvent aussitôt dans l’incapacité de continuer à assumer leurs charges, et l’octroi d’une allocation est nécessaire, mais son versement est rendu difficile par la situation financière. D’autre part, l’inviolabilité des correspondances répond à une aspiration générale provoquée par les abus antérieurs du Cabinet noir.


Sous la Convention

Cette inviolabilité est alors foulée aux pieds : on craint la circulation de missives et de gazettes contre-révolutionnaires émanant des émigrés de l’extérieur ou de l’intérieur. Du courrier est saisi dans des bureaux de poste par les municipalités les plus zélées. De même, une surveillance particulière est exercée sur les postiers en raison de l’importance du rôle qu’on attribue à la poste. Pour garder leur emploi, ceux-ci doivent produire des certificats de civisme. Mis à part ces mesures dictées par la situation politique, la Convention va prendre une mesure importante : mettant à profit l’expiration ou la résiliation des baux de fermage de la poste, elle décide de confier la gestion de celle-ci directement à l’État et instaure en 1793 une Agence nationale des postes.


Sous le Directoire et le premier Empire

En avance sur son époque, cette conception marque un recul en l’an IV, lorsque le Directoire abandonne le régime de la régie d’État. Le retour à la ferme est néanmoins de courte durée : éprouvant des difficultés financières, les fermiers demandent la résiliation de leur bail. Lorsque, à la fin du Consulat, Antoine Marie Chamans, comte de La Valette (1769-1830), est nommé directeur général des Postes, c’est la prise en main directe et définitive de l’État dans le domaine postal (28 ventôse an XII). Sous l’Empire, l’organisation postale française s’étend à la mesure des conquêtes territoriales, des annexions et des protections.