Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Pologne (suite)

La Pologne des Piast (xe-xive s.)


992-1025 : éphémère puissance de l’empire de Boleslas Ier le Vaillant

• Le fils de Mieszko, Boleslas (Bolesław), fait d’emblée de la Pologne une grande puissance européenne par ses conquêtes et sa lutte victorieuse contre l’Empire germanique, qui reconnaît son indépendance.

• 1000 : création de l’archevêché de Gniezno, métropole de l’Église de Pologne.

• 1025 : couronnement de Boleslas Ier, roi de Pologne. Son empire s’écroule à sa mort.


1025-1138 : unité précaire et conquêtes éphémères

• Les appétits des féodaux encouragés par l’Empire bouleversent périodiquement la cohésion interne de l’État, restaurée tour à tour par Casimir Ier le Rénovateur (Kazimierz Ier Odnowiciel) [1034-1058], qui transfère la capitale à Cracovie, Boleslas II le Hardi (1058-1079) et Boleslas III Bouche-Torse (1102-1138).

• 1121-22 : nouveau rattachement de la Poméranie occidentale à la Pologne.

• 1124-1138 : évangélisation de cette région.


1138-1320 : le morcellement en duchés ; l’Église de Pologne seul élément d’unité

L’Évangile pénètre dans les masses. Soutenus par des princes pieux, de grands prélats fondent des écoles et recrutent un clergé national. Ses écrivains, formés dans les universités de France et d’Italie, rattachent fortement le pays à la civilisation de l’Occident chrétien et entretiennent l’idée de l’unité (Chroniques de Wincenty Kadłubek [v. 1150-1223], évêque de Cracovie ; Chronique de Grande Pologne). Les premiers monuments en langue polonaise sont tardifs et répondent à la nécessité pour le clergé de se faire entendre du peuple (Sermons de Sainte-Croix (Świętokrzyskie Kazania) ; Hymne à la Mère de Dieu [Bogurodzica, fin du xiiie s.], entonné à Grunwald). Le mécénat princier et seigneurial permet aux prélats et abbés, souvent venus de l’Occident (pays rhénan et mosan, Italie), de favoriser la floraison quelque peu tardive de l’art roman et d’acclimater le gothique. Les monastères animent la vie économique et intellectuelle : bénédictins à Tyniec, Mogilno, Łysa Góra ; cisterciens à Sulejów, Wąchock ; prémontrés à Wrocław. Dans la seconde moitié du xiiie s., les ordres mendiants (Dominicains et Franciscains) connaissent un succès éclatant en relation avec l’essor des villes. En 1253, ils obtiennent la canonisation de saint Stanislas, patron de la Pologne.

• 1279-1320 : luttes pour la réunification du royaume. L’essor économique des villes, soucieuses de supprimer les obstacles aux échanges, et la menace croissante de l’expansion germanique assurent aux initiatives des princes, outre l’appui de l’Église, le concours des bourgeois et des chevaliers. Comptant de nombreux allemands, la bourgeoisie est favorable aux souverains étrangers ; la chevalerie assure la victoire du Piast de Couïavie.

• 1320 : Ladislas Ier le Bref (Władysław I Łokietek) roi de Pologne ; fin du morcellement.

La menace germanique

• 1181 : la Poméranie occidentale est inféodée à l’Empire.

• 1226 : le Piast Conrad de Mazovie fait venir les chevaliers Teutoniques en Pologne et leur donne en fief la terre de Chełmno (Culm), où ils fondent Toruń (Thorn).

• 1249-1252 : le margrave de Brandebourg s’empare de la terre de Lubusz.

• 1230-1283 : l’ordre Teutonique conquiert la Prusse et franchit le Niémen.

• 1308-09 : il conquiert Gdańsk* et la Poméranie orientale : la Pologne a perdu tout accès à la mer.


1320-1370 : la restauration du royaume et son apogée ; Casimir III* le Grand

• 1320-1333 : la collusion des chevaliers Teutoniques, du Brandebourg et du roi de Bohême empêche Ladislas le Bref de reconstituer l’État des fondateurs : la Poméranie et la Silésie demeurent sous domination germanique.

• 1333-1370 : réaliste, Casimir III le Grand cherche des compensations dans une expansion victorieuse vers l’est. Son règne prestigieux est une période de consolidation interne de la monarchie, de prospérité sagement assurée et d’essor culturel.

• 1346-1360 : codification du droit coutumier.

• 1364 : création de l’université de Cracovie, la deuxième en Europe centrale.

• La couronne passe en 1370 au neveu du dernier Piast, Louis Ier d’Anjou, roi de Hongrie.


1370-1386 : de la maison d’Anjou aux Jagellons*

• 1374 : le privilège de Košice réduit les impôts de la noblesse à une taxe infime en échange de la transmission du trône aux filles du roi Louis, qui néglige le royaume.

• 1384 : sa fille Hedwige d’Anjou, couronnée « roi » de Pologne à l’âge de 10 ans, est contrainte par la cour d’épouser le grand duc de Lituanie Jogaila (1386) ; pour devenir roi de Pologne, celui-ci abjure le paganisme avec son peuple, conformément à l’acte d’union de Krewo (ou Krevo) [14 août 1385], qui établit une union personnelle entre la Pologne et la Lituanie, dirigée contre l’ennemi commun : l’ordre Teutonique.

• 1386 : sous le nom de Ladislas II Jagellon (1386-1434), il fonde la dynastie qui portera la Pologne à son apogée.


xiie-xive : croissance économique et mutations sociales

L’intensification de l’agriculture et la colonisation des espaces forestiers généralisent le cens, améliorant la situation juridique et économique des paysans. L’afflux de colons étrangers (allemands, flamands, wallons et juifs) stimule le progrès technique, accélère la croissance des villes en donnant une impulsion nouvelle à l’artisanat et au commerce ; il transforme les rapports juridiques et sociaux dans les villages et les villes franches dotés du jus teutonicum, dont l’adoption se généralise au xiiie s., sur le modèle des fondations silésiennes. Le paysan polonais le revendique aussi, et le servage disparaît progressivement. L’afflux des étrangers n’affecte pas au même degré tout le territoire. Il germanise progressivement la basse Silésie et la Poméranie ; ailleurs, un patriciat allemand prévaut dans les villes. Classe ouverte aux limites incertaines, la noblesse (szlachta) a eu beaucoup de mal à faire reconnaître ses privilèges. Elle se caractérise par une masse prédominante de simples chevaliers et l’absence de hiérarchie féodale. Malgré la disparité croissante des fortunes, tous ses membres restent égaux en droit. Le terme de magnat n’apparaîtra qu’au xvie s. L’extinction de la dynastie nationale ouvre la voie à son ascension politique.