Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pollution (suite)

La pollution des mers

La pollution des mers a schématiquement deux origines : pélagique (les polluants introduits au large proviennent de différentes activités en mer [exploitation des fonds marins, transport] et des précipitations et apports éoliens) ; tellurique (les polluants introduits dans la zone littorale proviennent des apports des cours d’eau et des eaux de ruissellement ou des rejets et dépôts à la côte).


Principaux polluants et leurs effets

• Les toxiques rémanents. Ils confèrent une particularité essentielle à la pollution marine : l’existence de phénomènes de concentration aboutissant à l’accumulation dans les organismes vivants de certains agents polluants qui se trouvent initialement présents dans l’eau de mer en quantités infimes.

On peut distinguer :
— la concentration directe à partir du milieu, qui intéresse essentiellement les micro-organismes animaux et végétaux (plancton) en raison de l’importance de leur surface de contact avec le milieu et, également, les organismes qui pour se nourrir filtrent de grandes quantités d’eau (huîtres) ;
— l’accumulation au long des chaînes alimentaires, le premier maillon étant constitué par les organismes précédemment cités, les suivants par les différents prédateurs qui se nourrissent chacun des maillons précédents de la chaîne et le dernier maillon pouvant être l’homme ; chaque élément de la chaîne concentre dans ses tissus les corps rémanents présents dans les organismes qu’il ingère au cours de sa vie.

Ainsi, des concentrations peuvent être multipliées par des millions entre le milieu ambiant et les animaux situés en bout de chaîne.

Les accidents survenus au Japon, à Minamata, ont fait prendre conscience de façon aiguë des problèmes posés par les métaux lourds : la « maladie de Minamata », apparue en 1954 dans un village de pêcheurs du sud de Kyūshū, est une intoxication par le mercure ; la chair du poisson consommée par les familles de pêcheurs contenait de 10 à 20 mg/kg de méthyl-mercure, ce qui représentait un facteur de concentration de l’ordre de 100 000.

Le plomb, le cadmium, le zinc, l’étain, le cuivre figurent parmi les autres métaux lourds dont il faut se préoccuper.

Les biocides, largement utilisés en agriculture pour combattre notamment les insectes, peuvent également s’accumuler en passant d’une espèce à l’autre, surtout lorsqu’ils sont liposolubles. Parmi ces produits figurent des organochlorés (notamment le D. D. T., l’aldrine, le lindane) et des organophosphorés plus récents.

Les polychlorodiphényles (P. C. B.) qui sont utilisés comme plastifiants, lubrifiants, isolants électriques se comportent de façon analogue au D. D. T. dans la chaîne alimentaire.

• Les toxiques non rémanents. Ce sont des polluants d’origine industrielle. Leur toxicité se manifeste dès leur intrusion dans le milieu marin, mais elle décroît plus ou moins vite grâce aux phénomènes de dilution, de neutralisation ou de dégradation. C’est le cas des rejets fortement acides ou toxiques, rapidement neutralisés par le pouvoir tampon de l’eau de mer.

• Les hydrocarbures. Il existe des déversements systématiques d’hydrocarbures provenant essentiellement des navires pétroliers, et également des fonds de cale des navires de tous types et des raffineries situées en bordure de littoral. En particulier, les navires pétroliers sont tenus de se charger de ballast pour assurer leur navigabilité lors de leur voyage à vide et de nettoyer leurs citernes après déchargement de la cargaison.

Les déversements accidentels concernent l’avarie ou la ruine de navires pétroliers et les accidents de puits pétroliers en mer. Ils peuvent avoir des effets massifs dans des zones géographiquement limitées ; ainsi, lors du naufrage du Torrey Canyon en 1967, 120 000 t de pétrole environ ont été déversées, provoquant une marée noire affectant 400 km de côtes en Angleterre et en France.

Les hydrocarbures agissent directement sur la faune et la flore marines : engluage, destruction d’oiseaux, de poissons, de coquillages, de crustacés, d’algues. Ils ont, en outre, à faible concentration, des effets insidieux résultant notamment de la diminution des échanges gazeux entre l’océan et l’atmosphère.

• Les détergents. Les détergents peu nocifs pour les mammifères sont toxiques à l’égard de certaines espèces marines végétales et animales. Leur nocivité est variable suivant leur composition chimique.

En outre, ils présentent les effets communs aux matières organiques dissoutes (eutrophisation).

• Les micro-organismes pathogènes. Il s’agit de micro-organismes d’origine humaine, susceptibles de déclencher des maladies chez l’homme, qui sont rejetés directement en mer par les eaux-vannes ou par l’intermédiaire de cours d’eau. L’homme peut être contaminé par contact direct (baignades) ou par ingestion de produits de la mer eux-mêmes infectés.

• Les matières organiques dissoutes. Les mécanismes et les conséquences des rejets de substances naturelles fermentescibles, connus sous le vocable d’eutrophisation, ont été décrits dans l’article eau. Le phénomène, qui affecte actuellement surtout les lacs, commence à s’étendre au domaine maritime, particulièrement aux zones fermées ou semi-fermées.

• Les matières en suspension. Les matières en suspension agissent principalement par effet mécanique sur le milieu : augmentation de la turbidité de l’eau, modification de la topographie sous-marine entraînant la disparition ou la modification de la faune et de la flore préexistantes.

• Les déchets solides divers. Les objets divers d’origine variée posent des problèmes d’esthétique (rejets sur les plages) et de gêne (avarie à des engins de pêche) et peuvent causer par leur dépôt sur les fonds littoraux un préjudice à la faune et à la flore marines.