Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

plasma (suite)

Pour les états non stationnaires

Dans les situations perturbées, et notamment pour les perturbations périodiques dans le temps, deux propriétés, paradoxalement opposées, apparaissent et d’autant plus nettes que le plasma est non collisionnel :
— le caractère bon conducteur en basse fréquence ;
— le caractère bon isolant (c’est-à-dire diélectrique) en haute fréquence.

• En basse fréquence, on retrouve les propriétés M. H. D. du plasma, tout particulièrement les ondes d’Alfvén* ainsi que les ondes dépendant de l’agitation thermique, comme par exemple l’onde pseudosonore.

• En haute fréquence, le comportement diélectrique conduit à des ondes électromagnétiques qui ont des caractéristiques analogues à celles qui sont observées dans les cristaux anisotropes uniaxes, mais avec des fréquences critiques (fréquences de coupure séparant les domaines à propagation de ceux où l’onde est évanescente ; fréquences de résonance gyromagnétiques, correspondant à la fréquence de rotation des électrons dans le champ Bo). À coté de deux modes circulaires (droit et gauche) en propagation parallèle à Bo, il existe deux modes en propagation perpendiculaire à Bo : le mode extraordinaire et le mode ordinaire. C’est ce dernier mode, avec un champ électrique vibrant le long de Bo, qui est utilisé en interférométrie hyperfréquence. La prise en compte, pour les ondes lentes, de l’agitation thermique se traduit aussi par des propriétés spéciales, c’est-à-dire de nouvelles ondes.


Pour les états instables

On observe, outre les instabilités macroscopiques, des instabilités microscopiques, où seuls interviennent des groupes de particules de même vitesse et qui fournissent, aux dépens de leur énergie cinétique, de l’énergie à l’onde et la font croître. Il en résulte des émissions radioélectriques.


Applications à l’électronique et à l’électrotechnique, fusion thermonucléaire

• Depuis longtemps, les propriétés des décharges ont été utilisées pour l’éclairage et certains dispositifs électroniques ou électrotechniques (lampes à vapeur de sodium ou de mercure, tubes au néon ou au xénon [lampes « flash »], redresseurs de puissance [ignitron, thyrathron], tubes régulateurs de tension, cellules photoélectriques, compteur Geiger, convertisseur thermoïonique). C’est dans ce dernier domaine que des applications des plasmas ont pu être développées plus récemment. Indépendamment de la conversion M. H. D. d’énergie et de la propulsion ionique, on peut signaler :
— les tubes générateurs ou amplificateurs, dans le domaine des hyperfréquences, qui utilisent les instabilités du type faisceau-plasma ;
— le chalumeau à plasma, qui permet d’atteindre des performances supérieures à celles du chalumeau à arc, pour la soudure, le découpage ; les pipes à chaleur, qui, par suite de la très haute conductibilité thermique du plasma, permettent des échanges de chaleur plus efficaces que ne l’assurent les matériaux standards.

• Application sans nul doute la plus importante, la réalisation d’un réacteur à fusion thermonucléaire contrôlée exige l’obtention préalable d’un plasma très chaud et très dense afin que le taux de réaction soit assez élevé pour que la fusion puisse s’entretenir elle-même. Un tel plasma doit être isolé de l’enceinte qui le contient, et cela pose le problème du confinement ; mais, au préalable, il faut le porter à très haute température (supérieure à quelques dizaines de millions de degrés) et limiter le plus possible les pertes d’énergie (par rayonnement) et de particules (par instabilités). Ce problème du chauffage est lié à ce que la force de répulsion coulombienne empêche des noyaux initiaux de se rapprocher.

Pour les noyaux entrant en jeu dans les réactions de fusion, il faut des énergies de particules de l’ordre de 105 eV. Or, 1 eV correspond à une température de l’ordre de 104 K : il faudrait donc des températures de l’ordre du milliard de degrés. En fait, un nombre non négligeable de particules ayant une vitesse supérieure à la vitesse moyenne, la fusion peut être opérante à des températures légèrement plus faibles : pour les réactions deutérium-deutérium, il faut atteindre 400 millions de degrés ; pour la réaction deutérium-tritium, 45 millions de degrés seraient suffisants.

Les méthodes de chauffage appartiennent à quatre grandes catégories. Elles s’appliquent souvent à des plasmas déjà « préchauffés », comme ceux qui sont produits par des canons à plasmas, qui peuvent servir en même temps à l’injection du plasma dans l’enceinte. Ces méthodes utilisent le chauffage, par interaction avec des ondes électromagnétiques (absorption au voisinage d’une fréquence de résonance), par onde de choc, par compression magnétique, en particulier par compression pulsée (gyrorelaxation), par effet Joule.


Les plasmas dans l’univers

La compréhension de l’origine et de l’entretien des étoiles a exigé de faire appel aux mécanismes nucléaires, seuls capables d’expliquer de façon satisfaisante les sources d’énergie énorme nécessaires. Dans de telles conditions, la matière se trouve à l’état d’ionisation plus ou moins totale. Cela explique le rôle fondamental joué par la physique des plasmas en astrophysique et en radioastronomie. Plus près de nous, la très haute atmosphère se trouve aussi ionisée, et le champ magnétique terrestre, par la structure en « bouteille magnétique » de ses tubes de force, confine des particules chargées à des distances allant de quelques rayons terrestres à quelques dizaines : la physique des plasmas aura donc aussi une importance primordiale en géophysique externe (sans parler des modèles M. H. D. invoqués pour expliquer le géomagnétisme interne).

D. Q.

 L. Spitzer, Physics of Fully Ionized Cases (New York, 1956, 2e éd., 1962 ; trad. fr. Physique des gaz complètement ionisés, Dunod, 1958). / S. Chandrasekhar, Plasma Physics (Chicago, 1960). / L. Artsimovitch, Physique élémentaire des plasmas (trad. du russe, Moscou, 1966). / B. S. Tanenbaum, Plasma Physics (New York, 1967). / E. Schatzman, Plasmas et milieux ionisés (P. U. F., 1968).