Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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planète (suite)

Jupiter

Parfois regardé comme la reine des planètes, il en est bien en réalité la plus grosse ; il ne dépasse Saturne que de peu en diamètre, mais sa masse est trois fois et demie plus forte et laisse loin derrière elle toutes les autres, puisqu’elle représente avec 1/1 000 de la masse solaire vingt fois Uranus et trois cents fois la Terre. Son disque est aussi celui qui s’offre le mieux et le plus régulièrement à l’observation avec un diamètre équatorial toujours compris entre 32 et 48″, une phase négligeable et un bel éclat souvent comparable en intensité et en blancheur à celui de Vénus.

Son globe est fortement aplati, le diamètre polaire étant de 1/10 plus court que le diamètre équatorial. À diverses latitudes, on aperçoit des taches suffisamment persistantes pour constater que la rotation, comme celle du Soleil, se fait non d’un bloc, mais selon une période qui augmente de l’équateur vers les pôles. On ne voit donc que le niveau extérieur d’une masse atmosphérique sans doute importante et dont on ne peut même pas affirmer qu’elle recouvre une surface solide, d’autant que la densité moyenne de Jupiter est très faible (1,31 seulement). Deux formations caractéristiques, situées autour du 30e parallèle Sud, paraissent très stables, bien que leur apparence varie dans le temps. La première est la célèbre Tache rouge, très visible à certaines époques avec une teinte rose vif, parfois moins contrastée sur le fond gris de la bande tempérée sud, mais toujours reconnaissable en une sorte de surimpression ; elle est connue depuis 1664. La seconde est la Grande Perturbation australe, découverte en 1901, peu colorée, mais parfois beaucoup plus étendue : il lui est arrivé, en 1918, de ceinturer la planète sur un demi-tour. Toutes deux paraissent flotter sur la couche nuageuse, dont elles n’accompagnent pas exactement la rotation. La Tache rouge dérive très lentement en longitude, tantôt vers l’est, tantôt vers l’ouest ; la Grande Perturbation australe est beaucoup plus rapide et parfois rattrape la Tache rouge sans s’y mélanger, bien que leur rencontre provoque des déformations temporaires là où il y a contact, seule marque visible de phénomènes probablement très violents. L’atmosphère de Jupiter est composée essentiellement de méthane et d’ammoniac, en majeure partie à l’état solide en raison de la température moyenne très basse qui y règne (– 140 °C). Les radioastronomes ont trouvé un rayonnement dans les ondes centimétriques, correspondant à l’infrarouge et qui confirme très exactement la température de – 140 °C, ainsi qu’une émission sensible dans les ondes décimétriques, issue des couches sous-jacentes et peut-être due à des orages importants, car elle est très variable. Comme la Terre est entourée de zones de radiations, ou zones de Van Allen, découvertes dès les premiers sondages de l’espace, l’image radio-électrique de Jupiter est près de trois fois plus étendue en diamètre que l’image optique, en sorte que la planète doit avoir, elle aussi, une vaste couronne radioélectrique.

Le monde de Jupiter est le plus riche connu : treize satellites lui font cortège, dont les quatre premiers (dits « galiléens ») sont de loin les plus anciennes « lunes » connues après la nôtre. Galilée, en effet, découvrit les trois premiers (I Io, II Europe, III Ganymède) dès ses premières observations avec la lunette d’approche, tout juste inventée, le 7 janvier 1610, et le quatrième (IV Callisto) quelques jours plus tard, le 13. Ce sont des corps importants : I et II comparables à la Lune, III et IV de moitié plus gros en diamètre, approchant de près Mercure et Mars. De magnitude 5 à 6, ils se voient parfaitement dans de simples jumelles, et les amateurs s’attachent à suivre leurs positions variables autour de la planète. Ces satellites circulent, au cours de périodes qui vont de 42 heures (I) à 17 jours (IV) environ, sur des orbites pratiquement coplanaires à 3° du plan équatorial. Le plus souvent, leurs mouvements les font passer devant et derrière la planète et s’éclipser dans son ombre. Ces éclipses, qui ont servi très tôt à déterminer des positions en mer par l’heure du phénomène, ont conduit aussi à la découverte capitale de la propagation à vitesse finie de la lumière et à une première mesure de cette vitesse par le Danois Olaüs Römer (1644-1710) à l’Observatoire de Paris en 1676.

Les autres satellites sont de découverte plus récente : V Amalthée par E. E. Barnard le 9 septembre 1892 à Mount Hamilton et tous les suivants au xxe s., et uniquement par la photographie ; V est de magnitude 13 ; la magnitude des autres est comprise entre 17 et 19. Leurs orbites sont très disparates ; trois ont des inclinaisons voisines de 30°, quatre sont même en mouvement rétrograde ; les périodes s’étalent de 9 à 25 mois.


Saturne

Connue et identifiée depuis toujours dans le ciel à son éclat un peu terne, « plombé » disent les tenants de certains rapprochements, cette planète devait se révéler dès l’invention de la lunette d’approche en 1610 comme un objet exceptionnel et la merveille du système solaire à mesure que le progrès des instruments permettait de la mieux détailler. Son anneau n’était pas à la portée des premières lunettes, mais le globe paraissait flanqué d’excroissances latérales symétriques qui firent qualifier l’objet de tricorps. Puis vint ce que l’on sait maintenant être une phase d’invisibilité de l’anneau et qui revient tous les 15 ans, si bien que l’on hésita jusqu’en 1656 avant de pourvoir donner enfin, et cela grâce à Christiaan Huygens (1629-1695), la véritable interprétation de cette apparence. En 1675, Jean-Dominique Cassini (1625-1712) distingua une première division sombre dans l’anneau, laquelle porte très justement son nom. Comme Jupiter, Saturne est une planète géante, mais peu dense. Comme lui, de nombreux satellites l’entourent ; on en compte onze, dont l’un (Thémis) n’a pas été revu depuis sa découverte en 1900 et dont le dernier (Janus) a été trouvé en décembre 1966 par A. Dollfus sur des clichés pris au pic du Midi. Leurs orbites sont toutes très proches du plan équatorial, où se trouve également l’anneau ; ce plan fait un angle de 27° avec celui de l’orbite annuelle de Saturne, lui-même à 2° 30″ de l’écliptique. Deux fois par année saturnienne, soit tous les 15 ans environ, il passe par le Soleil et, comme il est très mince (pas plus de 100 km, soit 0″ 02 vu de la Terre), il cesse d’être visible ainsi éclairé de profil. En outre, la Terre, qui, vue de Saturne, oscille autour du Soleil sans jamais s’en écarter de plus de 6°, passe, elle aussi, dans le plan de l’anneau soit une, soit trois fois selon le cas. On matérialise ce phénomène en traçant la courbe des hauteurs apparentes du Soleil et de la Terre au-dessus du plan de l’anneau en fonction du temps lors d’une de ces époques. L’anneau disparaît d’une part quand il est éclairé ou vu de profil et d’autre part dans les intervalles de temps où le Soleil éclaire une face, tandis que la Terre voit l’autre. Tout ce qui reste de visible à certains moments est l’ombre de l’anneau sur le globe, parfois des nodosités dans les anses de certaines parties de l’anneau.