Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

phosphore (suite)

Un grand nombre de dérivés organiques du phosphore ont été caractérisés. Les phosphines RPH2, R2PH et R3P (où R est un radical alcoyle) correspondent aux aminés, mais sont très instables, très oxydables et souvent spontanément inflammables. On connaît diverses séries de produits d’oxydation des phosphines : ainsi les acides phosphoniques RPO3H2, les acides phosphiniques R2PO2H et les oxydes de phosphine R3PO.

Enfin, l’acide orthophosphorique est un constituant fondamental des nucléotides ; un nucléotide est formé d’une base purique ou pyrimidique à laquelle est rattachée par un lien glucosidique un sucre combiné à une molécule d’acide phosphorique. Le nucléotide est l’unité de base des acides nucléiques. Les acides nucléiques combinés à une ou à plusieurs molécules de protéines produisent des nucléoprotéines, qui constituent une partie importante des noyaux des cellules et se retrouvent aussi dans le cytoplasme. Ainsi, le phosphore est un élément fondamental de la matière vivante et de la biochimie.

Rôle biologique du phosphore

Dans les tissus animaux et végétaux, le phosphore figure toujours à l’état oxygéné, au maximum de dérivé de l’anhydride phosphorique P2O5, forme particulièrement stable qui servira de support à de nombreux dérivés qui pourront alors subir des réactions métaboliques, par exemple d’oxydoréduction, parfois répétées, comme les réactions enzymatiques. La présence du phosphore est particulièrement importante dans le tissu osseux, où il sert de support au calcium.

Les phosphatases sont des enzymes présentes dans la plupart des tissus vivants et qui interviennent dans les métabolismes du phosphore. Le sérum sanguin renferme des phosphatases dont la connaissance est particulièrement utile en biochimie clinique, car leur augmentation rend compte de l’évolution de certaines maladies. Les phosphatases les plus couramment dosées sont :

• Une phosphatase dite « alcaline », active à pH 9,0, qui est augmentée dans les maladies osseuses et dans certaines affections hépatiques ;

• une phosphatase acide, active vers pH 5,3, dont l’augmentation traduit un cancer évolutif de la prostate.

Formes pharmaceutiques du phosphore

En pharmacie, on utilise depuis longtemps le phosphore comme « reconstituant » et fixateur du calcium :

• sous forme de phosphore métalloïdique en solution huileuse (huile phosphorée, huile de foie de morue phosphorée) [ces médications sont aujourd’hui abandonnées en raison de leur toxicité] ;

• sous forme de dérivés minéraux de l’acide orthophosphorique, du calcium, du sodium, du magnésium, du manganèse : ces sels sont peu assimilables, et on leur a substitué fréquemment des dérivés organiques, comme les glycérophosphates, ou des extraits végétaux phosphores, comme l’inositocalcium ; l’acide orthophosphorique en nature est également prescrit comme fixateur du calcium et comme acidifiant ; cette thérapeutique est peu active ; toutefois, elle connaît actuellement un certain renouveau par l’emploi de hautes doses de phosphates alcalins et de glycérophosphates dans les affections où le métabolisme du calcium est perturbé.

R. D.

H. B.

➙ Cycles biosphériques.

 A. Demolon et A. Marquis, le Phosphore et la vie (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1949 ; 2e éd., 1961). / J. R. Van Waser, Phosphorus and its Compounds (New York, 1958 ; 2 vol.). / Chimie organique de phosphore (C. N. R. S., 1972).

Photios

Théologien et érudit byzantin (Constantinople entre 810 et 820 - † v. 891/892).



Les débuts

Né dans une famille de la haute aristocratie byzantine du parti anti-iconoclaste, neveu du patriarche Taraise, Photios (ou Photius) parvient, malgré l’opposition de sa famille à la politique religieuse des empereurs iconoclastes, à faire des études approfondies et brillantes qui le placeront au premier plan de la renaissance humaniste. Appelé par l’entourage de l’impératrice Théodora, à enseigner dans le cadre de l’université impériale, en cours de rénovation, il entre dans la haute administration après le mariage de son frère Serge avec une sœur de l’impératrice et semble avoir été chargé de mission (v. 855) auprès d’un émir arabe. De cette période datent pour une large part un recueil de notes et d’extraits de lectures (Bibliothèque ou Myriobiblon) ainsi que des « Questions sur divers sujets de littérature, philosophie, exégèse et théologie », les Amphilochia. Lorsque, au printemps 856, Bardas, frère de l’impératrice, prend le pouvoir sous le nom de son jeune neveu Michel III, le patriarche Ignace, institué par Théodora, se trouve entraîné dans la disgrâce de l’impératrice : il est destitué de son siège en novembre 858. Un synode lui donne comme successeur Photios, encore laïque ; celui-ci reçoit au cours d’une seule semaine les diverses ordinations pour pouvoir présider comme patriarche les fêtes de Noël. Le premier évêque consécrateur était Grégoire Asbestas — archevêque de Syracuse —, destitué et anathématisé par Ignace en 852.


Le premier patriarcat (858-867)

Ainsi, dès le début, la légitimité du nouveau patriarche — considéré comme le chef de file du parti libéral — peut être contestée à un double titre : les ordinations précipitées qui font de lui un « néophyte » et la situation irrégulière de son consécrateur. L’opposition du parti ignacien se manifeste aussitôt de manière violente. Lorsque Photios, en 860, envoie au pape Nicolas Ier sa lettre synodique de reconnaissance de communion, il lui est répondu qu’une enquête préalable s’impose sur les conditions de son élection et sur celles de la renonciation de son prédécesseur Ignace. Les légats romains envoyés à Constantinople confirment l’élection de Photios et la déposition d’Ignace (avr. 861). L’examen des actes ne paraît pas satisfaisant à la curie romaine, et le pape Nicolas refuse de sanctionner ceux-ci (862). D’ailleurs, Ignace interjette appel à Rome par l’intermédiaire du moine Théognaste. Un synode romain (été 863) déclare Photios privé de toute dignité ecclésiastique et le menace d’excommunication. Ignace est reconnu comme le patriarche légitime. Néanmoins, en septembre 865, le pape se déclare prêt à reconsidérer l’ensemble de l’affaire et convoque Ignace et Photios à son tribunal suprême.