Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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phonétique (suite)

Production des sons vocaux


Utilisation vocale du larynx

L’organe fondamental d’émission des sons vocaux est le larynx* dont la fonction est avant tout respiratoire. (La fonction vocale est d’ailleurs secondaire pour tous les organes phonatoires.) Le larynx entre en vibration sous l’action de l’air respiratoire pour donner des sons (cri de l’animal). Chez l’Homme, il est une source sonore aux fluctuations d’intensité et aux modifications de durée telles qu’elles engendrent un nombre important de signaux sonores.


Production du souffle

L’acte de phonation* se produit pendant la phase passive de la respiration : l’expiration. L’énergie emmagasinée est alors restituée grâce au relâchement des muscles. Lors de la phonation, le rythme respiratoire est modifié pour répondre aux besoins de l’émission sonore : le temps inspiratoire est très court pour ne pas entrecouper le débit phonatoire ; le temps expiratoire, au contraire, est allongé et nécessite un emmagasinement de l’air dans les voies respiratoires inférieures pour permettre une durée de l’émission aussi longue que possible, tout en maintenant une pression correcte.


Production de la voix ou son laryngé

La voix, ou émission du son au niveau du larynx, est due à l’action des cordes vocales sur la colonne d’air issue des poumons. Pendant la respiration, la valve laryngée, formée de deux rideaux musculaires dont la partie inférieure constitue les cordes vocales, s’entrouvre au maximum, formant un triangle dont la pointe s’appelle la glotte. Les cordes vocales se rapprochent légèrement dans l’expiration. Lors de la phonation, à la fin de l’expiration, elles s’accolent plus ou moins fermement suivant la hauteur du son. Ce barrage musculaire sur le passage de l’air pulmonaire crée une pression sous-glottique qui, lorsqu’elle excède celle des muscles, force les cordes vocales à s’ouvrir et à laisser passer une bouffée d’air. L’air étant repoussé de façon continue par les poumons, un cycle d’ouverture et de fermeture successives est créé, qui donne naissance à une vibration sonore d’origine laryngée, la voix.


Modulation du son laryngé par les cavités de résonance

Le son ainsi formé se propage dans les différentes cavités supralaryngales. L’hypopharynx est le premier résonateur qui modifie l’onde sonore et la pousse vers la bouche et les lèvres d’une part, vers le rhinopharynx et les fosses nasales d’autre part, par le jeu de l’extrémité du voile du palais, ou luette. L’espace buccal est délimité par des parois fixes (la voûte du palais et le maxillaire supérieur), des parois mobiles et rigides (le maxillaire inférieur), des parois molles et mobiles (le voile du palais, le larynx et les lèvres). Le déplacement des parois mobiles modifie la forme de la cavité buccale ou crée d’autres cavités (nasale, labiale). Le mouvement des différents organes qui entrent en jeu dans l’émission du son constitue l’articulation.


Phonétique articulatoire


Phonétique classique et alphabet phonétique international

L’observation directe des mouvements phonatoires avait permis, dès l’Antiquité, d’analyser les sons et de les classer d’après leur mode et leur point d’articulation (ainsi la phonétique magico-religieuse des hindous transmise par Pānini, la phonétique des Grecs liée à un art de la diction et transmise par Platon, Aristote, Denys d’Halicarnasse, etc.). Au xixe s. encore, les phonéticiens de l’école dite « classique » (Henry Sweet, Paul Édouard Passy, etc.) décrivent les mécanismes articulatoires à partir d’observations personnelles. Ces recherches (poursuivies en Angleterre par Daniel Jones) sont liées à une pratique, qui est, cette fois, pédagogique (en particulier les problèmes d’application de la phonétique à l’enseignement des langues). L’Association phonétique internationale et sa revue le Maître phonétique, fondées en 1886, ont créé l’alphabet phonétique international, dont le principe était de noter graphiquement les particularités phonétiques des sons vocaux par des signes. Le principe même d’une transcription phonétique suppose une simplification déjà linguistique des sons vocaux, puisque le nombre des signes est limité alors que les possibilités de réalisation phonétique sont infinies. Un tel alphabet ne saurait donc être exhaustif d’un point de vue phonétique, mais il n’en est pas moins très utile, car il rend compte de la nature phonétique des traits distinctifs utilisés par les différents dialectes et langues du monde ainsi que des particularités essentielles de prononciation d’un même phonème. Le signe phonétique sera noté entre crochets, pour le différencier du signe phonologique noté entre barres obliques ; ainsi, le phonème du français père est réalisé phonétiquement comme une fricative uvulaire à Paris et comme une vibrante apicodentale [r] dans de nombreuses régions de province.


Classement articulatoire des sons du langage

Les sons peuvent être classés en fonction de deux facteurs : d’une part la façon dont l’air s’écoule à travers le chenal expiratoire au moment de la phonation (mode d’articulation), d’autre part la nature des organes, ou articulateurs, dont le contact ou le rapprochement modifie le son laryngé (point d’articulation).

• Mode d’articulation. Certains sons, inexistants en Europe, mais très répandus dans les langues africaines, n’utilisent pas l’air pulmonaire : ce sont les clics. Les voyelles au contraire sont réalisées par un écoulement libre de l’air qui ne rencontre aucun obstacle sur son parcours. Elles peuvent être diversifiées par la hauteur de la langue dans la bouche, la langue étant complètement basse pour la voyelle la plus ouverte [a], et très haute pour les voyelles les plus fermées [u] et [i], les positions intermédiaires de la langue déterminant des degrés moyens d’ouverture vocalique.

Pour l’émission des consonnes, l’écoulement de l’air est soit stoppé momentanément par une fermeture, ou occlusion (consonnes occlusives), soit gêné par un resserrement du chenal buccal, qui produit un bruit de friction (consonnes fricatives, dites aussi constrictives ou spirantes). Certaines occlusives suivies d’un souffle sont dites aspirées. Les affriquées combinent très étroitement une occlusion et une frication. Les liquides, classées traditionnellement parmi les consonnes, combinent dans la cavité buccale une occlusion avec un écoulement libre de l’air : les liquides latérales associent simultanément une occlusion centrale à un écoulement de l’air de l’un ou des deux côtés de la langue [l] ; les liquides vibrantes associent successivement un écoulement de l’air à une ou à plusieurs occlusions très brèves [r]. Les sons de ce dernier type sont en fait à la fois consonantiques et vocaliques.