Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pétrole (suite)

La gestion d’un groupe multinational ou même mondial, comme certaines compagnies de pétrole, ne se conçoit plus aujourd’hui qu’à l’aide d’ordinateurs utilisant des modèles mathématiques pour la répartition des produits en fonction des rendements des divers bruts, pour la programmation de la flotte maritime et pour le choix des investissements : c’est la recherche opérationnelle.

L’Institut français du pétrole

Fondé en 1944, l’Institut français du pétrole, des carburants et des lubrifiants est un centre de recherche scientifique et d’enseignement couvrant toutes les activités de l’industrie pétrolière. Subventionné par une redevance spéciale perçue sur les carburants, il dispose à Rueil-Malmaison d’importants laboratoires où s’effectuent les recherches fondamentales et appliquées sur l’origine et la nature du pétrole, sur les techniques de prospection et de forage, sur les procédés de raffinage et de pétrochimie, sur l’utilisation des produits ainsi que sur l’amélioration de leur qualité.

L’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs à combustion interne (E. N. S. P. M.), fondée à Strasbourg en 1924, est aujourd’hui rattachée à l’Institut avec pour mission de former des ingénieurs et des techniciens dans cinq centres d’études :
— géologie et géophysique ;
— forage et exploitation des gisements ;
— raffinage et génie chimique ;
— moteurs à combustion interne et applications des produits du pétrole ;
— économie pétrolière.

A.-H. S.


Le pétrole et son environnement

L’importance croissante du rôle joué par le pétrole et ses dérivés dans le siècle actuel a eu pour résultat, dans le public, une prise de conscience et parfois une crainte exagérée des possibilités de pollution et de nuisance dont cette industrie devient, pour certains, le symbole. En réalité, les huiles minérales sont généralement dépourvues de toute agressivité toxique ou bactériologique, au point que leur usage fut recherché pendant des siècles pour la médecine et la pharmacie. Cependant, les produits pétroliers sont incontestablement, ne serait-ce que par les tonnages énormes maintenus en circulation, très dangereux à plusieurs égards et doivent faire l’objet d’efforts constants, notamment dans les domaines suivants.
1. Les incendies et les explosions constituent un risque permanent non seulement pour les puits, les navires et les raffineries, aggravé d’ailleurs par leur gigantisme, mais aussi pour tous les utilisateurs.
2. Les déversements accidentels par suite de naufrage ou d’éruption de puits « offshore » peuvent polluer la mer comme la rupture d’un pipe-line peut polluer le sol, causant des « marées noires » dont les poissons et les oiseaux sont victimes, et dont les hommes sont incommodés.
3. Les émissions des raffineries doivent être strictement limitées et contrôlées afin d’éviter toute pollution de l’air, du sol et des rivières, ainsi que le bruit.
4. L’utilisation des produits pétroliers, enfin, est le domaine où la lutte contre les nuisances peut donner le plus de résultats, qu’il s’agisse de la pollution des rivières par les huiles de vidange ou de la toxicité, mortelle dans un local confiné, des gaz d’échappement.


Le pétrole dans l’économie

Non seulement les besoins mondiaux d’énergie ont doublé depuis 1960, mais la part d’énergie couverte par le pétrole et le gaz naturel est passée pendant cette période de 40 à 65 p. 100. En un siècle, cette partie de l’économie est devenue le type même de la grande industrie, concentrée en un petit nombre d’entreprises, d’une part « intégrées » dans un plan vertical, c’est-à-dire possédant les moyens de production, de transport, de raffinage et de commercialisation, d’autre part « diversifiées » dans un plan horizontal, grâce à une participation croissante dans la chimie, les plastiques, les travaux publics et d’autres activités consommatrices.

L’histoire de cette industrie mérite d’être appelée l’épopée du pétrole en raison du caractère aventureux et spéculatif de la découverte de certains gisements, de la concurrence effrénée pour cet « or noir », des ruées de prospecteurs mus par l’appât d’un gain rapide, de l’épuisement prématuré de gisements exploités à outrance, de la monopolisation des raffineries et des moyens de transport, des négociations secrètes pour l’obtention de concessions dans des pays lointains et politiquement instables, en un mot du climat passionnel dans lequel le développement technique et économique a dû se poursuivre pendant un siècle. L’Américain John Davison Rockefeller (1839-1937) fut le symbole vivant de son époque. Parti de rien, car il n’avait que vingt ans lors du forage de Drake, il créa la Standard Oil Company, entreprise qui, vers 1880, contrôlait 90 p. 100 du raffinage et du transport du pétrole aux États-Unis, tandis que lui-même devenait l’homme le plus riche du monde. En 1911, son trust fut divisé en trente-trois sociétés indépendantes, dont les plus connues sont les Standard Oil Company du New Jersey (Esso), de New York (Mobil), de l’Ohio et de Californie (Chevron). À cette époque, d’autres grandes entreprises pétrolières se développèrent rapidement ; les américaines, Texaco, Gulf Oil et Continental Oil, l’anglo-hollandaise Royal Dutch-Shell, la belge Petrofina, la britannique BP. Lorsqu’en 1914 le gouvernement anglais prit une participation majoritaire dans cette société, une ère nouvelle venait de s’ouvrir, celle de l’intervention directe de l’État dans une industrie jusqu’ici privée, avec la création d’autres sociétés mixtes, comme la Compagnie française des pétroles (Total), puis des sociétés appartenant en totalité à l’État, comme ELF en France et AGIP en Italie. En 1938, le Mexique fut le premier grand producteur, après l’U. R. S. S., à nationaliser son industrie pétrolière. Cet exemple fut alors suivi par des pays aussi différents que l’Espagne, l’Iran, l’Argentine ou l’Algérie et, bien entendu par tous les pays à économie socialiste.