Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Pasteur (Louis) (suite)

Normalien, il suit les cours de Jean-Baptiste Dumas et étudie le problème de la polarisation de la lumière à propos des acides tartriques et paratartriques. En 1846, il est reçu à l’agrégation des sciences physiques. Sur l’insistance de son maître Antoine Jérôme Balard, il n’est pas nommé en province et reste à Paris pour préparer sa thèse de doctorat. Le 23 août 1847, il soutient une thèse de physique sur l’« étude des phénomènes relatifs à la polarisation rotatoire des liquides ». Le 20 mars 1848, il présente à l’Académie des sciences son mémoire Recherches sur le dimorphisme, concernant l’aptitude de certains corps à cristalliser de manière dissemblable. Après la révolution de 1848, il étudie de nouveau le problème des tartrates et paratartrates, et il démontre que l’acide paratartrique se compose d’acide tartrique droit (naturel) et d’acide paratartrique gauche. Ces deux acides ont des pouvoirs rotatoires égaux et contraires, qui se neutralisent lorsqu’ils sont mélangés en solution aqueuse. Jean-Baptiste Biot, spécialiste de la polarisation rotatoire, après avoir vérifié ce travail de Pasteur, publie un rapport sur les « recherches sur les relations qui peuvent exister entre la forme cristalline, la composition chimique et le sens du pouvoir rotatoire ».

Pasteur est nommé professeur de physique au lycée de Dijon. En janvier 1849, il devient suppléant de chimie à la faculté de Strasbourg. Il épouse la fille du recteur Laurent, Marie, et continue ses travaux de cristallographie. Sa réputation s’étend parmi les physiciens et les chimistes français et étrangers. En 1852, il va à Leipzig, puis en Autriche et à Prague pour étudier les tartrates. En juin 1853, il réussit la transformation de l’acide tartrique en acide racémique. Ses travaux sont consacrés en janvier 1853 par l’Académie des sciences. Le jeune savant souligne l’importance de la dissymétrie moléculaire, qui peut intervenir dans des phénomènes physiologiques comme celui de la fermentation.

En septembre 1854, il est nommé professeur et doyen de la nouvelle faculté des sciences de Lille. Des accidents industriels dans la fabrication d’alcool de betterave (1856) sont à l’origine de ses travaux sur la fermentation, et en particulier sur la fermentation alcoolique.

Tandis que les travaux antérieurs des chimistes s’accordaient à nier le rôle de la « vie » dans le mécanisme de la fermentation, Pasteur, isolant la levure lactique, reconnaît là un phénomène corrélatif de la vie. En août 1857, il fait une communication sur la fermentation lactique à la Société des sciences de Lille.

Il revient alors à l’École normale supérieure pour y être administrateur et directeur des études scientifiques. C’est dans un laboratoire misérable qu’il élabore son mémoire sur la fermentation alcoolique (déc. 1857), où il conclut que « le dédoublement du sucre en alcool et en acide carbonique est un acte corrélatif d’un phénomène vital ». En janvier 1860, quelques mois après la mort de sa fille aînée, il obtient le prix de physiologie expérimentale pour ses travaux sur la fermentation. Il veut alors s’attaquer aux phénomènes des générations spontanées. Il tient, en effet, à contrôler les expérimentations de Félix Archimède Pouchet, qui démontraient la possibilité de faire naître des animalcules dans des récipients privés d’air.

Il commence par l’étude microscopique de l’air. Grâce à des filtres de coton, il isole des « germes » qui troublent une suspension stérile. Puis il démontre, en ouvrant ses ballons à Paris, en province, en montagne, sur la mer de Glace, que « les poussières en suspension dans l’air sont l’origine exclusive de la vie dans les infusions » (nov. 1860). Malgré ses détracteurs, il persévère, affirmant, en 1861, que la fermentation butyrique est liée à des infusoires, vivant d’ailleurs sans air (anaérobies).

En décembre 1862, il est nommé membre de l’Académie des sciences. Biot, son maître et ami, est mort quelques mois plus tôt. Pasteur va reprendre ses travaux sur la fermentation, mais déjà il affirme que son but est d’arriver à la connaissance des maladies putrides et contagieuses.

En 1864, il envisage le problème du développement des ferments, cause des maladies des vins, et découvre qu’une élévation brève de leur température, sans les altérer, les protège.

Jean-Baptiste Dumas lui demande d’étudier l’épidémie de « pébrine » (les taches des vers à soie malades ressemblent au poivre) qui ruine la sériciculture, alors en plein renouveau. Pasteur est envoyé à Alès en juin 1865. Malgré la mort brutale de son père, il étudie cette mystérieuse maladie. Il démontre qu’il est nécessaire, pour avoir des vers sains, de ne retenir que des graines provenant de papillons sains. Il met en évidence la contagiosité de la pébrine et pose les principes de la sélection des œufs provenant de papillons sains.

Parallèlement, il a mis au point les procédés de conservation des vins (la pasteurisation).

En 1867, malgré les difficultés internes de l’École normale, Pasteur, grâce à des crédits spéciaux, améliore son laboratoire.

À Orléans, il démontre devant des industriels l’importance du rôle de Mycoderma aceti dans la fabrication du vinaigre, expose clairement le mécanisme vivant de l’acétification, les risques d’erreurs, les causes d’échecs de l’industrie du vinaigre.

En janvier 1868, il écrit un plaidoyer pour le développement de la recherche, que le Moniteur refuse. Il est soutenu par Victor Duruy, et l’article est publié dans la Revue des cours scientifiques, puis en brochure. Napoléon III, réunissant le 16 mars plusieurs savants, décide de donner aux chercheurs français de quoi rivaliser avec les Allemands.

Pasteur, durant cette année 1868, s’occupe des vers à soie à Alès, et du chauffage des vins à Toulon. Grâce à ses expériences, il assure la possibilité de conservation des vins et l’augmentation de leurs débouchés.

Le 19 octobre, il fait une hémiplégie gauche. Il récupère peu à peu et, en janvier 1869, marche seul. Dans les mois qui suivent, de nouvelles expériences démontrent la valeur du système de grainage pour le renouvellement de la sériciculture, mais les sceptiques restent nombreux. Pourtant, en Autriche et en Italie, la méthode préconisée par Pasteur donne de remarquables résultats.