Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Paris (suite)

Le siège de Paris (1870-71)

Quand les IIIe et IVe armées allemandes se portèrent sur Paris après leur victoire de Sedan, l’encerclement de la capitale fut consommé le 19 septembre 1870. Mais l’enceinte de la ville, avec son développement de 38 686 m et ses 94 bastions, ainsi que les 17 forts couronnant les collines les plus proches constituaient l’ensemble fortifié le plus puissant d’Europe. L’ennemi se contenta donc de bloquer la place. Après que la capitulation de Metz (27 oct.) eut encore augmenté l’effectif des assiégeants, ceux-ci n’envisagèrent pas de donner l’assaut ; ils se contentèrent de resserrer le blocus en établissant un système de fortification de campagne très dense.

Dès lors, le commandement français fut placé devant l’obligation de livrer une bataille de rupture pour sortir de Paris et pour donner la main aux armées que le gouvernement de la Défense* nationale allait créer en province. Le commandement de Paris assiégé fut exercé par le chef du gouvernement provisoire, le général Louis Trochu (1815-1896), et celui-ci fut constamment placé devant deux nécessités : soutenir le moral des Parisiens par l’espoir d’une percée victorieuse, mais en même temps éviter une épreuve de force qui eût été sans doute fatale. Trochu disposait en effet sur le papier de 500 000 hommes, mais il pouvait compter seulement sur les XIIIe et XIVe corps d’armée mis sur pied par les dépôts de l’armée impériale, que renforçaient 15 000 marins et 15 000 gendarmes et douaniers. En dehors de ces unités instruites et disciplinées, il n’y avait que des formations improvisées : les 90 bataillons de garde mobile, dépourvus de tout entraînement et qui ne pouvaient absolument pas être engagés dans une action de rupture ; enfin les 350 000 hommes de la garde nationale de Paris, troupe indisciplinée, ignorante des réalités du combat et seulement capable de garder les remparts.

Aussi les petites opérations que Trochu prescrivit au début du siège : Châtillon le 19 septembre, Villejuif le 23, Chevilly et Thiais le 30, Bagneux le 13 octobre, La Malmaison le 21 et Le Bourget les 28 et 30, furent-elles des engagements locaux qui permirent d’aguerrir les unités régulières. Trochu n’effectua par la suite que trois tentatives de sortie :
— l’une vers le sud-est dans le but d’aider la 1re armée de la Loire (elle donna lieu à la bataille de Champigny, où les positions allemandes furent attaquées au sud de la Marne du 30 nov. au 2 déc.) ;
— la seconde vers le nord, où le terrain découvert avait semblé favorable au déploiement de nombreuses unités (ce fut le 21 déc. l’affaire du Bourget) ;
— la troisième tentative eut lieu vers le sud-ouest, dans le but de menacer Versailles, où les Allemands avaient installé leurs quartiers généraux (ce fut la bataille de Buzenval le 19 janv. 1871).

Les Allemands tentèrent cependant de hâter la capitulation en bombardant les forts de l’est et du sud de Paris à partir du 29 décembre. Le 5 janvier, ils commencèrent à canonner les quartiers sud de la capitale, où ils lancèrent environ 10 000 obus qui tuèrent 395 personnes. Le 23 janvier, il ne restait plus que dix jours de vivres malgré les sévères restrictions qui avaient été imposées à la population. C’est dans ces conditions que Jules Favre (1809-1880) se rendit à Versailles, où il signa un armistice d’une durée de vingt et un jours à compter du 28 janvier.

P. R.

➙ Franco-allemande (guerre).

 A. Horne, The Fall of Paris. The Siege and the Commune (New York, 1966 ; trad. fr. le Siège de Paris et la Commune, Plon, 1967).


L’art à Paris

Paris résume, à maints égards, l’histoire artistique de la France*. Sa position privilégiée dans un pays centralisé de longue date fait qu’il n’est pas toujours aisé de séparer l’art parisien d’un art français auquel il a souvent donné le ton, surtout depuis le xviie s. Cette difficulté est particulièrement sensible en ce qui concerne la peinture et la sculpture ; aussi n’en sera-t-il ici question que dans leurs rapports avec le cadre monumental.

L’héritage du Ier millénaire est peu important. Les thermes de Cluny et les vestiges de l’amphithéâtre sont les principaux témoins d’une ville gallo-romaine qui n’eut jamais l’éclat de celles du Midi. Il ne reste guère que le souvenir des grands établissements mérovingiens de la rive gauche : l’abbaye des Saints-Apôtres (Sainte-Geneviève), fondée par Clovis, celle de Sainte-Croix-et-Saint-Vincent, fondée par Childebert et consacrée en 558. Paris fut délaissé à l’époque carolingienne, abaissé encore par les invasions normandes. Un timide réveil marque le début de l’époque romane, comme l’atteste à Saint-Germain-des-Prés l’église rebâtie de 990 à 1014 et dont subsistent, dénaturés, la nef, le transept et le clocher occidental.


Naissance et progrès de l’art gothique

La suprématie artistique de Paris ne s’est affirmée qu’avec l’essor de la monarchie capétienne, sous le signe du jeune art gothique dont les expériences ont occupé le xiie s. et le premier tiers du xiiie s. La croisée d’ogives apparaît vers 1135 dans le chœur de l’église bénédictine de Saint-Martin-des-Champs, vers 1150 à Saint-Pierre de Montmartre, mais l’esthétique romane y règne encore. Le triomphe du nouveau style est marqué par la construction de la cathédrale Notre-Dame, fondée en 1163 par l’évêque Maurice de Sully. Le plan comporte un transept non débordant à l’origine, des bas-côtés doubles, un double déambulatoire avec une couronne de chapelles rayonnantes. Couvert de voûtes sexpartites, le vaisseau principal offrait une ordonnance à quatre étages, dont celui des tribunes, réduite à trois étages au xiiie s. Élevée dans la première moitié du xiiie s., la façade accuse une influence normande avec son dessin en H, ses divisions nettes, son équilibre robuste. On remarque au portail de droite le remploi de morceaux plus anciens (v. 1170). Comme le précédent, les portails de gauche (1210-1220) et du centre (1220-1230) ont perdu les statues de leurs pieds-droits, mais conservé leurs bas-reliefs à thèmes encyclopédiques, leurs tympans représentant au centre le Jugement dernier, très mutilé, à gauche la Dormition et le Couronnement de la Vierge, un des chefs-d’œuvre de la sculpture gothique.