Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Paraná (suite)

Le territoire du Paraná fut pénétré dès le xviie s. par les Portugais, en quête de l’or ; en 1648, ceux-ci fondèrent Paranaguá, qui reste encore le plus important port de l’État. À la même époque, les Espagnols, venus de l’intérieur par le Paraguay, cherchèrent à asservir les Indiens qui peuplaient cette zone ; mais ils furent repoussés par les raids des bandeirantes portugais, qui rattachèrent le Paraná à la colonie portugaise du Brésil. Au xviiie s. se développa une mise en valeur des régions de prairies, partagées en grands domaines d’élevage extensif possédés par des Portugais. Cet élevage, destiné à ravitailler les zones minières situées plus au nord, dans les États de São Paulo et de Minas Gérais, se situe autour de la ville de Curitiba, qui devient ainsi la capitale de l’État de Paraná (1854). Mais, à la fin du xixe s. et au début du xxe, la grande affaire de l’État devient le démarrage de la culture du café dans sa partie nord ; elle prolonge le grand mouvement de front pionnier parti de l’État de São Paulo. À la pénétration progressive du café correspond la création des villes-centres tertiaires, dont la plus importante, Londrina, est devenue le centre régional de cette partie dynamique du Paraná.

Cette ultime phase de la mise en valeur de l’État se fit en trois étapes : la première, vers 1862, occupa le « Vieux Paraná » et fut réalisée par des capitalistes paulistes. Une voie ferrée pénétrant vers l’intérieur favorisa la naissance de villes comme Cambará, Bandeirantes... Ensuite, les « companhias de terra », compagnies privées pratiquant une spéculation sur les terres, ainsi que des compagnies de colonisation publiques menèrent à bien l’occupation du « Nouveau Paraná », qui se termina vers 1950. Celui-ci, économiquement puissant par l’ampleur de la culture du café, vit s’éclore des centres urbains importants, tels que Londrina, Apucarana, Arapongas, etc. Enfin, depuis 1940, les mêmes compagnies de colonisation assurent l’occupation du « Très Nouveau Paraná », où prolifèrent également des centres urbains importants. Durant cette dernière phase, le Centre-Sud-Est a également bénéficié d’une mise en valeur grâce à l’exploitation du pin et du maté.

L’immigration a joué un rôle essentiel dans la colonisation du Paraná, avec l’installation de colons européens, surtout italiens, ukrainiens et allemands. Il s’y ajoute actuellement l’apport des migrations nationales, venues du Nord-Est et du Minas Gerais.

L’économie repose avant tout sur l’activité agricole, avec la commercialisation d’un certain nombre de produits : café, maïs, haricots, coton, riz, pomme de terre, manioc, blé. Depuis 1950, le café tient une place prépondérante dans le revenu de l’État. C’est donc une économie soumise aux variations des cours sur le marché mondial et, de ce fait, particulièrement vulnérable. En outre, les bénéfices réalisés grâce à la culture du café n’ont été que partiellement réinvestis au Paraná même, et cette fraction n’a servi qu’à étendre encore ces mêmes plantations de café. Il n’est donc pas étonnant que la stabilisation de la production caféière, jointe à un désastre agricole provoqué par de grandes gelées survenues en 1962, ait gravement perturbé l’économie du Paraná.

L’urbanisation a été extrêmement rapide. Elle se caractérise par une forte augmentation de la population

dans les trois plus grandes villes : Curitiba, Ponta Grossa et Londrina. Curitiba, qui comptait 344 560 habitants en 1960, en abritait 707 000 en 1970. Au contraire, les autres cités, datant d’avant 1950, n’ont grandi que lentement. La poussée urbaine se traduit davantage par une prolifération de nouveaux petits centres urbains. En 1950, le Paraná n’avait que six villes de plus de 10 000 habitants et quatorze comprises entre 5 000 et 10 000 habitants ; en 1960, il renfermait déjà quinze villes de la première catégorie et trente-quatre de la seconde.

M. R.

paranoïa

Trouble du jugement ou d’aberration de la raison.


Le mot paranoïa a été introduit en 1838 dans la langue française. Dans la langue anglaise et notamment le dictionnaire de Webster, il désigne deux entités : d’une part, une psychose chronique délirante systématisée sans hallucination et, d’autre part, une tendance naturelle de la part d’individus à la suspicion, à la méfiance, à la mégalomanie secrète ou avouée. En schématisant ces notions, on regroupe sous ce terme deux ordres de faits pathologiques ou de troubles mentaux, tantôt liés l’un à l’autre, tantôt totalement indépendants, même au cours d’une longue évolution existentielle.


La constitution ou personnalité paranoïaque

C’est une organisation pathologique de la personnalité, permanente par définition, appelée par les uns constitution paranoïaque, par les autres névrose de caractère et par d’autres encore personnalité psychopathique de type paranoïaque. Quels que soient les vocables utilisés, il s’agit bien, dans tous les pays, dans toutes les sociétés, dans toutes les races et dans l’histoire même de l’humanité, des mêmes anormaux, les « paranoïaques », qui sont tous les mêmes, reconnaissables à leur « air de famille ». Ils se distinguent par quatre grands traits de caractère plus ou moins évidents : la surestimation de soi avouée ou dissimulée, qui va de la simple suffisance à la mégalomanie ; la psychorigidité, c’est-à-dire le manque de souplesse ; l’entêtement, avec un culte particulier de la logique pure, du droit, de la justice, du devoir purement formels ; la méfiance, avec son corollaire la peur d’être dupe, la susceptibilité, la conviction intime qu’autrui peut vous nuire. L’insociabilité résulte des trois traits précédents. Le paranoïaque se déclare souvent blessé, meurtri par ses contacts avec autrui et la collectivité. Il est agressif, vindicatif ou rancunier. Il s’isole ou impose à sa famille une restriction des contacts sociaux. Il a peu ou pas d’amis. Ses relations professionnelles sont empreintes de formalisme, de soumission apparente à l’autorité « pourvu qu’elle y mette les formes » ; les relations avec les égaux ou les inférieurs sont dures, rigides, parfois tyranniques. Avec les supérieurs, c’est la loi du tout ou rien : soumission mielleuse à la force ou contestation permanente sur des détails sans importance, à défaut du fond.