Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Achéens (suite)

L’organisation du monde achéen

Les archéologues, en étudiant les palais, pouvaient déjà entrevoir ce qu’était l’organisation du monde achéen. Mais l’idée que l’on s’en fait s’est beaucoup clarifiée depuis que l’on a pu déchiffrer, en 1952, les tablettes d’argile découvertes dans les palais de Knossós, de Pylos et de Mycènes (les incendies, en les faisant cuire, les ont conservées) : le mérite de leur lecture revient à Michael Ventris, qui fut assez audacieux pour supposer que leur écriture, dérivée de l’écriture crétoise et à laquelle on a donné le nom de minoen linéaire B, transcrivait un grec archaïque, langue des Achéens, et non une langue méditerranéenne.

Les royaumes qui divisent le domaine achéen sont peu nombreux (Iôlkos, Thèbes, Athènes, Mycènes, qui domine Tirynthe, Pylos) ; ils sont donc forts et n’éprouvent que rarement le besoin de s’unir, comme ils le firent pour assiéger Troie. À leur tête est le roi, wa-na-ka, souverain absolu dont la personne est l’objet d’un respect religieux ; à ses côtés, le la-wa-ge-te semble avoir des responsabilités militaires, car il est le chef du « laos » (le peuple en armes) ; autour du roi se rassemblent des compagnons constituant une sorte d’aristocratie chargée d’argent et d’honneurs.

Dans les provinces du royaume se dispersent des petits villages, ou dèmes, vivant repliés sur eux-mêmes et dont les terres peuvent être cultivées collectivement par la communauté villageoise et ses esclaves ou laissées à telle ou telle famille à titre d’usufruit. Un conseil des anciens (gerousia) y regroupe les gens les plus puissants, et un basileus y est, au nom du roi, responsable de la perception de contributions en hommes ou en matériel.

Les tablettes mycéniennes (qui ne sont rien d’autre que des inventaires, des comptes) permettent de voir avec quelle minutie le roi contrôle la vie économique du pays, ainsi que l’activité de chacun des habitants : cela lui permet de lever exactement les impôts. D’autre part, aucun service ne s’échange dans le pays sans que le palais ait servi d’intermédiaire ; aussi, ce dernier devient-il un énorme entrepôt de richesses multiples et même le siège d’industries qui permettent au roi de jouer un grand rôle non seulement sur le continent, mais aussi outre-mer. Un tel système de gouvernement, dont l’efficacité est indiscutable, comme le prouve l’extraordinaire réussite des Achéens, ne pouvait subsister que dans la mesure où le roi s’appuyait sur des bureaucrates capables de lui donner une image exacte des ressources de son royaume. Il avait su trouver en Crète, où la tradition en ce domaine était ancienne, les scribes nécessaires ; ceux-ci s’adaptèrent à la langue de leurs nouveaux maîtres et les servirent sans jamais se mêler à la masse de la population qu’ils contrôlaient. Mais, quand cette caste eut été détruite, il fut impossible de continuer à faire vivre des monarchies aussi importantes, et les royaumes ne purent que rétrécir.

Durant le xiie et le xie s., des envahisseurs descendent du nord. Parmi eux se trouvent les Doriens. Ils s’emparent de Mycènes (1125), puis du reste du Péloponnèse, franchissent la mer à leur tour et prennent pied en Crète, dans les Cyclades. Les populations anciennes cèdent la place, et un bon nombre d’Achéens vont s’installer en Grèce d’Asie, après avoir passé par Athènes, relativement à l’écart des invasions. Ils s’établissent aussi à Chypre, où leur civilisation, protégée par l’éloignement, se perpétuera. Quant au continent, abandonné aux nouveaux venus, il tombe dans la barbarie ; le village devient l’unité politique de la Grèce pour le temps des « siècles obscurs ».

J.-M. B.

➙ Athènes / Crète / Grèce / Mycènes.

 A. Severyns, Grèce et Proche-Orient avant Homère (Bruxelles, 1960, rééd. 1965).

Achéménides

Famille royale des Perses (viie-ive s. av. J.-C.), qui descendait du chef Akhaimenês.


Les Achéménides régnèrent d’abord sur de petites principautés dans le sud-ouest de l’Iran ; puis, à partir des conquêtes de Cyrus (vie s.), ils dirigèrent un immense empire qui fut détruit par Alexandre le Grand en 330 av. J.-C. Malgré leur puissance, ils restent mal connus, car leurs scribes utilisaient, plus souvent que la traditionnelle tablette d’argile, le parchemin ou le fragile papyrus ; en dehors des rares inscriptions royales, l’historien ne dispose guère que des témoignages de sujets réticents ou d’adversaires passionnés.


Les débuts des Achéménides

Les premiers princes de cette famille, qui ne sont guère pour nous que des noms, profitent de l’affaiblissement de la vieille monarchie élamite pour étendre le domaine du petit peuple barbare qu’ils dirigent et qui est alors installé en Parsoumash (dans les monts Bakhtiyārī, vers l’actuelle Khurramābād, au nord de Suse). Ils fixent leur capitale dans la cité élamite d’Anshan, puis ils conquièrent le pays de Parsa (l’actuel Fārs, dans la province de Chirāz), qui va devenir le centre de la nation perse. Divisés en deux branches rivales, les Achéménides sont tributaires successivement des Élamites, des Assyriens et des Mèdes.


Les conquêtes de l’armée perse

Mais un des princes achéménides, Cyrus II, sait utiliser la force militaire de son peuple, qui, cantonné dans des montagnes arides, est plus robuste que les populations civilisées de l’Orient. Ne dominant au départ qu’une partie des tribus perses, il est cependant capable d’exploiter, au détriment des monarchies orientales, l’hostilité que leur despotisme a toujours suscitée. Il livre une série d’offensives qui lui permettent de saisir avec toutes leurs dépendances les royaumes mède (550), lydien (547) et babylonien (539). Il unifie à son profit l’Iran barbare, qui lui fournira de robustes soldats, et c’est en combattant les nomades dans les steppes du Nord-Est qu’il trouve la mort. Ses fidèles Perses ont soumis au grand conquérant à la fois les populations les plus évoluées et les plus arriérées de l’Asie occidentale, mais, après 550, Cyrus s’est appuyé surtout sur le peuple mède, qui avait auparavant dominé un véritable empire et qui, ayant les qualités guerrières des Iraniens, était aussi plus nombreux et plus civilisé que les Perses.